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Les Piliers de la Terre

Les Piliers de la Terre

Titel: Les Piliers de la Terre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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maison avec du houx et accrocher le gui ; quand on
s’embrassait dessous, elle pouffait de rire. Le premier homme à franchir le
seuil porterait chance dès lors qu’il aurait les cheveux noirs : le père
de Sally, lui, restait consigné chez lui tout le matin de Noël car ses cheveux
roux porteraient malchance à ceux qu’il visiterait. A l’église, elle admirait
les moines déguisés en rois orientaux, en anges et en bergers, et elle
explosait de rire quand toutes les fausses idoles s’écroulaient à l’arrivée en
Egypte de la sainte famille.
    Le mieux
de tout, c’était l’enfant-évêque. Le troisième jour après Noël, les moines
habillaient le plus jeune novice en tenue d’évêque et chacun devait lui obéir.
C’était l’occasion d’ordres fantaisistes qui amusaient tout le monde. Par
exemple, il ordonnait aux citoyens les plus âgés et les plus dignes d’accomplir
d’humbles tâches, comme la récolte du bois pour le feu ou le nettoyage des
porcheries.
    Les
habitants de la ville attendaient devant le prieuré la sortie de
l’enfant-évêque. Il apparut, l’air excessivement grave. C’était un garçon d’une
douzaine d’années au sourire espiègle, vêtu d’une robe de soie violette et muni
d’une crosse de bois. Deux robustes moines portaient son trône sur les épaules,
suivis du reste du monastère. On l’applaudit et on l’acclama. Son premier geste
fut de désigner le prieur Philip. « Toi, mon garçon, va donc à l’écurie
panser l’âne ! »
    L’assistance
éclata de rire. Le vieil âne était connu pour son mauvais caractère et on ne le
brossait jamais. Le prieur Philip répondit « Bien, monseigneur » avec
un sourire amusé, et partit s’acquitter de sa tâche.
    « En
avant ! » commanda le jeune évêque. La procession sortit de
l’enclos ; certains se cachaient derrière leur porte de crainte d’être
désignés pour quelques tâches déplaisantes. Mais Sally et sa famille – son père
et sa mère, son frère, Tommy, tante Martha et même oncle Richard, rentré
inopinément hier soir – ne craignaient rien.
    Le jeune
évêque entraîna le cortège d’abord à la taverne, comme c’était la tradition. Là
il demanda de la bière gratis pour lui et pour tous les novices. Le brasseur
les servit de bonne grâce.
    Sally se
trouva assise sur un banc auprès de frère Remigius, l’un des plus vieux moines,
un homme de haute taille, peu aimable, qui ne lui avait jamais adressé la parole.
Or voilà qu’il lui souriait en disant : « C’est gentil que ton oncle
Richard soit rentré pour Noël.
    — Il
m’a donné un petit chat en bois, expliqua Sally, qu’il a sculpté lui-même avec
son couteau.
    — C’est
joli. Tu crois qu’il va rester longtemps ?
    — Je
ne sais pas.
    — Je
pense qu’il devra repartir bientôt.
    — Oui.
Il habite dans la forêt maintenant.
    — Tu
sais où ?
    — Oui.
Ça s’appelle la carrière de Sally. Comme moi ! dit-elle en riant.
    — Tiens,
tiens, dit frère Remigius, comme c’est amusant ! »
    Quand ils eurent
bien bu, l’enfant-évêque déclara : « Et maintenant Andrew le
sacristain et frère Remigius vont faire la lessive de la veuve Poil. »
    Sally
éclata de rire en battant des mains. La veuve Poil était une femme ronde au
visage rouge, blanchisseuse de son état. Les moines délicats détesteraient
laver les chausses et les sous-vêtements malodorants dont les gens changeaient
tous les six mois.
    La foule
quitta la taverne en procession pour gagner la maison de la veuve Poil au bord
du quai. Andrew et Remigius y prirent un lourd panier de linge sale qu’ils
transportèrent jusque sur la berge. Andrew ouvrit le panier et Remigius, avec
une expression de profond dégoût, en tira la première pièce de vêtement. Une
jeune effrontée cria : « Attention, frère Remigius, c’est ma
chemise ! » Remigius rougit. Au milieu de l’hilarité générale, les
deux moines se mirent courageusement à leur lessive. Andrew trouvait la
plaisanterie saumâtre, Sally le voyait bien, mais Remigius arborait un air
étrangement satisfait.
     
    Accrochée
par une chaîne à un échafaudage, une grosse boule de fer pendait comme un nœud
de bourreau à une potence. Une corde fixée à la boule, passant par une poulie,
était maintenue au sol par deux manœuvres qui s’y cramponnaient. Quand les
ouvriers tiraient sur la corde, la boule remontait jusqu’à la poulie et la
chaîne s’allongeait à

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