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Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
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plus rapidement entre ses doigts et il transpirait, il pensait à des choses liquides, il se perdait dans un fouillis de corps entrelacés dans l’amour, il se remémorait intensément le goût des ventres, des hanches, des bouches de femme. Le soleil était très lumineux, très bon. « Ça vous fout un gars par terre quand il baise pas régulièrement. Je parie que c’est ça qui m’a mis les tripes à l’envers et qui leur a flanqué cette saloperie de pus. » Sa rêverie se dissipa à cette pensée. « J’en veux pas de leur opération, ils me feront mourir avec ça. Quand je rentrerai j’y dirai que j’en veux pas de leur camelote, j’y dirai que mon pus je l’a tout pissé avec mon sang et qu’y a rien de mal avec mes tripes. » Il se remit à pouffer faiblement, s Nom de Dieu, quand cette vieille blessure se fermera j’aurai deux nombrils, un sous l’autre. Je me demande ce que dira Alice quand elle verra ça. »
    Le soleil passa derrière un nuage. Il eut froid et se mit à frissonner. Ses idées retrouvèrent leur clarté pour un moment, et avec elles sa peur lui revint. « Peuvent pas me laisser tout seul ici, faut qu’ils reviennent me chercher. » L’herbe oscillait sous la brise, elle émettait un bruissement lugubre et lui suggérait des pensées qu’il ne voulait pas affronter. « Faut que je tiens le coup. » Il se souleva, réussit à se mettre debout, aperçut les collines et les falaises au pied du mont Anaka, puis, tout son corps j couvert de sueur froide, il se porta en avant. « Je suis un homme, se dit-il, je peux pas me laisser tomber en morceaux. Je me suis jamais laissé emmerder par personne, et c’est pas maintenant que je vas commencer. * Un homme qu’a la chiasse vaut pas tripette. »
    Mais ses membres étaient froids et il frissonnait continuellement. Dégagé d’entre les nuages, le soleil ne le réchauffait plus. De nouveau il perçut un gémissement, et il se tordit sous un assaut soudain de douleur. « C’est moi qu’a fait ce bruit. » La douleur recommençait, martelant ses entrailles. « Nom de Dieu de fils de pute », cria-t-il tout d’un coup. Une rage insensée le prit contre la souffrance, et il s’entendit cracher le sang dans ses doigts qu’il avait portés à sa bouche. On eût dit le sang de quelqu’un d’autre, et il s’étonna de constater combien c’était tiède. « Y a que ça, faut que je tiens le coup », grommela-t-il en perdant connaissance.
    Tout avait marché mal. L’entrée du col était fermée, et dans ce moment même les Japonais étaient sans doute en train d’envoyer un message à leur quartier général. La patrouille, de toute façon, était éventée. A la nouvelle que Wilson avait été laissé en arrière Croft avait presque mugi de rage. Assis sur une pierre, ses minces lèvres blanches de colère, son regard allumé, il frappait la paume de sa main gauche avec son poing droit.
    « Ce grand con de bâtard », grognait-il, Son premier mouvement fut d’abandonner Wilson à son sort. Mais il fallait aller à sa recherche ; tel était le règlement, et il n’était pas question de passer outre. Déjà il était en train de se demander qui il allait prendre avec lui pour se mettre en quête de Wilson.
    Il en parla à Hearn. « Il me faut tout juste quelques hommes, mon lieutenant. Pas la peine qu’on y va nombreux, puis moins qu’on sera moins on risque un mauvais  coup. »
    Hearn approuva de la tête. Son grand corps était affaissé et son regard froid était pensif. Il aurait dû y aller lui-même, c’était une erreur de laisser l’initiative à Croft mais il n’ignorait pas que l’expérience de celui-ci le désignait pour la mission. D’ailleurs, il se défiait de ses propres réactions. Lui aussi la disparition de Wilson avait mis en colère, et tout comme Croft son premier mouvement fut de le considérer perdu.
    Toutes sortes de désirs s’affrontaient en lui, ambigus, contradictoires, plutôt étrangers à son tempérament. Il lui fallait y réfléchir, « Très bien, prenez qui vous voulez. » Il alluma une cigarette, regarda ses jambières, et congédia Croft.
    Les hommes faisaient les cent pas dans le creux, agités, rendus un peu hystériques par la soudaineté de l’embuscade et par la découverte que Wilson était perdu. Ils s’adressaient des coups de gueule irrités.
    Brown et Red se querellaient. « Tas de bâtards, jurait Red, vous étiez pas dans la danse, vous étiez

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