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Les proies de l'officier

Les proies de l'officier

Titel: Les proies de l'officier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Armand Cabasson
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n’a-t-il pas encore été identifié ?
    Margont écarta les bras.
    — C’est pourtant si simple...
    — Nous pouvons parler sans crainte : mes hommes ne comprennent que l’italien et le prince m’a mis au courant de tout. Qu’avez-vous appris de nouveau ?
    — Rien, mentit Margont. Nous avons une trentaine de suspects, mais certains ont un grade élevé. Il y a même des colonels sur cette liste !
    — Des colonels..., répéta Dalero comme s’il avait besoin de se l’entendre dire pour commencer à y croire.
    Les rues étaient quasiment désertes. On croisait seulement quelques habitants égarés ou des soldats ivres qui titubaient.
    — Toujours la plus grande discrétion ! s’exclama Dalero. Ça, c’est le seul point sur lequel le prince est satisfait de vous. J’ai fait interroger les domestiques de la maison : la victime était... comment dites-vous déjà en France, vous avez un terme délicieux... Ah oui ! Une « croqueuse d’hommes ».
    — Non, pas une croqueuse d’hommes ! le coupa Margont.
    Dalero haussa les sourcils.
    — Et pourquoi pas une coureuse ?
    — Je ne vous réponds pas. Puisque seule ma discrétion est appréciée, autant la conserver.
    — Bon. Soit. Cette femme s’appelait Ludmila Sperzof. Elle avait épousé le comte Sperzof, un capitaine des hussards qui s’est fait tuer durant la guerre contre les Turcs. Les serviteurs de la maison étaient très attachés au capitaine et ils haïssaient leur maîtresse : ils ne se sont pas privés pour en raconter long sur elle... Elle ne cessait de tromper son mari, même avec les hussards qu’il avait sous ses ordres. On m’a rapporté toutes sortes d’histoires : qu’elle avait eu une liaison avec Untel ou Untel, que tout Smolensk était au courant, qu’elle ne respectait même pas l’anniversaire de la mort de son époux, qu’il lui arrivait d’entraîner deux hussards en même temps dans son lit...
    — Vous êtes sûr que ce n’est pas l’un des domestiques qui l’a tuée ?
    — Vous remontez dans mon estime. Je ne crois pas. Je vais en venir au crime, mais permettez que je termine le récit du couple Sperzof. Un vieux domestique, ancien hussard sous les ordres du capitaine, m’a laissé entendre que celui-ci, désespéré par la conduite de son épouse, s’était fait sauter la cervelle. Ses hussards ont caché cela et ont chargé le lendemain avec son cadavre qu’ils ont abandonné sur le champ de bataille avant de revenir le chercher avec tous les honneurs.
    — Officiellement, on blâme donc les Turcs et pas la sultane... Quel genre d’hommes choisissait-elle pour amants ?
    — Je n’avais rien demandé d’aussi précis, mais ses servantes se battaient pour me livrer les détails les plus salaces. La comtesse Sperzof aimait tout particulièrement les militaires, surtout ceux qui avaient des manières violentes. Une nuit, l’un d’eux a d’ailleurs tenté de violer l’une des femmes de chambre.
    Margont semblait perdu.
    — Vous êtes certain de ce qu’on vous a raconté ? Peut-être que l’un des domestiques en voulait à la comtesse et l’a calomniée...
    Dalero secoua catégoriquement la tête.
    — J’ai interrogé huit domestiques et tous disent la même chose. La comtesse recevait souvent des officiers et les faisait boire. Parfois, elle ne prenait même pas la peine de gagner sa chambre et le repas tournait à l’orgie. La comtesse y mêlait une jolie servante qui avait les mêmes moeurs qu’elle et qu’elle a chassée lorsque celle-ci est tombée enceinte.
    — Elle n’avait tout de même pas que des soudards pour amants !
    — Si. Les gens aux manières plus normales ne l’intéressaient pas. Certains tentaient leur chance – car la comtesse était belle et riche –, mais en vain. Uniquement des brutes. L’amant qu’elle a conservé le plus longtemps, c’est-à-dire trois mois, était un lieutenant des dragons nommé Garoufski. Un jour, il a rossé un domestique parce que l’eau de son bain avait refroidi. Une autre fois, il a cassé deux dents à une servante.
    Le gant blanc de Dalero vint serrer le pommeau de son sabre. Il souriait. Il était effrayant.
    — Ah ! comme je serais heureux de me retrouver face à ce Garoufski.
    Margont irritait la paume de sa main en caressant sa barbe de la veille.
    — Revenons-en à l’assassin que nous traquons. Ce n’est certainement pas le même homme qui a tué notre Polonaise et cette comtesse.
    — Eh

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