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Les proies de l'officier

Les proies de l'officier

Titel: Les proies de l'officier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Armand Cabasson
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reprendre sur un autre sujet tout aussi décousu. Et il ne semblait même pas se rendre compte de ses incohérences.
    — Que penser d’un cerveau confus qui exécute de main de maître un plan cohérent ? A-t-il seulement compris ce qu’on lui avait fait avouer ? Oh, je suis persuadé qu’il a reconnu les faits. Ce qui est surprenant, c’est qu’il n’ait pas également avoué être l’instigateur du double meurtre du courrier de Lyon, l’assassin du député Marat, le fabricant de la machine infernale qui faillit pulvériser l’Empereur rue Saint-Nicaise, l’homme au masque de fer...
    — N’en rajoutez pas, je n’ai pas besoin de vous pour cela. Au moins ai-je demandé qu’étant donné ses troubles, il ne soit pas condamné à mort. C’est déjà ça.
    Parce qu’en plus, on voulait l’exécuter ? Margont se sentit écoeuré.
    — Je vais réclamer une nouvelle enquête, reprit le prince. Je concède que votre raisonnement me dérange. Pourtant, j’ai souvent eu des échos très positifs quant au sérieux des autorités polonaises.
    Margont n’en doutait pas. Il devinait une présence derrière ceux qui avaient mené cette supercherie d’enquête. La comtesse Nergiss. Le prince voulait tellement que cette affaire soit résolue... Corrompre l’un de ses domestiques et un ou deux notables polonais : elle n’était plus à une dépense près. Margont se trouvait partagé au sujet de cette femme. Ou elle avait été appâtée par le pouvoir. Ou elle avait agi par amour, pour réaliser le rêve de son époux. Si tel était le cas, son arrivisme avait quelque chose d’émouvant et Margont ne pavenait plus à la haïr.
    — Mais tout de même, c’est forcément lui, murmura Eugène.
    — Comment les événements se sont-ils enchaînés ce soir-là ?
    — L’assassin s’est mêlé aux invités. C’est obligatoire, car il y avait des sentinelles tout autour du château et un tel nombre de personnes présentes...
    « Bien sûr qu’il s’est mêlé aux invités puisque c’était l’un des invités ! » s’exclama intérieurement Margont. Enfin, au moins le prince coopérait-il maintenant.
    — Il est entré dans la loge...
    — Comment l’a-t-il trouvée ?
    — Juste après la représentation, une foule de spectateurs s’est pressée dans les loges pour féliciter les acteurs tandis qu’ils se démaquillaient. Moi-même, je m’y suis rendu. Il était donc facile de repérer les lieux.
    Ensuite, les comédiens ont regagné le parc. Ce n’est que plus tard que mademoiselle Lasquenet est retournée dans sa loge. Son meurtrier a alors pris d’énormes risques en l’y rejoignant. Un admirateur aurait pu venir « tenter sa chance » ou un domestique aurait pu le croiser ou l’entendre. Il a agi très rapidement, autrement il aurait forcément fini par être pris sur le fait. Il est entré dans la chambre. Mademoiselle Lasquenet ne s’est pas inquiétée. Il lui suffisait de crier pour être entendue par un serviteur. Par ailleurs, ou l’assassin s’était déguisé en valet et elle a cru qu’il venait de la part de la comtesse, ou il s’est présenté comme l’un des invités. Auquel cas les comédiennes ont l’habitude de ce genre de situations et savent les gérer avec tact. L’homme l’a poignardée par surprise, deux fois. Elle est morte avant d’avoir eu le temps de pousser un cri. Vous voyez bien que ce crime est différent de celui de la Polonaise.
    — Mais il ressemble beaucoup à celui de la sentinelle. Car tuer net une personne avec seulement deux coups de couteau... Par ailleurs, on ne peut pas savoir si le coupable aurait ou pas mutilé sa victime s’il avait disposé du temps nécessaire.
    — Justement, à ce propos... Il y a un élément. L’assassin lui a coupé la langue.
    Margont frémit. Il lui fallait toujours du temps pour s’habituer à l’horreur.
    — La langue...
    À son tour il se sentit déstabilisé. Heureusement, il avait suffisamment ébranlé le prince pour que celui-ci lui livre tous les détails.
    — J’y ai longuement réfléchi. Une anecdote explique peut-être un geste aussi cruel. À la fin de la représentation, les spectateurs étaient conquis. Ce que voyant, la comtesse Nergiss proposa aux acteurs de rejouer certaines scènes en fonction des demandes du public. Tout le monde se prit au jeu. On leur réclamait même des tirades d’autres pièces avant de les acclamer à tout rompre. De temps en temps, quelqu’un

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