Les Piliers de la Terre
est Richard ? »
Remigius
fixait toujours Waleran. « A compter d’aujourd’hui ?
— A
compter d’aujourd’hui. »
Remigius
se tourna alors vers William. « Un monastère n’est pas qu’une église
entourée d’un dortoir. Il lui faut des terres, des fermes, des paroisses qui
versent des dîmes.
— Dites-moi
où est Richard et je vous donnerai pour commencer cinq villages avec leurs
églises paroissiales, proposa William.
— Il
nous faudra une charte en bonne et due forme.
— Vous
l’aurez, promit Waleran, ne craignez rien.
— Allons,
moine, continua William. J’ai toute une armée qui m’attend hors de la ville. Où
est la cachette de Richard ?
— Dans
un endroit nommé la carrière de Sally, juste à côté de la route de Winchester.
— Je
connais ! s’exclama William. C’est une carrière désaffectée. Plus personne
n’y va.
— Je
me souviens, renchérit Waleran. On n’y travaille plus depuis des années. C’est
une bonne cachette : on ne la trouve que si on la connaît.
— C’est
une véritable sourcière, reprit William, tout excité. Les parois sont abruptes
sur trois côtés. Personne n’en réchappera. Je ne ferai pas de prisonniers,
croyez-moi ! » Son enthousiasme l’emportait à mesure qu’il imaginait
la scène. « Je les massacrerai tous. »
Les deux
hommes de Dieu le regardaient avec froideur. « On se sent un peu dégoûté,
frère Remigius ? ricana William avec mépris. La perspective d’un massacre
tourne-t-elle l’estomac de monseigneur l’évêque ? » Il touchait
juste. Ces religieux étaient de grands comploteurs, mais lorsqu’il s’agissait
de verser le sang, ils dépendaient entièrement des hommes d’action.
« Heureusement que vous prierez pour moi », lança-t-il d’un ton
sarcastique en sortant.
Son cheval
l’attendait dehors, un étalon noir qui avait remplacé – sans l’égaler – le
destrier volé par Richard. Il se mit en selle et quitta la ville.
Combien de
hors-la-loi trouverait-il à la clairière de Sally ? Deux cents ? Cinq
cents ? Ses hommes à lui, William, risquaient d’être inférieur en nombre,
aussi lui faudrait-il tirer le meilleur parti de ses atouts. Le premier était
la surprise. Un autre l’armement. Les hors-la-loi n’avaient guère que des
gourdins, des marteaux, au mieux des haches. Aucun ne possédait d’armure. Mais
le gros avantage, c’était que les hommes de William attaqueraient à cheval. Les
hors-la-loi avaient peu de montures et selon toute probabilité il n’y aurait
pas beaucoup de chevaux sellés au moment où William frapperait. Pour faire
bonne mesure, il décida de poster quelques archers sur les flancs de la colline
avec ordre de tirer sur la clairière, quelques instants avant l’assaut.
Le plus
important était d’empêcher les hors-la-loi de s’échapper jusqu’à ce que Richard
soit capturé ou tué. William résolut de charger une poignée d’hommes de
confiance d’attendre derrière la première vague d’assaut pour ramasser les
petits malins qui auraient réussi à s’esquiver.
Walter
attendait en compagnie des chevaliers et des hommes d’armes là où William les
avait laissés deux heures plus tôt. Ils avaient bon moral, prévoyant une
victoire facile. Au signal du comte, ils se mirent à trotter sur la route de
Winchester.
Walter
chevauchait près de William, sans mot dire. Une des principales qualités de
Walter, c’était sa capacité à garder le silence. William supportait mal les
gens qui n’arrêtaient pas de lui parler, même quand ils n’avaient rien à dire,
sans doute parce qu’il les rendait nerveux. Walter respectait William, mais ne
le redoutait pas, ils se connaissaient depuis trop longtemps.
William
ressentait un mélange familier d’ardente impatience et de fébrilité. Il vivait
pleinement quand il risquait sa vie. Mais, cette fois, l’événement était
spécial. Il tenait l’occasion de détruire l’homme qui depuis quinze ans
enfonçait une épine dans sa chair.
Vers midi,
ils firent halte dans un village assez important où ils trouvèrent une taverne.
William acheta pour les hommes du pain et de la bière et ils firent boire les
chevaux. Avant de repartir, il donna ses instructions à ses troupes.
Quelques
lieues plus loin, ils quittèrent la route de Winchester. Le sentier où ils
s’engagèrent était à peine visible,et William ne l’aurait pas remarqué
s’il ne l’avait pas cherché. Une fois
Weitere Kostenlose Bücher