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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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dormir. Je la veillerai jusqu’au matin si vous voulez.
    — Je ne peux vous demander cela, protesta Joseph.
    — Je vous en prie, ce sera de bon cœur.
    — Puis-je rester un moment ? demandai-je. Il y a autre chose dont j’aimerais vous parler. »
    Joseph partit après s’être confondu en remerciements et nous l’entendîmes descendre lourdement l’escalier.
    « Je vous sais gré de tout ce que vous faites, Guy, dis-je.
    — Je vous en prie. J’avoue être intrigué par l’état de cette jeune fille. C’est fort étrange.
    — J’ai ici une chose qui vous intriguera encore davantage », dis-je en plongeant la main dans ma poche, d’où je sortis le pot d’étain enveloppé dans un linge. « Voici, à ce que je crois, du feu grégeois. Personne ne sait qu’il se trouve entre mes mains. » Je défis le linge et posai le pot sur la table après avoir mis la lampe à huile sur le sol. « N’approchez pas la chandelle, Guy, j’ai peur que cela ne prenne feu. »
    Il examina la substance du mieux qu’il put dans la pénombre, mit un peu du liquide sombre sur le bout de ses doigts qu’il frotta et renifla d’un air dégoûté. « C’est donc cela, le feu grégeois, maugréa-t-il.
    — Oui. Le feu noir. Je me demandais comment le feu pouvait être noir, mais maintenant je vois que c’est du liquide qu’il s’agit.
    — Peut-être voulait-on aussi parler des ténèbres dans lesquelles il pouvait plonger les hommes ?
    — Peut-être. Dans les anciens grimoires, on l’appelle aussi “larmes du diable”. » Je lui racontai comment j’avais trouvé le pot à Smithfield et comment il s’en était fallu de peu qu’il ne tombe dans les griffes de Rich. « Prenez-le, je vous prie. Pourrez-vous l’examiner demain ?
    — Aux conditions que je vous ai données. Je ne ferai rien pour aider Cromwell à l’utiliser.
    — C’est entendu. »
    Il plongea son regard dans le mien. « Vous savez, Matthew, vous auriez de graves ennuis s’il venait à découvrir que c’est à moi que vous avez apporté ce pot plutôt qu’à lui.
    — Alors, nous devons faire en sorte qu’il ne l’apprenne pas, dis-je avec un sourire nerveux. Et pourtant, je ne peux m’empêcher de penser que Cromwell a certes commis beaucoup de mauvaises actions, mais, au moins, il a la vision d’un État chrétien. Tandis que Norfolk souhaite que l’Angleterre retourne à la superstition et l’obscurantisme.
    — Un État chrétien ? Pareille chose est-elle possible dans ce monde déchu ? Assurément, les chroniques du dernier millénaire montrent le contraire. C’est pourquoi nombreux sont ceux qui, comme moi, ont choisi de se réfugier dans un cloître. Avant que cette voie ne soit interdite.
    — Oui, l’ancienne Église a toujours cru que le monde se dirigeait tête baissée vers la catastrophe finale, et qu’aucune actionhumaine n’y pourrait rien changer. Cela excuse de nombreux abus d’autorité.
    — Il faudrait des mesures draconiennes pour parvenir à établir le parfait État chrétien. Si on devait mettre fin à la pauvreté et à la mendicité, il faudrait pressurer les riches, par exemple.
    — Je me dis parfois que ce serait une bonne chose.
    — On croirait entendre parler un anabaptiste.
    — Non, juste un vieil avocat qui ne sait plus où il en est, dis-je en riant.
    — Mais le souci premier de Cromwell n’est pas de mettre fin à l’injustice sociale, et vous le savez. Seule compte pour lui la foi protestante, et il utiliserait le feu grégeois et ses terribles effets pour la promouvoir.
    — Oui, vous avez raison. On ne peut le mettre entre ses mains sans crainte. Ni entre celles de quiconque, d’ailleurs. »
    Guy parut soulagé. « Dieu soit loué, vous en avez conscience. » Il considéra le pot d’étain, puis le glissa avec précaution dans sa poche. « Je vous préviendrai dès que j’aurai quelque chose à vous dire.
    — Je vous remercie. Demain, si vous pouvez. Il ne restera que quatre jours avant la démonstration prévue devant le roi. Le jour où Elizabeth devra comparaître à nouveau devant le tribunal. »
    Comme si elle avait entendu son nom, Elizabeth remua les jambes sous la couverture. Nous nous tournâmes vers elle. « Sarah », murmura-t-elle encore. Puis : « Ce petit criminel. L’infâme criminel. » Ses paupières frémirent et, ouvrant les yeux, elle nous regarda sans paraître comprendre.
    Guy se pencha vers elle. « Demoiselle Wentworth, vous êtes dans une chambre propre, toujours

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