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Les masques de Saint-Marc

Les masques de Saint-Marc

Titel: Les masques de Saint-Marc Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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de soi. Même si je suis incapable d’y répondre.
    — Qu’allons-nous faire maintenant ?
    — Je ne crois pas que ce soit à nous de nous creuser la tête.
    — À qui d’autre ?
    — À la Kommandantur ! Nous aurions dû leur confier cette affaire aussitôt après avoir appris par M. Pescemorte que le cercueil contenait de la poudre explosive.
    — Vous comptez en parler à Spaur ?
    — Dès que possible. De votre côté, allez au commissariat rédiger un rapport. Si Spaur confie l’enquête à Toggenburg, il lui faudra un document écrit. Joignez-y le rapport d’autopsie.
    — Dois-je signaler que, selon vous, le meurtrier fait exprès de commettre des erreurs ?
    Tron secoua la tête.
    — Non, aucune déduction. Rien que des faits.
    — Ces faits n’ont aucun sens.
    — Raison de plus pour nous débarrasser de cette affaire !
    — Et le collier de l’impératrice ? insista Bossi.
    — Il n’y a que Königsegg, vous et moi qui sommes au courant. Or ce vol n’a rien à voir avec l’attentat. Il suffit de prétendre que l’intendant en chef avait un rendez-vous avec Ziani sur lequel il ne nous a donné aucune précision. Le rapport d’autopsie prouve qu’on ne peut pas le tenir pour coupable.
    — Savez-vous où se trouve le commandant aujourd’hui ?
    — Au Danieli . J’y vais de ce pas.
    L’inspecteur fit une grimace déçue.
    — Dommage, quand même.
    — Qu’est-ce qui est dommage ?
    — Que nous ne puissions pas poursuivre l’enquête. Sauver la vie de l’empereur est sans doute bon pour l’avancement.
    Il réfléchit une fraction de seconde.
    — Comment s’appelle ce sous-lieutenant anobli pour avoir protégé François-Joseph à la bataille de Solferino ?
    — Il portait un nom slovaque. Maintenant, il se nomme baron von Trotta.
    — Est-ce que Turin reconnaît les particules autrichiennes ?
    — Bien entendu !
    — Donc, après un changement politique, on garderait son titre de noblesse ?
    Tron éclata de rire.
    — Vous venez à peine de passer inspecteur, Bossi ! On ne peut pas vous anoblir aussi vite. Après un changement politique – comme vous dites si joliment –, vous pourrez toujours obtenir un titre des Piémontais. Eux aussi ont un monarque. Un titre accordé par Turin ne fait pas moins d’effet qu’un titre provenant de la Hofburg.
    — Je me demande ce que Turin dirait d’un attentat contre la personne de l’empereur.
    — On serait horrifié, assura le commissaire.
    — Donc, là aussi, on regarderait d’un bon œil celui qui a sauvé la vie de François-Joseph.
    Tron approuva.
    — Sans aucun doute. Mais je ne vois pas en quoi cela vous concerne. Nous n’avons plus rien à voir avec cette affaire.

29
    Jean-Baptiste von Spaur se tenait à la fenêtre de sa suite au Danieli et observait la riva degli Schiavoni d’un air renfrogné. Le soleil inespéré avait attiré sur le quai des cohortes de promeneurs qui discutaient en petits groupes, achetaient de la friture de poissons et des marrons chauds à des marchands ambulants ou admiraient la longue file de voiliers qui s’étirait jusqu’au ponte dei Greci. Le ciel était bleu et sans nuages. De l’autre côté de l’eau, l’île de San Giorgio se dessinait avec une netteté militaire. Comment s’appelait l’architecte qui avait construit cette église déjà ? Palli… Pallo… Palludino ? Quelque chose dans le genre. Le détail n’avait pas franchement d’importance, mais cela faisait toujours bien de laisser tomber un de ces noms italiens au milieu d’une conversation.
    En temps normal, la vue l’aurait rempli de joie. Ce jour-là au contraire, elle lui rappelait que, bientôt, la frégate à vapeur de François-Joseph, le Jupiter , traverserait le bassin de Saint-Marc, saluée par deux douzaines de salves. Et que lui, le baron Jean-Baptiste von Spaur, serait contraint de faire contre mauvaise fortune bon cœur.
    La lettre du souverain en réponse à sa requête était arrivée au commissariat l’après-midi précédent. Un lieutenant du bureau de Toggenburg était venu lui remettre l’enveloppe en personne. Il lui avait fait signer deux formulaires différents pour attester la réception du courrier et s’était retiré avec un salut un peu trop appuyé. Peut-être se moquait-il de lui ? Après avoir lu la lettre, le commandant de la police vénitienne s’était demandé si le lieutenant ne connaissait pas le contenu du document et n’avait pas éclaté de rire dès qu’il s’était retrouvé

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