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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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tout !
    Ogier repoussa la porte de leur chambre. Ils étaient seuls, maintenant. Prêts à quoi ? S’aimer ou se déchirer ?
    — Je ne veux pas que tu t’en ailles.
    Blandine se coucha tout habillée. Elle bâilla. Elle luttait contre le sommeil mais aussi contre la déconvenue qui la possédait depuis l’apparition de Courvaudon et de ses hommes. Ogier n’osait s’approcher ni du lit ni de la fenêtre.
    « Ils ont couvert tant de lieues pour moi !… Le roi veut-il m’opposer au champion du roi Édouard ? »
    Bah ! Il verrait. Pour le moment, il devait réussir ses adieux.
    — Je voudrais pouvoir demeurer, bien que…
    En s’aidant du lumignon de l’esconse, il alluma les mèches d’un chandelier à quatre branches posé sur le petit bahut, près du lit. La clarté aggrava la pâleur de Blandine.
    —  Bien que… Que veux-tu dire ?
    — Quand je veux être très près de toi, tu me repousses. J’ai toujours pensé qu’un jour tu repousserais ma main en criant au sacrilège.
    — Tu n’as qu’à t’y prendre mieux !
    — Allons donc !… Tu m’intentes un procès désagréable et injuste !
    Car rien n’avait varié dans la douceur de ses approches. Considérait-elle celles-ci comme de froides et habiles manœuvres destinées non pas à l’aimer mais à la vaincre ? Ah ! certes, maintenant, elle arrivait à terme, mais il n’en avait pas toujours été ainsi. Naguère, à Chauvigny, elle s’était donnée sans honte, avec avidité, sans rien trouver d’impur dans leurs enlacements.
    — Il n’est plus temps d’instruire nos procès. Car tu ne penses pas, j’espère, que je suis seul coupable de notre division !
    — Voilà un bien grand mot !
    — Il me paraît petit opposé à divorce !… Or, sache-le, une fois pour toutes : il me déplaît d’aller servir un roi qui ne sait que perdre ses batailles. Le fait que j’accomplisse sa volonté me met dans mon tort à tes yeux… Voilà que tu te réveilles pour t’apercevoir, soudain, que je suis ton mari et que je t’appartiens sans que tu m’appartiennes !… C’est trop tard… Tu te regimbes, après m’avoir mal aimé, plus que d’autres dames aimant corps et âme leur époux, et qui, elles, accepteront dignement la même séparation que la nôtre, en véritables chevaleresses… Je crois que tu me détestes mais refuses d’accepter cette évidence pour maintenir en des limites supportables ton remords de m’avoir amouré quelques semaines. D’ailleurs, nous te déplaisons tous : parents, serviteurs, soudoyers, bien que nous n’ayons toujours voulu que ton bonheur, moi tout le premier… Et j’oubliais les chiens…
    Elle avait fermé les yeux pour se soustraire aux regards de ce visage penché sur le sien, si près que leurs nez venaient de se toucher. Ses traits, sa peau, ses paupières demeuraient tellement immobiles qu’on eût dit une morte, et cette tête figée dans la pureté de sa beauté, dans le désordre de ses cheveux qu’elle ne tressait plus depuis deux semaines, n’exprimait rien.
    — Ton épouse, dit-elle enfin, c’est la guerre… Tu ne penses qu’à elle et ne t’emploie qu’à y briller !
    Elle exagérait, mais il fallait bien qu’elle tentât de grever cette sérénité qu’elle sentait en lui et qui, sans doute, la mécontentait plus que tout, en l’occurrence.
    — Heureusement que je me suis employé à frapper d’estoc et de taille, à tenir lance, masse et fléau d’armes ! Si je n’avais été préparé avec soin, et si je n’avais eu conscience de ma force, je ne t’aurais pas sauvée des Anglais !
    — Tu t’en glorifies trop. Une belle et bonne action rappelée moult fois par celui qui l’a commise à celui ou à celle qui en a profité finit par perdre ses mérites !
    — Soit !… Tu peux mettre à profit mon absence pour revenir en Poitou.
    — Mon devoir est de demeurer céans et d’y élever notre enfant.
    — Un devoir qui accable est une servitude ! Demeure à Gratot si tu y tiens, mais tu m’en détesteras davantage… car tout, alors, céans, te parlera de moi !
    — Je t’aime.
    Elle fermait toujours les yeux ; il fut tenté de lui montrer son poing. Allant et venant près du lit, il grommela d’une voix qui lui parut inconnue, chargée de détresse et de malerage :
    — Tu m’as admiré… Tu t’es montrée jalouse du présent et du passé…
    Il n’osa dire : « Je t’ai aimée », ce qui eût signifié qu’il

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