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Les porteuses d'espoir

Les porteuses d'espoir

Titel: Les porteuses d'espoir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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disparaître à la rivière, ajouta-t-il plus doucement.
    Sans attendre que le cheval se soit immobilisé, le jeune homme sauta à
     terre.
    — Dis à ta tante que j’arrive.
    Sans répondre, Elzéar partit vers la maison de son oncle d’un pas joyeux.
    Vraiment, la bonne humeur de ce dernier l’étonnait… Docile, le cheval s’arrêta
     sans que François-Xavier ne lui en donne l’ordre. Les rênes à la main, l’homme
     resta un instant pensif. Tout à l’heure, il avait souri en voyant sa fille
     Yvette faire la course avec son chien jusqu’à la grange. Au moins, ses enfants
     n’avaient pas trop été marqués par le drame. Comme il aimerait avoir cette
     faculté de se relever des événements ! Mais quand même, il y avait quelque chose
     de malsain dans l’attitude d’Elzéar. Perdu dans ses pensées, machinalement,
     François-Xavier descendit à son tour. S’approchant de son cheval, il examina une
     de ses pattes. Il avait cru percevoir un léger boitement dans le trot de
     l’animal. Non, vraiment, il ne pourrait remettre plus longtemps une conversation
     avec Georges. Ne serait-ce que pour parler de Jean-Marie. Georges ne voulait
     plus rien savoir de son plus vieux. C’était toujours bien son fils ! Celui-ci ne
     pourrait rester toute sa vie caché chez les trappistes ! La bête renâcla. Elle
     n’aimait pas qu’on lui touche ainsi les pattes. Ce n’était qu’un caillou qui
     l’incommodait. Jean-Marie avait été moins chanceux, enfant, lorsqu’il s’était
     fracturé lajambe. Il avait gardé une claudication de cet
     accident. Georges n’avait jamais accepté cette diminution physique chez son
     fils. François-Xavier s’était souvent questionné sur cet état d’esprit. Il avait
     grandi avec Georges. Il le connaissait comme le fond de sa poche. Il savait le
     désarroi que son ami avait ressenti de perdre sa mère si jeune, et celui d’avoir
     pour père un homme rude et alcoolique. François-Xavier avait cru que Georges, au
     contraire, vouerait un amour paternel sans borne à ses fils. Mais, c’était comme
     si Georges cherchait la perfection, toujours. Il n’avait pu admettre que
     Jean-Marie ne corresponde pas à ses idéaux. Cette complexité chez son
     beau-frère, François-Xavier n’avait jamais réussi à tout à fait la comprendre.
     Il n’en devinait les causes que dans l’enfance blessée de celui-ci. Malgré
     toutes les bonnes raisons du monde, il était inconcevable pour François-Xavier
     qu’un père renie son fils comme Georges l’avait fait avec son aîné.
    Il sortit son couteau de poche et retira le caillou du fer à cheval. Pauvre
     Jean-Marie… Il n’était pas en grande forme d’après les moines trappistes qui
     l’hébergeaient. Georges n’était pas raisonnable. Il avait mis le compte de
     l’incendie sur le dos de son plus vieux. Ce n’était toujours bien pas de la
     faute de Jean-Marie s’il avait accepté de donner le gîte à deux pauvres quêteux
     par une nuit glaciale de janvier ! Même si Georges tenait son aîné responsable
     d’avoir laissé les deux arrivants attacher leurs chiens à des gallons de naphta
     et de les avoir renversés... non... Plus le temps passait, plus il était
     difficile de reparler de ces faits. Dans ces temps d’épreuves, Jean-Marie et
     Elzéar ne devraient pas être séparés. Les deux frères de dix-sept et dix-neuf
     ans n’étaient encore que des gamins… Ils avaient besoin d’être réunis, d’être en
     famille, enfin ce qu’il en restait.
    François-Xavier caressa l’encolure du cheval. Ses neveux n’étaient pas les
     seuls à avoir besoin de soutien. S’il ne se retenait pas, François-Xavier aurait
     pleuré comme un bébé dans la crinièrede sa jument. Secouant la
     tête à cette image puérile, il entreprit de dételer l’animal. C’est vrai qu’il
     aurait désiré être consolé. Il avait cru trouver ce réconfort dans les bras de
     son épouse. Mais Julianna, c’est à croire qu’il l’avait également perdue lors de
     l’incendie. Elle était à prendre avec des gants blancs, toujours sur la
     défensive, en colère... Il entraînait le cheval vers l’étable quand le hurlement
     d’Yvette lui parvint. Lâchant tout, il se précipita à l’intérieur du bâtiment.
     Sa fille lui tournait le dos et fixait avec horreur quelque chose de pendu. Il
     ne voyait pas bien, elle lui cachait une partie de la scène, mais il discerna et
     reconnut la

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