Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
Vom Netzwerk:
visite à Boston, chez des parents de sa mère.
    La ville de Boston l’enchante ; après le parler cru, inquisiteur. dont il a l’habitude, les manières de ses parents lui sont une révélation. Il est très poli d’abord, très réti cent, conscient qu’il ne saura parler librement que s’il connaît les bévues à ne pas commettre. Mais il est ému. Il se promène dans les rues de Beacon Hill, grimpe avec ardeur les trottoirs resserrés qui mènent au State House où il tombe en arrêt, regardant le jeu des lumières sur la Charles qui coule à un demi-mile dans le contrebas. Les heurtoirs de cuivre, les lourds marteaux de cuivre noir l’intriguent ; il observe les portes étroites, touche son képi au passage des vieilles dames vêtues de noir qui esquissent un sourire plaisant, un peu incertain, à l’adresse de son uniforme de cadet.
    Voilà un air qui me plaît.
    J’aime beaucoup Boston, dit-il quelques semaines plus tard à sa cousine Margaret. Ils sont devenus des confidents.
    Vraiment ? dit-elle. Ça devient un peu miteux ici Papa dit qu’il y a de moins en moins des endroits où on peut aller. (Son visage est délicatement long, plaisamment froid. Son nez, malgré sa longueur, est retroussé du bout.)
    Oh ! les Irlandais bien sûr, fait-il avec une moue ; mais, conscient de la banalité de sa réponse, il se sent vaguement mal à son aise.
    Oncle Andrew se plaint toujours qu’on nous a pris le gouvernement. Je l’ai entendu dire l’autre nuit que nous ressemblons à la France, il a été là bas tu sais, les seules carrières qui vous restent c’est l’administration ou l’armée, et même là-dessus on ne peut pas trop compter. (Consciente d’une maladresse, elle ajoute vivement). -Il t’aime beaucoup.
    Ça me fait plaisir.
    Tu sais, c’est bizarre, dit Margaret, il y a seulement quelques années Andrew était très intolérant à propos de tout ça. Je te dirai un secret. (Elle rit, -passe son bras sous le sien.) il a toujours préféré la marine. Il dit qu’ils ont meilleure tenue dans la marine.
    Oh ! (Pendant un moment il se sent perdu. Toute leur politesse, leur façon de l’accepter comme parent, lui apparaissent à l’autre bout de la lorgnette. Le temps d’u^ instant il essaie de renverser le sens de tout ce qu’il leur a entendu dire, d’examiner leur attitude d’un nouveau point d’approche.)
    Ça 11e veut rien dire, fait Margaret, nous sommes tous de tels imposteurs. C’est terrible à dire, mais tu sais nous n’acceptons comme bon que ce qui fait partie de la famille. J’ai été terriblement choquée quand je m’en suis aperçu pour la première fois.
    Alors je suis parfaitement en règle, dit-il d’un air badin.
    Oh ! non, tu n’ès pas en règle du tout. (Elle rit, et il l’imite, un rien hésitant.) Tu n’es que notre cousin au deuxième degré, un cousin de l’Ouest. Ça ne suffit pas. (Son long visage semblé gai pendant un moment.) Sérieusement, c’est que nous n’avons connu que la marine jusqu’à présent. Tom Hopkinson et Thatcher Lloyd, je crois que tu l’as rencontré à Dennis, eh bien, ils sont tous dans la marine et oncle Andrew connaît si bien leurs pères. Mais il t’aime bien. Je crois qu’il a eu le béguin pour ta mère.
    Et bien, voilà qui arrange les choses. (Ils rient de nouveau, s’assoient sur un banc et lancent des cailloux dans la Charles.)
    Tu es si admirablement enjouée, Margaret.
    Oh ! moi aussi je suis un imposteur. Si tu me connaissais, tu dirais que je suis horriblement cafardeuse.
    Je parie que tu ne l’es pas.
    Oh ! j’ai pleuré, tu sais j’ai complètement pleuré quand Minot et moi nous avons perdu le course des canots, il y a deux ans. Ça a été si bête. Père voulait que nous gagnions, et j’étais terrifiée par ce qu’il allait dire. On ne peut rien faire, il y a toujours une raison, qui fait que ceci ou cela n’est pas convenable. (Pour un instant sa voix est presque amère.) Toi tu n’es pas du tout comme les autres, tu es sérieux, tu es important. (Sa voix redevient chantonnante.) Père m’a dit que tu es le deuxième de ta classe. Ça n’est pas des bonnes manières de se pousser comme ça.
    Est-ce que bon troisième serait plus respectable ?
    Pas pour toi. Tu seras un général.
    Je ne crois pas. (Pendant ces semaines à Boston sa voix a acquis le ton qui convient, elle est devenue un peu plus haute, un peu plus paresseuse. Il ne peut pas exprimer l’excitation, ou

Weitere Kostenlose Bücher