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Les Poilus (La France sacrifiée)

Les Poilus (La France sacrifiée)

Titel: Les Poilus (La France sacrifiée) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Miquel
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six fois dans la journée du 3 juin, mais leurs éléments avancés n’ont pas de soutien d’artillerie et ils se heurtent au feu des mitrailleuses. Le renfort de la seconde armée américaine permet aux montagnards de la 73 e division d’enlever leurs blessés et d’enterrer leurs morts. Les Marines américains continuent le combat au bois Belleau qu’ils enlèvent au prix de 7 800 morts aux gardes prussiens du Kaiserin Elisabeth Regiment. La bataille faiblit alors sur la Marne.
    On attend la reprise en Picardie.
    *
    Les Parisiens n’attendaient pas l’offensive de von Hutier pour prendre le train. Les gares d’Orsay, des Invalides et de Montparnasse étaient submergées. On avait le sentiment d’une émigration en masse vers la Bretagne ou la vallée de la Loire, parce que les trains n’étaient pas assez nombreux. On les attendait onze heures, douze heures et les gens s’entassaient sur les quais [114] . D’après les renseignements de police, les Parisiens fuyaient moins par crainte de l’invasion qu’en raison des bombardements continuels par le canon et les avions.
    Les Allemands pourtant ne poussaient plus au sud de la Marne, mais sur le front Montdidier-Noyon. Pétain s’était donné les moyens de les recevoir, en amenant à pied d’œuvre des divisions de l’Est et du Nord. De bonnes troupes, comme la 14 e de Besançon et Belfort, au repos vers Beauvais, et descendue par camions sur Breteuil. Douze divisions reposées, prêtes au choc, soutenues par des petites unités très mobiles d’autocanons et d’automitrailleuses de cavalerie, par les avions bombardiers des escadrilles Chabert et Bloch et par une artillerie lourde sérieuse capable de décimer les treize divisions de von Hutier alignées contre l’armée Humbert.
    Sur trente kilomètres, les poilus subissaient le 9 juin un matraquage au gaz moutarde. Ils ne voyaient pas à dix mètres, tant la nappe des fumigènes était dense. Les gares étaient bombardées jusqu’à Compiègne par les tubes à longue portée.
    Les Allemands devaient s’emparer des collines pour avancer tranquillement dans la plaine. Ils réussirent encore à s’infiltrer dans les massifs et à menacer la route Montdidier-Compiègne. Mais les Français se fortifiaient systématiquement sur la moindre butte, les fantassins retrouvaient la pelle et la pioche pour s’enterrer, les renforts arrivaient au front assez loin pour être reformés et engagés avec soutien d’artillerie.
    Le centre est bousculé sur sept kilomètres dans la vallée du Matz. La 53 e division donne des signes de fléchissement. Les Normands de Caen, Lisieux, Falaise, Évreux et Le Havre déjà matraqués dans la bataille de Picardie de mars à juin reculent sous prétexte d’alignement. Ils sont aussitôt renvoyés vers l’avant par le général Cadoudal.
    Le 10 juin, les poilus contre-attaquent : cinq divisions menées par Mangin qui utilise les chars lourds et les nouveaux Renault dans les bataillons « d’artillerie d’assaut ». Les fantassins montent à l’attaque, précédés, accompagnés d’engins qui broient les réseaux de barbelés et détruisent les nids de mitrailleuses.
    Ils sont vite déçus : les canons allemands de 77 détruisent 73 chars lourds sur 163 engagés. À peine les mastodontes permettent-ils aux poilus de s’emparer d’un village sans trop de pertes. Ils sont repoussés partout ailleurs par les barrages d’artillerie.
    Mais la contre-attaque a déconcerté Ludendorff qui a perdu 400 000 hommes depuis le 21 mars. Sans doute a-t-il fait la preuve qu’il pouvait percer facilement les lignes alliées, mais il n’a pas eu les moyens d’exploiter sa victoire, faute de logistique. Les troupes lui ont manqué, moins encore, il est vrai, que les camions et les lignes de chemin de fer.
    Les poilus, à rude école, ont appris à se défendre sur le terrain contre une offensive de grand style, à résister aux techniques d’infiltration en multipliant les coups de main, en ancrant leur résistance sur des points faciles à défendre, en améliorant leurs liaisons. Les artilleurs ont reçu des consignes de mobilité, poussant leurs pièces au plus près grâce à la motorisation, privilégiant la communication avec l’infanterie.
    Ils ont aussi appris à résister dans des groupes disparates, formés de soldats venus d’unités, voire d’armes différentes, sans souci de s’aligner en dominos de divisions. Les Anglais rescapés du plateau de Craonne

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