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Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
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réfugiés. Ils sont sincères et amicaux et heureux, et presque tout le monde les aime. En grandissant, en se mettant à parler, leur fils leur procure toutes sortes de joies. Ils sont contents de la vie. Les habitudes de la vie conjugale clapotent autour d’eux comme un bain tiède. Ils n’éprouvent jamais de grandes joies, mais ils sont rarement déprimés et rien ne leur arrive qui soit excessif ou cruel.
    La guerre vient et Joey double son salaire à force d’avancement et d’heures supplémentaires. Deux fois il est renvoyé par le conseil de révision, mais en 1943, quand on se met à mobiliser les pères de famille, il ne cherche pas à se faire exempter sous., prétexte qu’il travaille dans l’industrie de guerre. L’atmosphère familière de son chez-soi, la gêne de se promener dans les rues en vêtements de civil, lui donnent un sentiment de culpabilité. Plus, il a des convictions, il lit le P. M.  libéral de temps à autre, encore que – dit-il – ça l’affecte trop. Il en discute avec Natalie et, malgré l’opposition tic son patron, il est mobilisé.
    Le matin où il se présente au bureau militaire pour se faire désigner son affectation, il entre en conversation avec un pere de famille comme lui, un majestueux garçon muni d’une moustache.
    Oh ! non, j’ai dit à ma femme de rester a la maison, dit Joey, ça l’aurait trop affectée.
    J’ai eu un temps terrible, dit l’autre, liquider tout, c’est un crime ce que j’ai dû accepter pour mon magasin.
    En peu de minutes ils se découvrent des connaissances communes. Oh ! oui, dit le nouvel ami, Manny Silver, gentil garçon, on s’est bien entendus à la pension Grossinger aux vacances d’il y a deux ans, mais, il fréquente un monde un peu trop comme ça pour mon goût. Jolie femme, mais elle ferait mieux de surveiller son poids, je me rappelle, ils étaient inséparables après leur mariage, mais bien sûr il faut sortir de chez soi, voir du monde, ça n’est pas bon pour des gens mariés de rester tout le temps ensemble.
    Adieu à tout ça.
    Ça a été parfois la solitude, le vide, mais ça a tout de même été un port d’attache. On y laisse ses amis, tous gens qu’on comprend sans difficulté, et dans l’armée, dans le monde nu et étranger des casernes et des bivouacs Goldstein tâtonne à la recherche d’une nouvelle réponse, d’une nouvelle sécurité. Et, dans sa misère, les vieilles habitudes s’évanouissent comme un aboi de chien un jour d’hiver, et il se sent tout dépouillé. Il s’interroge, il sonde une à une les cellules de sa cervelle, pour se retrouver avec son héritage premier, un héritage incrusté depuis un long temps dans le monotone balancement de son berceau fait à. l’image des rues de Brooklyn.
    (Nous sommes un peuple harcelé, cerné par nos oppresseurs… nous devons voyager de désastre en désastre… âmes indésirables dans un pays étranger.)
    Nous sommes nés pour souffrir. Et encore que de toutes les fibres de son cœur il aspire à son chez-soi, à sa baie, sa jambe s’affermit, sa cuisse se bande.
    Goldstein présente son visage au vent.
    Après avoir traversé le ruisseau à gué, la section s’assembla sur l’autre rive. La jungle, derrière eux, ne livrait pratiquement rien de la piste qu’ils venaient d’y tailler, les derniers vingt mètres, en vue des collines, ils se contentèrent de saquer le moins possible dans l’épais de la brousse, pour se glisser à plat ventre vers la périphérie de la forêt. Aussi, à supposer qu’une patrouille Japonaise vînt à passer, il était improbable qu’elle découvrit la piste.
    « Il est trois heures, les gars, dit Hearn. Il nous reste pas mal de terrain à couvrir. Je veux faire au moins dix milles avant la nuit. » Un murmure s’éleva parmi les hommes. « Quoi, farceurs, vous rouscaillez déjà ?
    – – On se donne du cœur au ventre, mon lieutenant, s’écria Minetta.
    – Ce que nous n’aurons pas fait aujourd’hui, il faudra bien que nous le rattrapions demain », dit Hearn. Il se sentait un peu agacé. « Vous voulez leur dire quelque chose, sergent ?
    –  Oui, mon lieutenant », dit Croft. Jouant du doigt avec le col de sa chemise, il promena un regard sur les hommes. « Je veux que chacun de vous se rappelle où se trouve la piste. Vous pouvez la repérer sur ces trois rochers là-bas, ou sur ce petit vieux arbre courbé en deux. Si, pour une raison quelconque, un de vous se perd, faut

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