Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
Vom Netzwerk:
fit recouvrer son sens de commandement. « Ils vont nous attaquer bientôt », chuchota-t-il d’une voix rauque dans l’oreille de Gallagher.
    Gallagher se remit à trembler. « Ohh ! tu parles d’un réveil, essaya-t-il de dire d’une voix qui s’éteignait.
    – Regarde, chuchota Croft. Rampe le long de la ligne et dis-leur de ne pas tirer jusqu’à ce que les Japonais se mettent à traverser la rivière.
    – Je peux pas, je peux pas », chuchota Gallagher.
    Cröft fut sur le point de le frapper. « Va ! chuchota-t-il.
    – Je peux pas. »
    La mitrailleuse japonaise les cingla depuis l’autre rive. Les balles allèrent s’abîmer derrière eux, décousant des feuilles à leur passage. Leur tracé ressemblait à des éclairs rouges. On eût dit que mille fusils tiraient sur eux, et les deux hommes s’aplatirent dans le fond de leur trou. Les bruits craquaient sur leurs tympans. Croft avait mal à la tête. Le tir de sa mitrailleuse l’avait partiellement assourdi. Biiyouououou  ! Des débris qui ricochaient les atteignirent. Cette fois Croft en ressentit la pluie sur son dos. Il essayait de prévoir le moment où il pourrait relever la tête et se remetttre à tirer. Le feu sembla diminuer, et il leva les yeux avec précaution. Biiyouououou, bii-youou- ouou ! Il se rejeta dans son trou. La mitrailleuse japonaise les canardait à travers les broussailles.
    Il y eut un son aigu et perçant, et les hommes se couvrirent la tête de leurs bras. Baa-rououououm, baa-ro. uouououmm, rouououmm, rouououmm  ! Des obus de mortier explosèrent tout autour d’eux, et quelque chose souleva Gallagher, le secoua, puis le laissa choir. « Oh ! mon Dieu », cria-t-il. Une motte de boue le frappa à la nuque. Baa-rououououmm, baa-rouououmm !
    « Jésus, je suis touché, cria quelqu’un. Je suis touché, quelque chose m’a frappé. »
    Baa-rouououmm !
    Gallagher se révolta contre la force des explosions. « Arrêtez, je me rends, cria-t-il. Arrêtez  !… Je me rends ! Je me rends ! »
    Il ne savait plus, pour lors, ce qui le faisait hurler.
    Baa-rouououmm, baa-rouououmm !
    « Je suis touché, je suis touché », criait quelqu un. La mitrailleuse japonaise tirait de nouveau. Croft s aplatissait dans le fond de son trou, ses mains à plat sur le sol et ses muscles privés de mouvement.
    Baa-rouououmm ! Tiiiiiiiin  ! Le shrapnell chantait en s’éparpillant à travers le feuillage.
    Croft saisit son fusil à fusées. Bien que le feu n’eût pas diminué, il entendit quelqu’un crier en japonais. Il pointa le fusil en l’air.
    « Ils arrivent », dit-il.
    Il fit partir la fusée et hurla : « Arrêtez-les ! »
    Un cri aigu s’éleva dans la jungle, de l’autre côté de l’eau ; le cri de quelqu’un à qui on aurait broyé la jambe.
    « A a aiiiiii, aaaiiiiii ! »
    La fusée jaillit au moment où les Japonais passaient à l’attaque. Croft eut l’incertaine sensation que la mitrailleuse japonaise les enfilait de biais et il se mit à tirer automatiquement, sans viser, mais tenant son arme bas et la faisant pivoter sur son axe. Il ne pouvait pas entendre le feu des autres armes, mais il voyait leurs canons cracher des flammes comme d’un tuyau d’échappement.
    Il eut la saisissante image des Japonais courant vers lui à travers la rivière. «  Aaaaiiiiiiiiiih  ! » entendit-il de nouveau. Sous l’éclat de la fusée les Japonais avaient l’aspect roide et livide que prennent les choses dans le halo de l’éclair. Il ne voyait plus très clairement ; il n’aurait pas su dire, dans ce moment-là, où ses mains finissaient et où la mitrailleuse commençait ; il était perdu dans un vaste tourbillon de bruit, d’où çà et là un cri isolé se gravait pour un instant dans son esprit. Il n’eût jamais été capable de compter les Japonais qui chargeaient à travers ta rivière ; il savait seulement que son doigt était raidi sur la détente de son arme, et qu’il n’y mollirait pas. En ces rares moments il n’avait aucun sens du danger. Simplement, il continuait à faire feu.
    La ligne des attaquants commençait à se briser. L’eau les ralentissait considérablement, et le feu concentré de la section de reconnaissance faisait rage parmi eux comme un vent dans un champ découvert, fis se mirent à trébucher sur les corps de ceux qui étaient tombés. Croft vit, derrière un des corps, un Japonais lever les bras comme pour s’agripper à quelque chose dans

Weitere Kostenlose Bücher