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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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proie à la plus grande confusion. Nous l’emmenâmes dans une taverne et restâmes avec lui une demi-heure en attendant qu’il se calme. Mais l’heure de notre rendez-vous avec Cromwell approchait.
    « Venez, Joseph, nous vous accompagnerons jusqu’à votre logis. Ensuite, nous prendrons un bateau, car nous devons nous rendre à Whitehall. Peut-être pourrons-nous laisser nos chevaux chez vous ? »
    Il leva vers nous des yeux où brillait une faible lueur d’intérêt. « Cette autre affaire qui vous occupe, c’est donc une affaire d’État ?
    — Oui. Mais j’obtiendrai des éclaircissements de votre famille, Joseph, je vous le promets.
    — Comptez sur lui », renchérit Barak d’un ton encourageant.
    Joseph me dévisagea. « Voulez-vous que je vous accompagne ?
    — Non. J’irai seul, ou avec Barak. »
    Joseph me regarda avec inquiétude. « Pour l’amour du ciel, prenez garde. »

40
    L a circulation sur la T amise était si dense que nous eûmes un certain mal à trouver un bateau. Barak jura copieusement, craignant que nous ne soyons en retard. Un bachot arriva enfin, qui nous emmena en aval avec une brise qui faisait claquer ma robe et poussait la voile à bonne allure. Je songeai à Elizabeth, à la détresse terrible où elle se trouvait, à sa haine pour un Dieu cruel devant lequel elle entendait s’immoler. Je frémis en imaginant les ténèbres qui devaient envahir son esprit, même si je croyais les comprendre. Barak, assis à l’autre bout de bateau, avait la tête rentrée dans les épaules, la mine sombre. Peut-être comprenait-il, lui aussi. Mais devant le passeur il n’était pas question de dire un mot de tout cela.
    Enfin, le bateau heurta les degrés du débarcadère à Westminster. Barak sauta à terre et nous montâmes à la hâte, puis traversâmes au pas de course la grande galerie. Nous nous arrêtâmes quelques instants pour reprendre notre souffle devant le grand tableau mural où le roi semblait nous fixer en sourcillant ; enfin, nous nous rendîmes dans le bureau de Cromwell.
    Grey était à sa table de travail, en train d’étudier un projet de loi pour le Parlement, et il lisait le parchemin ligne à ligne à l’aide d’une règle. Il leva les yeux et me jeta un regard sévère. « Messire Shardlake, je commençais à craindre que vous ne soyez en retard. Le comte n’est pas… d’humeur très conciliante aujourd’hui.
    — Pardonnez-moi, mais la Tamise était encombrée.
    — Suivez-moi. Mon maître envoie à ce Parlement tant de projets de loi qu’il ne les rédige pas avec sa rigueur habituelle. Il est très préoccupé », dit-il en secouant la tête. Puis il frappa à la porte de Cromwell et nous fit entrer.
    Debout près de la fenêtre, le comte contemplait Whitehall. Il tourna vers nous un visage maussade et crispé. Il était magnifiquement vêtu d’une robe de soie rouge comme seuls les barons ont le droit d’en porter, bordée de zibeline. L’étoile de l’ordre de la Jarretière pendait à un ruban de couleur sur sa poitrine.
    « Eh bien ! dit-il d’un ton sec, vous voilà donc. » Il se dirigea vers son bureau où s’entassaient des monceaux de papiers. Il avait dû jeter sa plume dans un accès de colère, car elle gisait dans une petite flaque d’encre, au milieu des papiers. Il se laissa tomber dans son fauteuil et nous regarda fixement, le visage dur.
    « Eh bien, Matthew, vous m’avez fait faire un pas de clerc.
    — Pardon, Votre Grâce ?
    — Avec sir Richard Rich, fit-il d’un ton cassant. Je l’ai mandé ici samedi soir. » Il croisa les doigts et abattit les poings sur la table avec un bruit sec. « La raison pour laquelle Rich vous a adressé des remarques menaçantes et celle pour laquelle Bealknap a estimé ne rien avoir à craindre de vous n’ont rien à voir avec le feu grégeois.
    — Qu’en est-il alors ?
    — Vous avez représenté le Conseil de la Cité dans un procès où se posait la question de savoir si une propriété monastique tombait ou non sous le coup des lois de la Cité.
    — C’est vrai. Ce procès est transféré devant la chancellerie.
    — Non, dit-il d’un ton las. Il n’en est pas question. Quantité de personnages influents ont acheté des propriétés monastiques, Matthew. Ces maudits endroits étaient nombreux dans la Cité avant que nous ne prononcions la Dissolution. Hélas, il y en a tant sur le marché maintenant que la valeur des terrains a baissé. J’ai reçu des plaintes de nombreux

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