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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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chevelure de Blandine conservaient l’arôme. Et comme la maison lui semblait par trop silencieuse, il imagina Sirvin, quelque part sous cette chambre, devinant tout ce qui s’y passait et s’y passerait.
    Il se releva, déceignit sa ceinture d’armes et la posa ainsi que son épée, sur une chaise, puis il alla verrouiller l’huis, heureux d’entendre son grincement et sachant que le mire, ainsi, serait informé de ses intentions. Alors, il enleva son sarrau et ses chausses et ne conservant que sa chemise et ses braies, il revint vers le lit où s’accrochait un reste de clarté, et où Blandine avait caché ses bras et son épaule.
    Il s’assit de nouveau près d’elle, et derechef la baisa aux lèvres, longtemps, jusqu’à ce que, hors d’haleine, elle séparât doucement leurs visages.
    — Tu ne regrettes rien ?
    Elle l’examinait d’un regard ardent, tout à la fois hardi et pudique, et dans l’ombre grise où son désir renaissait, Ogier eut peine à reconnaître en cette gisante attentive au moindre de ses mouvements, la pucelle effrayée qu’il avait délivrée de l’étreinte de Lerga.
    — Non… mon époux, je n’ai aucun regret… Et toi ?
    — Moi ?… Non !… Oh ! non… Tu es tellement…
    Il ne sut qu’ajouter : tous les mots semblaient vains. Plus encore qu’en tout autre moment, l’extrême beauté de Blandine, même subjuguée par la force de son adoration pour elle, mêlait comme une peur à sa délectation. Une beauté pâle, fragile, embellie, s’il se pouvait, par la tendresse d’un regard où, malgré la vesprée, son ravissement d’amoureux trouvait comme un reflet. Et lui qui jamais n’avait su louanger une fille, voilà qu’il n’osait avouer les sentiments de félicité que celle-ci lui inspirait ! Ce qu’il éprouvait au tréfonds de son corps et de son cœur se révélait sans commune mesure avec tout ce qu’il avait ressenti jusque-là. Sa contemplation suffisait à son bonheur ; elle l’emportait, du moins présentement, sur un désir pourtant net, affirmé, d’étreindre cette enchanteresse et de mêler sa chair et sa ferveur aux siennes. Son ébahissement d’avoir pu inspirer tant d’amour, son plaisir de voir se réaliser le plus aventuré des songes le retenaient d’accomplir un geste. Si Benoît Sirvin l’avait frappé de commotion en lui livrant certains secrets dont des milliers d’hommes avaient payé de leur vie la connaissance, et s’il avait été tenté de maudire le sort qui les avait mis en présence, la Providence le récompensait de sa constance auprès du vieillard en lui offrant Blandine guérie, nue et peut-être affamée de caresses.
    Insinuant sa dextre sous le drap, il retrouva l’épaule tiède et le cou d’albâtre où le cœur de la pucelle semblait battre à grands coups, puis il n’osa bouger, craignant que le moindre effleurement, si plein de vénération pourtant, ne devint fade ou déplaisant à recevoir. Craignant aussi, tant le flux d’amour enfiévrait son sang, d’atteindre seul cette félicité où il voulait la conduire.
    — Je t’aime, mon épouse… et cet amour m’effraie. Je me sens indigne du tien…
    — J’ai grand peur… On dit que…
    D’un baiser, il interrompit Blandine, puis il la contempla encore avec une révérence folle, glissant d’un sourcil d’or au nez délicat, et de là aux lèvres tendues, framboisées, frémissantes.
    — Viens près de moi, dit-elle.
    Vêtements et scrupules tombèrent et, nu, Ogier se glissa dans ce lit qui pendant près de trois mois avait été le sien et où, bien souvent, lors de ses pensées les plus hardies, il avait allongé Blandine. L’espérance se transmutait en vérité : la pucelle était là, consentante et inquiète ; il enfouissait son nez dans ses cheveux épars, touchait un sein petit que le printemps charnel faisait bourgeon, se décidait enfin à glisser vers des courbes et des rondeurs soyeuses. Et quelque douces qu’il les voulût, ses errances lui paraissaient froides et revêches.
    Penché, il voyait à peine le visage de Blandine. Fleur et fruit, vraie, tangible et dépouillée de la légende qu’il lui avait composée au fil des jours afin de mieux s’en éprendre, il la humait – menthe et chair –, appuyant, renouvelant ses tendresses, cependant que des soupirs l’encourageaient à descendre sur les pentes fraîches et le moutonnement étroit et partagé où un reste de pudeur avançait une main qui

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