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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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partir dans trois ou quatre jours : elle sera presque guérie. D’ailleurs, si quelque faiblesse la prenait, elle pourrait s’allonger dans la carriole.
    Ogier qui se penchait pour soulever Blandine, se releva, ébahi :
    — La carriole ?
    — Hé oui !… Pour que tu mènes à bien le service promis, il te faut un chariot. J’en possède un. Rassure-toi, il est petit et ne sera pas outrément chargé.
    — Chargé de quoi, messire ?… Où dois-je le mener ?
    — Tu le sauras… Je sais que c’est déchoir, pour un chevalier, de monter dans une charrette et plus encore d’en mener le cheval… Tu oublieras qui tu es… En attendant que je te les confie, nous quitterons Chauvigny demain pour y revenir après-demain.
    — Si longtemps !
    — Hé oui : je vais te priver de ton épouse… Vous vous retrouverez avec d’autant plus de chaleur !… Entre-temps, Odile veillera sur elle.
    Un sourire apparut dans la barbe blanche. Ogier s’abstint d’exprimer le courroux dont il était saturé.
    — Tu n’oses pas me demander où nous irons. Tu fais bien : tu verras les lieux en même temps que moi… Trop occupés à dévaster Poitiers, les Anglais n’y viendront pas encore. Nous partirons à l’aube… Seuls. Tout ce que je peux te dire encore, c’est qu’il s’agit pour moi d’un dernier pèlerinage.
    Cette conclusion affermit le désir d’Ogier d’en finir avec une promesse dont il avait parfois pressenti les difficultés sans penser qu’elles excéderaient ses forces et sa volonté. « Une carriole ?… Qu’y aura-t-il dedans ? Sera-ce gros ? Pesant ? Où devrai-je me rendre et pourquoi ? » Ses hommes pourraient-ils l’accompagner ? À quoi bon poser ces questions au mire ! Regardant Blandine endormie par le puissant narcotique, il soupira d’impuissance et de pitié. Quelles étranges noces ! Et la fade nuit qui se préparait !
    — Soulève ton épouse et suis-moi.
    Ogier obtempéra, sentit son bras le cuire et prit garde de ne pas heurter la jouvencelle au chambranle de la porte. Devant lui, appuyé sur son os de narval, le mire allait d’un pas plus affermi. Il dit, sans se détourner :
    — Tu préviendras tes soudoyers de demeurer dans la cité et de se tenir quiets là où je les ai logés. Il serait malséant qu’il advienne quelque chose de mauvais en notre absence, à cause d’une buverie ou de je ne sais trop quoi… Il faut éviter d’attirer sur toi plus encore que sur moi l’attention des Chauvinois… Et surtout celle des chevaliers teutoniques.
    — Ils sont encore ici depuis les Pâques dernières ?
    — Oui… Je te dirai pourquoi ils sont restés.

VI
    — Est-ce loin encore ?
    Depuis une lieue, peut-être davantage, Ogier différait cette demande. Benoît Sirvin y parut insensible. Au lieu d’une admonition sévère, il rit, fit une pause et, la voix sentencieuse :
    — La patience, Argouges, ne saurait être chez toi qualité dominante. Le soleil vient juste de s’embraser ; quand il sera sur son déclin, nous parviendrons où je te mène. Je t’ai demandé deux jours pleins… Demain soir, tu seras rentré à Chauvigny.
    Le mire montait Plantamor, le cheval de Bazire, loué sans doute un bon prix et mené fermement. Courbé, les reins lourds de fatigue, Ogier ferma les yeux et se laissa conduire par Marchegai, heureux d’aller quiètement auprès d’un roncin qu’il connaissait et dont il ne craignait ni ruade ni morsure.
    « Blandine dort sans doute encore. Ira-t-elle mieux à son réveil ? Verra-t-elle le parchemin posé près du chandelier où je lui dis combien je l’aime et qui je suis ?… Je lui ai enjoint de demeurer dans notre chambre. Nulle part ailleurs elle n’est mieux en sûreté. De plus, Odile ne doit ouvrir l’huis d’entrée à personne, et mes hommes gardent la maison… Quand même, quelle étrange nuit de noces ! »
    Un moment, il soupçonna son vieux compagnon d’avoir outrepassé, dans le breuvage avalé par la pucelle, la quantité de narcotique nécessaire à l’atténuation du mal : elle semblait sous l’effet d’un grand enchantement dont rien – mots et baisers, mouvements et caresses – ne parvenait à dissiper le charme. Ses mains pâles dépassaient de la chemise de mollequin dont Odile l’avait couverte en exigeant d’un geste qu’il quittât la chambre. Puis la servante était partie, le remettant en présence de cette gisante que sa léthargie, pour un autre que lui, eût

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