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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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doucement.
    — Pendant ces deux derniers jours, Elizabeth a eu une autre compagne dans sa geôle, une enfant, une petite mendiante folle qui courait dans les quartiers de la prison en accusant tout le monde d’avoir enlevé son petit frère. Elle a fait du scandale chez un boulanger à Cheapside…
    — C’est elle que nous avons vue l’autre jour…
    — Le commerçant a porté plainte. Elle a été arrêtée par le constable et amenée à Newgate, où on l’a mise dans la basse-fosse. Elizabeth ne voulait pas davantage lui parler qu’à la vieille femme qui a été pendue… » Joseph s’interrompit.
    « Pourtant, elle est devenue très agitée quand on est venu chercher la vieille femme. Cela s’est-il produit à nouveau ? » demandai-je.
    Joseph secoua la tête avec lassitude. « Non. Quand je suis allé voir Lizzy ce matin, le geôlier m’a dit que la petite mendiante avait été examinée par un médecin et qu’on l’avait emmenée à l’asile de Bedlam, car il la croyait folle. Mais il a ajouté que, quand il leur a apporté leur pitance hier soir, il a entendu Lizzy et la petite en train de parler. Il n’a pas distingué leurs paroles, mais il a remarqué que c’était la première fois qu’il entendait la voix d’Elizabeth. Quant à la petite, elle était taciturne depuis qu’on l’avait mise dans la basse-fosse.
    — Comment s’appelle-t-elle ?
    — Sarah, je crois. Son frère et elle étaient orphelins, et ils ont été jetés dehors quand on a fermé le couvent de St Helen. Cematin, j’ai trouvé Elizabeth assise, les yeux dans le vague, refusant de me regarder ou de regarder la nourriture que je lui avais apportée. Pourtant, elle n’avait pas touché à son repas du matin. Et quand je suis retourné la voir ce soir… » Il ne put continuer et se cacha à nouveau la tête dans les mains.
    « Joseph, dis-je, j’espérais pouvoir vous donner des nouvelles demain. Je sais que vous aviez peur que je ne vous aie oublié. »
    Il leva les yeux vers moi. « Vous êtes le seul espoir qui me reste, messire Shardlake. Mais maintenant, je crois qu’il est trop tard. Ce soir, Elizabeth gisait sans connaissance sur sa paillasse, le visage brûlant. Elle a la fièvre des prisons, messire. »
    J’échangeai un regard avec Barak. Les épidémies de fièvre des prisons, assez communes, étaient attribuées d’ordinaire aux humeurs fétides venant de la paille nauséabonde. On avait parfois vu tous les détenus d’une prison en périr, et il était arrivé que les miasmes pénètrent à l’Old Bailey, terrassant des témoins et même des juges. Si Elizabeth en était atteinte, ses chances de survie étaient minces.
    « Le geôlier refuse de l’approcher, reprit Joseph. J’ai proposé de payer pour qu’on la mette dans un endroit plus sain, qu’on appelle un médecin. Mais Dieu sait où je trouverai l’argent, je viens d’apprendre que mes moissons ont été détruites par la sécheresse. » J’entendis une note d’hystérie percer dans sa voix.
    Je me levai avec peine. « Alors, c’est à moi de prendre l’affaire en main. J’ai promis de m’occuper d’Elizabeth et je ne reculerai pas devant mes responsabilités. Je vais aller à Newgate. Je sais qu’il y a des chambres pour ceux qui ont de l’argent. Et je connais un apothicaire qui la soignera mieux que personne.
    — Elle a besoin d’un médecin.
    — Cet homme est médecin, mais, en tant qu’étranger, il ne peut exercer dans notre pays.
    — Cela coûtera…
    — Je m’en charge. Vous pourrez toujours me rembourser plus tard. Voilà au moins une chose que je peux faire sans arrière-pensée ni complication.
    — Je vous accompagnerai volontiers, annonça Barak.
    — Vraiment ? dit Joseph dont les yeux s’écarquillèrent légèrement en voyant pour la première fois le crâne dégarni de mon compagnon.
    — Merci, Barak. Alors, venez. J’enverrai Simon porter chez Guy un message lui demandant de venir à Newgate. » J’avais trouvé Dieu sait où une ultime réserve d’énergie. Joseph me jugeaitpeut-être plein d’abnégation, mais j’avais le sentiment que si Elizabeth mourait avant la fin du délai imparti, après toutes les épreuves auxquelles m’avait conduit ma décision de la défendre, ce serait une ironie trop amère pour que je puisse la supporter.
    Sombre et sinistre la nuit, la prison de Newgate se découpait, menaçante, sur le ciel étoilé. Le geôlier était furieux d’avoir été tiré de son

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