Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
Vom Netzwerk:
à nouveau. Par-dessus son épaule, Wright regarda la distance vertigineuse qui le séparait du sol. Il passa la langue sur ses lèvres, déglutit et reprit la parole d’une voix que la peur rendait plus aiguë.
    « J’ai toujours dit que jamais je ne me balancerais au bout d’une corde ! Et en voyant l’homme dans le cimetière tout à l’heure, je me le suis juré une nouvelle fois.
    — Hein ? » Barak s’immobilisa, l’épée brandie. Je devinai l’intention de Wright avant Barak, et essayai de lui saisir le bras, en vain car il avait déjà bondi de l’autre côté du parapet. Je crois qu’il aurait sauté de toute façon, mais, en se retournant pour me regarder, il perdit l’équilibre et tomba. Il disparut dans le grand vide sans même pousser un cri. Quand nous arrivâmes au parapet, Wright avait déjà touché le sol. Il s’était écrasé trente mètres en dessous, et on voyait la tache blanche de son visage se détacher sur son corps, d’où le sang s’échappait, s’étalant lentement dans la cour.

43
    B arak me tira par la manche pour me faire quitter le toit et me poussa dans l’escalier. À l’entrée de la cathédrale, des gens qui étaient déjà descendus parlaient avec agitation aux marguilliers. Tandis que nous approchions de la porte, nous entendîmes une femme crier que quelqu’un était tombé du toit. Les marguilliers levèrent les mains et leur demandèrent de parler plus bas, redoutant avant tout de troubler le sermon de l’archevêque. Nous sortîmes sans nous faire remarquer.
    Barak me conduisit au trot dans un dédale de ruelles du côté de Forster Lane. Enfin, il interrompit sa course près de la halle des orfèvres et s’adossa au mur du magasin d’un fabricant de chandelles, à la porte duquel un apprenti au visage lunaire criait sans relâche : « Chandelles de suif, un farthing 14 la douzaine ! » Je m’effondrai contre le mur, hors d’haleine.
    « Ôtez donc votre robe, dit Barak. On aura donné le signalement d’un avocat. »
    Je m’exécutai, la roulai en boule et la mis sous mon bras. Barak tira sur son pourpoint et regarda autour de nous. L’apprenti nous ignorait, continuant à faire la réclame des marchandises de son maître, et rejetant de temps à autre en arrière une mèche de cheveux collés par la sueur.
    « Venez, m’ordonna Barak. Ils ne vont pas tarder à donner l’alarme. L’évêque Bonner sera furieux. Pensez donc, un combat à l’épée dans la cathédrale, pendant que l’archevêque en personne était en train de prêcher.
    — Il y aura une chasse à l’homme. Et je serai identifié sansmal : un avocat bossu, cela ne s’oublie pas facilement. On cherchera aussi un jeune homme chauve. Tenez. » Je lui donnai ma toque ; son bonnet était tombé pendant la bagarre dans la cathédrale.
    « Merci. J’ai le sceau du comte, mais le temps nous manque pour discuter avec des constables bornés. »
    Je m’essuyai le front. Au-dessus des toits, j’apercevais les étages supérieurs de l’hôtel de ville. Se pouvait-il que, seulement quinze jours auparavant, j’eusse encore été un avocat respecté ? Avant que Joseph ne surgisse et ne m’engage dans cette aventure effroyable et échevelée…
    « Et maintenant, que faisons-nous ? demandai-je d’une voix lasse. Nous mettons le cap sur l’entrepôt ?
    — Oui, nous devrions y aller incontinent. » Barak m’observa. « Tudieu, vous êtes en nage !
    — Je ne suis pas habitué à me battre pour sauver ma peau, Barak. Et il fait si lourd. » Je regardai le ciel. Il était entièrement couvert et les nuages s’épaississaient, de plus en plus sombres, comme une armée se préparant à donner l’assaut.
    « Nous passerons par les allées. Venez. »
    Je le suivis dans des venelles où nous étions au coude à coude avec hommes et bêtes, et où nos pieds s’enfonçaient dans des caniveaux puants. Pour gagner le fleuve, il fallait traverser Cheapside et, pendant que nous prenions au sud, quelqu’un m’appela par mon nom. Je me retournai, redoutant de me trouver nez à nez avec un constable, mais ce n’était que Jephson, un conseiller de la Cité que je connaissais, qui se dirigeait vers nous à grands pas, son assistant sur les talons. Je me hâtai de le saluer.
    « Messire Shardlake, je vous souhaite le bonjour. Il faut que je vous parle. » Son visage rond et rasé de frais était grave. Je pestai intérieurement. S’il avait entendu les nouvelles de St Paul, il risquait

Weitere Kostenlose Bücher