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Les murailles de feu

Les murailles de feu

Titel: Les murailles de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Pressfield
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plus est l’humour et la riposte à l’injure avec une plaisanterie, aussi grossière fût-elle. Un esprit qui peut garder sa légèreté sous le feu de l’attaque ne se désintégrera pas au combat.
    Mais Alexandros n’était pas doué pour le mot d’esprit. Il ne pouvait que répondre de sa voix claire et dans son effrayante candeur ; je l’observais de mon poste de travail à la gauche de l’entrée du réfectoire, sous l’inscription :

    (« Hors d’ici, rien »), ce qui signifiait qu’on ne pouvait répéter ailleurs ce qui y avait été dit.
    C’était une forme de courage élevé que celui avec lequel Alexandros affrontait les pairs, sans plaisanter ni mentir. Un garçon pouvait à n’importe quel moment de ces interrogatoires demander une pause. Les lois de Lycurgue lui accordaient ce droit. Mais l’orgueil interdit à Alexandros de s’en prévaloir, et ils le savaient.
    — Tu voulais voir la guerre, reprit Polynice. Comment avais-tu imaginé que ce serait ?
    Alexandros était requis de répondre avec une parfaite brièveté, à la Spartiate. Devant le carnage, ses yeux avaient été frappés d’horreur et son cœur d’affliction, lui dit-on ; mais alors, à quoi croyait-il que servait une lance ? Un bouclier ? Une épée ? Ces questions et d’autres lui furent posées sans cruauté ni sarcasme, ce qui eût été facile à endurer, mais de manière froide et rationnelle, exigeant une réponse concise. Il fut prié de décrire les blessures que pouvait causer une lance et le type de mort qui s’ensuivrait. Une attaque de haut devait-elle viser la gorge ou la poitrine ? Si le tendon de l’ennemi était sectionné, fallait-il s’arrêter pour l’achever ou bien aller de l’avant ? Si l’on enfonçait une lance dans le pubis, au-dessus des testicules, fallait-il la retirer tout droit ou bien prolonger l’estocade vers le haut, pour éviscérer l’homme ? Alexandros rougit, sa voix trembla et se brisa.
    — Veux-tu que nous nous interrompions, mon garçon ? Cette instruction est-elle trop rude pour toi ? Réponds de manière brève. Peux-tu imaginer un monde où la guerre n’existe pas ? Peux-tu espérer de la clémence d’un ennemi ? Décris les conditions dans lesquelles Lacédémone se trouverait sans armée pour la défendre. Qu’est-ce qui vaut mieux, la victoire ou la défaite ? Gouverner ou être gouverné ? Faire une veuve de l’épouse de l’ennemi ou bien de sa propre femme ? Quelle est la suprême qualité d’un homme ? Pourquoi ? Qui admires-tu le plus dans toute la cité ? Et pourquoi ? Définis le mot « miséricorde ». Définis le mot « compassion ». Sont-ce là des vertus pour le temps de guerre ou le temps de paix ? Sont-ce des vertus masculines ou féminines ? Et sont-ce bien des vertus ?
    De tous les pairs qui harcelaient Alexandros ce soir-là, Polynice n’apparaissait guère comme le plus acharné ni le plus sévère. Ce n’était pas lui qui menaitl’ arosis et ses questions n’étaient ni franchement cruelles, ni malicieuses. Il ne lui laissait tout simplement pas de répit. Dans les voix des autres, aussi pressantes que fussent leurs questions, résonnait tacitement l’inclusion : Alexandros était l’un des leurs et ce qu’ils faisaient ce soir-là et feraient d’autres soirs ne visait pas à le décourager ni à l’écraser comme un esclave, mais à l’endurcir, à fortifier sa volonté, à le rendre plus digne d’être un jour appelé guerrier, comme eux, et à assumer son rang de pair et de Spartiate.
    Mais le harcèlement de Polynice était différent ; il avait quelque chose de personnel. Il détestait le garçon, bien qu’il fût impossible de savoir pourquoi. Ce qui rendait la scène encore plus pénible à observer autant qu’à subir était la suprême beauté physique de Polynice.
    À tous égards, corps et visage, ce chevalier était fait comme un dieu. Quand il était nu au gymnase, parmi des foules d’autres jeunes gens et guerriers bénis des dieux pour leur séduction et leur forme, Polynice se distinguait d’emblée par la symétrie et la perfection de son physique. Quand il était vêtu de sa tunique blanche, à l’Assemblée, il resplendissait comme Adonis. Et quand il était équipé pour la guerre, avec son bouclier poli, sa cape écarlate sur les épaules et son casque à brosse de chevalier rabattu sur le front, c’était l’incomparable Achille.
    Même les guerriers endurcis qui se

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