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Les mannequins nus

Les mannequins nus

Titel: Les mannequins nus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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perfectionnement prodigués par les instructeurs de Ravensbrück et Ravensbrück – ce qui est logique – expédiait à Auschwitz ses mauvais numéros.
    — Contrairement (106) aux S.S. hommes qui appartenaient dans une notable proportion, à la catégorie internationale des mal foutus, jambes en manche de veste, dos ronds, etc. les Aufseherinnen étaient, en général, de grosses filles bien portantes et solides.
    Elles n’étaient pas toutes des volontaires ; il y avait aussi parmi elles des requises, astreintes par la loi au travail et qui n’avaient pas choisi celui-là. Beaucoup n’avaient jamais été inscrites au parti nazi. J’ai eu des renseignements d’identité assez complets sur environ deux cents d’entre elles et me suis spécialement intéressée aux différentes classes sociales où elles étaient recrutées. Elles provenaient de toutes les classes de la société allemande. J’ai rencontré en particulier une contrôleuse de tramways, une ouvrière d’usine, une chanteuse d’opéra, une nurse diplômée (!), une coiffeuse, une paysanne, une jeune fille de la bourgeoisie n’ayant jamais travaillé, une institutrice en retraite, une écuyère de cirque, une ancienne gardienne de prison, une veuve d’officier, etc. Les débutantes avaient l’air généralement effarées de leur premier contact avec le camp, et elles mettaient quelque temps avant d’atteindre le même niveau de cruauté, de débauche que les anciennes. C’était pour certaines d’entre nous un petit jeu assez amer, de chronométrer le temps que mettait une nouvelle Aufseherin avant d’atteindre ses chevrons de brutalité. Pour une petite Aufseherin de vingt ans qui, le jour de son arrivée, était tellement peu au fait des bonnes manières du camp qu’elle disait « pardon » lorsqu’elle passait devant une prisonnière et qui avait été visiblement effrayée par les premières brutalités qu’elle avait vues, il a fallu exactement quatre jours avant qu’elle prit ce même ton et ces mêmes procédés qui étaient cependant, d’une façon tout à fait nette, nouveaux pour elle. Cette petite était sans doute particulièrement bien douée pour le registre spécial que nous étudions en ce moment. Pour les autres, on peut dire que huit à quinze jours, un mois au plus, représentaient une moyenne très normale d’adaptation. J’ai cependant entendu parler d’une très jeune Aufseherin qui n’avait pu s’habituer ni à la débauche de ses collègues ni à leur brutalité. « Elle pleurait beaucoup », m’ont dit les prisonnières qui l’ont connue, « et nous ne savons comment elle a fini par partir ». Je n’ai jamais entendu parler d’un autre cas de ce genre, et celle-ci avait déjà quitté le camp avant mon arrivée. Il y avait assez souvent des Aufseherinnen qui étaient condamnées à des peines diverses et même devenaient des prisonnières, mais c’était ou pour vol ou pour relations spéciales notoires avec des détenus de l’un ou de l’autre sexe.
    *
*   *
    Irma Grese a gravi, le 12 décembre 1945, les sept marches de bois de l’échafaud de Hamelin. Elle avait 21 ans. Albert Pierrepoint, le bourreau, un géant britannique qui avait été nommé le matin même « par dérogation » officier, était à peine plus âgé qu’elle. Irma Grese baisa le crucifix que lui tendait l’aumônier de la Division et elle ferma les yeux. Albert Pierrepoint tremblait. Il dit « pardon », se retourna vers le nœud coulant posé sur la rambarde de la plate-forme et le saisit à deux mains. Irma Grese, lorsque la trappe s’ouvrit à 10 h 3, n’avait pas rouvert les yeux.
    Irma Grese était arrivée au Centre de formation de Ravensbrück le jour de ses 18 ans. Frêle, timide, effacée, elle était née dans une famille d’ouvriers agricoles de Mecklembourg et cette terre grasse pesait à ses sabots. À 16 ans elle quitte la ferme, se brouille avec son père qui lui reproche ses amitiés national-socialistes et se retrouve stagiaire infirmière à Hohenlychen, dans cette clinique où le professeur Karl Gebhardt poursuivait ses expériences médicales humaines commencées à Ravensbrück. Irma Grese ne sera jamais infirmière, c’est Gebhardt qui le lui annonce :
    — Mais si vous voulez contacter un de mes amis de Ravensbrück…
    Irma Grese prend rendez-vous.
    — Venez nous voir dans six mois, lorsque vous aurez 18 ans. Je vous inscris.
    En attendant, Irma Grese travaille dans

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