Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les masques de Saint-Marc

Les masques de Saint-Marc

Titel: Les masques de Saint-Marc Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
Vom Netzwerk:
douter du trésor qu’il renfermait.
    Douze coups retentirent au-dessus de la place Saint-Marc. Au même instant, l’empereur perçut des pas dans la pièce voisine. On frappa, un battant de porte s’ouvrit en grinçant, le bras d’un laquais fit une brève apparition. Puis Crenneville entra et s’inclina devant le souverain.
    — Félicitations, Majesté.
    — À quel sujet ?
    François-Joseph écarquilla les yeux. La raison coulait pourtant de source. Crenneville esquissa une nouvelle courbette.
    — Sa Majesté a sans doute lu le rapport du commandant de police.
    Il hocha la tête.
    — Bien entendu ! L’hydre est décapitée, le dragon terrassé. Un beau succès, Crenneville !
    Le comte, qui savait ce qu’on attendait de lui, leva la main dans un geste de dénégation.
    — Que Sa Majesté se félicite elle-même ! L’ensemble de ce plan repose en vérité sur une inspiration heureuse de Son Altesse royale.
    — C’est moi qui suis à l’origine de ce plan, vous avez raison de le rappeler, dit François-Joseph avec un regard bienveillant à l’intention de son officier d’ordonnance. Néanmoins, sans l’aide des subalternes, les inspirations les plus heureuses demeurent lettre morte.
    Crenneville, que ce compliment ambigu ramenait au rang de simple subalterne, hocha la tête avec flegme.
    — Cette humiliation est un coup dur pour Toggenburg, reprit l’empereur. D’autant que nous avions dispensé la garde civile d’assurer ma sécurité.
    — Le commandant de place n’interprétera sans doute pas cet incident comme un échec personnel, répliqua le comte. Il n’y peut rien, hélas, puisque…
    Il s’interrompit avec un sourire résigné. Le souverain termina la phrase à sa place.
    — … puisqu’il manque à l’armée les moyens nécessaires !
    Crenneville inclina la tête dans un geste d’approbation.
    — Les événements de jeudi renforceront encore cette impression, ajouta-t-il.
    François-Joseph parut se concentrer. Au bout d’un instant, il demanda :
    — Que diriez-vous d’inviter au gala ce commissaire qui a mené l’enquête ? En fin de compte, je lui dois la vie.
    — Avec le commandant de police ?
    L’empereur approuva.
    — Ils n’ont qu’à venir tous les deux. Cela renforcera les animosités entre la Kommandantur et la police vénitienne. De plus, on pourrait interpréter leur présence comme une subtile humiliation de l’armée.
    — Sa Majesté pense que le Parlement pourrait décider par simple…
    François-Joseph était très fier de l’idée qui venait de lui traverser l’esprit à l’improviste.
    — Ne sous-estimez pas l’importance de la pitié, Crenneville ! Les civils, en particulier, éprouvent très souvent ce sentiment. Quoi qu’il en soit, poursuivit-il, il me paraît judicieux d’accorder un entretien bienveillant à ce commissaire. L’impératrice fait grand cas de lui. Il lui a rendu service il y a quelques années, ainsi qu’à mon frère Maximilien d’ailleurs.
    — Dois-je lui envoyer une invitation ?
    L’empereur hocha la tête.
    — Parlez-en à Königsegg. C’est de son ressort.
    Puis il fixa le comte.
    — Où en sont les préparatifs pour après-demain ?
    — Je crois qu’il n’y a aucune raison de s’inquiéter, Majesté.
    L’empereur trouva le verbe croire déplacé dans ce contexte.
    — Que voulez-vous dire par « je crois » ?
    Crenneville toussota.
    — J’en suis sûr, Majesté.
    — Le colonel Hölzl a-t-il pris contact avec notre homme aujourd’hui ?
    Le comte secoua la tête.
    — Non, leur dernier entretien remonte à hier après-midi. Le colonel lui a remis l’emploi du temps de jeudi.
    — Donc, le plan reste inchangé.
    — Oui. Le malefico sonnera à quatre heures. C’est le signal. Dix secondes plus tard, il tirera trois coups de feu par la lucarne.
    L’empereur esquissa soudain un sourire malicieux.
    — Est-ce vous qui avez suggéré de recourir au malefico ?
    — Non, c’est une idée du colonel Hölzl, répondit Crenneville d’un ton las.
    — Savez-vous à quoi cette cloche servait autrefois ?
    Le sourire de François-Joseph s’était encore accru. Son officier d’ordonnance fit non de la tête.
    — Elle annonçait une exécution !

44
    — Quelle absurdité !
    Tron retira son pince-nez, repoussa sa tasse de chocolat et replia le journal avec rage.
    — Quoi donc ?
    Comme tous les matins, la princesse, déjà vêtue en femme d’affaires – une robe de promenade en serge grise, fermée au col par

Weitere Kostenlose Bücher