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Les murailles de feu

Les murailles de feu

Titel: Les murailles de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Pressfield
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ce fut en le poussant à pratiquer sa discipline avec encore plus de rigueur. Toutefois, son zèle devenait excessif quand il l’imposait à d’autres moins doués que lui.
    Pour sa part, Dienekès avait été nommé chevalier à vingt-six ans et, par la suite, il avait respectueusement décliné tous autres honneurs. Il disait préférer l’obscurité d’un commandant de peloton, parce qu’il se trouvait plus à l’aise avec les sans-grade. Il s’estimait plus utile quand il commandait directement un nombre d’hommes restreint.
    J’ajouterai pour ma part que les dons de Dienekès résidaient encore plus dans sa vocation de maître que dans ses talents de soldat et d’officier. Comme tous les professeurs nés, il était d’abord un étudiant. Il étudiait la peur et son contraire. Mais revenons-en à Antirhion.
    Sur le retour vers Lacédémone, je fus puni pour avoir suivi Alexandros dans sa foucade. Je fus détaché de son service et contraint de marcher à l’arrière, dans la poussière, en compagnie des animaux et de mon camarade semi-hilote Dekton. Ce dernier avait été coiffé d’un surnom à Antirhion : le Coq. Ç’avait été lui, en effet, qui avait tendu à Léonidas le coq sacrificiel de la victoire, à demi-étranglé par lui-même, d’ailleurs, tant il était ému par la bataille et frustré de n’y avoir pas participé. Le surnom demeura. Dekton était bien un coq, animé d’une agressivité de paysan et prêt à en découdre avec n’importe qui, fût-il trois fois plus fort que lui. Toute l’armée se prit à le considérer comme une mascotte.
    Toutefois, ce surnom excita encore plus l’agressivité de Dekton ; il le trouva condescendant et se prit d’aversion pour les maîtres qui l’en avaient affublé et pour son propre rang dans l’armée. Il me traita de crétin parce que je suivais cette armée.
    — Tu aurais dû fuir, chuchota-t-il, tandis que nous avalions la poussière. Tu mérites tous les coups du monde, pas pour ce qu’ils te reprochent, mais pour n’avoir pas noyé ce chanteur d’hymnes Alexandros quand tu en avais l’occasion. Tu aurais ensuite filé au temple de Poséidon.
    Il voulait parler du sanctuaire de Tainaron, où les fuyards pouvaient demander l’asile. Et il se gaussa de ma loyauté à l’égard des Spartiates.
    J’avais été placé sous les ordres de ce garçon peu après que le destin m’eut conduit à Lacédémone, deux ans auparavant ; nous avions douze ans tous les deux. Sa famille travaillait sur les propriétés d’Olympias, le père d’Alexandros, qui était lié à Dienekès par sa femme Aretê. Dekton, demi-hilote, était de surcroît un bâtard, disait-on ; son père naturel, Idotychide, dont la pierre tombale, sur la Voie Amycléenne, en face des réfectoires, les syssities, rappelait qu’il était mort à Mantinée.
    Cette origine à demi Spartiate ne changeait guère la condition de Dekton. Hilote il était, hilote il restait. Pis, les jeunes de son âge et encore plus les pairs le considéraient d’un œil soupçonneux, et cela d’autant plus que c’était un athlète exceptionnel. À quatorze ans il était bâti comme un adulte et presque aussi fort. Un jour ou l’autre, il allait falloir s’occuper de lui, et il le savait.
    J’étais à Lacédémone depuis quelque six mois quand un garçon sauvage dévala la colline et m’assigna les plus humbles travaux de ferme plutôt que de me tuer, ce qui eût causé sa pollution rituelle. Je fus un si piètre aide-fermier que mes maîtres hilotes s’en plaignirent à leur propriétaire, Olympias. Ce dernier eut pitié de moi, peut-être parce que j’étais né libre ou peut-être encore parce que j’étais venu en ville non comme captif, mais de mon plein gré. Je fus commis à la garde des chèvres et de leurs chevreaux.
    Je devais donc être berger des animaux sacrificiels et m’occuper des bêtes destinées aux sacrifices du matin et du soir et je suivrais l’armée aux manœuvres. Le chef de ces bergers était Dekton. Il me réserva ses sarcasmes les plus cinglants quand je lui avouai imprudemment que j’avais suivi le conseil d’Apollon aux flèches qui vont loin. Dekton trouva cela hilarant. Pensais-je qu’un dieu de l’Olympe, fils de Zeus le Maître du Tonnerre, protecteur de Sparte et d’Amyclées, gardien de Delphes et de Délos et d’on ne savait combien d’autres cités, perdrait son temps à bavarder dans la neige avec un manant sans feu ni lieu tel

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