Les panzers de la mort
les lignes ennemies, mais trop tard ! Nous bondissons à l’attaque et après un corps à corps frénétique, la position est enlevée, puis nettoyée par ceux qui nous suivent ; un feu d’enfer s’allume à l’orée du bois, à l’ouest de Selische, mais rien ne peut nous arrêter. Nous bondissons toujours, dans un état quasi hypnotique, et l’attaque réussit sans trop de pertes pour la compagnie. Hors de nous et recrus de fatigue, nous arrivâmes au chemin de Sukhiny-Shenderowska pour entendre distinctement des bruits de moteur venant de Sukhiny. Nous nous enterrâmes fiévreusement dans la neige glacée et Il n’y eut pas longtemps à attendre ; les bruits de moteurs allaient s’amplifiant.
Une importante colonne de gros camions se frayait lentement un chemin sur la route enneigée, victimes offertes aux hommes Silencieux qui guettaient leurs proies. Ceux que nous allions tuer, sans l’ombre d’un scrupule, avaient comme nous des pères et des mères qui, écrasés de douleur, apprendraient la mort d’un fils, tombé au champ d’honneur pour la défense du prolétariat. Les nôtres, tous, les jours » redoutaient la terrible nouvelle au nom du Führer et de la patrie. Comme si à n’importe quelle mère russe ou allemande, ces mots pouvaient apporter la moindre consolation ! La nouvelle leur parviendrait bien avant la fin de la bataille de Tscherkassy, un épisode entre mille dans la grande guerre, que les communiqués baptiseraient simplement du nom de « combats locaux ».
La colonne motorisée nous causait une alarme vaine, car les Russes, ignorant notre percée, se dirigeaient sans doute vers les positions que nous venions d’enlever. Nous ouvrîmes le feu de toutes nos armes automatiques à la distance de dix mètres. La surprise fut considérable, les premières voitures culbutèrent et s’enflammèrent aussitôt. Quelques équipages qui voulaient riposter furent rapidement réduits au silence, trois camions chargés « d’orgues de Staline » sautèrent en quelques secondes ; quant aux fuyards, ils furent fauchés par nos mitraillettes.
Vers 3 heures du matin, le commando repartit à l’attaque, cette fois vers Nowo-Buda. Tout était encore Silencieux dans cette direction, mais nous savions le village bonde de troupes russes. Le capitaine von Barring ordonna une attaque en tenaille, nord-sud, et ce furent de nouveaux les horreurs de l’arme blanche.
Semblables à des fantômes, nous nous glissons vers les premières sentinelles à l’entrée du village, et, comme dans un film qui tourne à toute vitesse, je vois Porta et le légionnaire trancher la gorge de l’une d’elles pendant que Bauer s’occupe de l’autre. Les sentinelles n’eurent pas un râle, leurs jambes gigotèrent un peu dans la neige, tandis que le sang jaillissait en fontaine des artères sectionnées. Nous rampons plus loin, dangereux comme des serpents.
Quelques Russes, enroulés dans leurs manteaux, dormaient sur le sol battu dans une des premières huttes. Nous fondons sur eux comme la foudre, et, en soufflant lourdement, nous les embrochons de nos couteaux de tranchée. Le mien s’enfonce profondément dans la poitrine d’un ennemi ; l’homme poussa un cri bref qui me rendit fou et je piétinai ce visage tourné vers moi qui me fixait avec terreur de ses yeux exorbités. Il me semblait marcher dans une gelée où s’écrasait quelque chose qui crissait comme des coquilles d’œufs.
De mes lourds souliers cloutés, je recommençai plus loin, pendant que mes camarades frappaient à qui mieux mieux. Porta lança son couteau dans l’aine d’un immense sergent qui s’était à moitié redressé ; le couteau glissa vers le haut et les boyaux se répandirent comme ceux d’une bête éventrée.
L’odeur du sang chaud et des intestins devenait effroyable dans la pièce exiguë ; je vomis violemment, convulsivement ; un des nôtres se mit à sangloter et aurait Hurlé de démence si un coup de poing de Pluto ne l’avait étendu par terre ; le moindre Cri nous aurait perdus. Nous sortîmes en courant de la hutte pour continuer la même besogne tout le long de la rue. On entendait, çaet là, de vagues rumeurs et des gémissements d’hommes qui se battaient à mort, au cours d’une des tueries les plus sauvages dont j’ai garde le souvenir.
Petit-Frère, armé d’un sabre de cosaque, abattit d’un seul coup la tête d’un lieutenant russe et je bondis de côté, horrifié, pour
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