Les Rapines Du Duc De Guise
avec sa
suite de gentilshommes et rentrait à son logis de la rue de Béthisy en passant
par la rue des Fossés-Saint-Germain.
Maurevert, dissimulé par un linge accroché
devant une fenêtre, avait tiré, visant la poitrine, puis s’était enfui en
abandonnant l’arquebuse sans chercher à savoir s’il avait tué l’amiral.
Seulement, au moment du coup de feu, Coligny s’était
retourné pour cracher, et la balle lui avait seulement arraché l’index de la
main droite pour se ficher dans son bras gauche. Blessé, l’amiral avait, d’un
geste, indiqué la maison d’où était parti le coup. Aussitôt sa suite s’était
précipitée et avait retrouvé l’arquebuse, mais l’assassin était déjà loin.
Le samedi, tous les gentilshommes huguenots
présents à Paris s’étaient retrouvés chez Coligny, brûlant de le venger. La
reine, Guise et Anjou, pris de peur devant un tel rassemblement, avaient alors
décidé de frapper les premiers et, dans la nuit de la Saint-Barthélemy, le
furieux massacre avait commencé.
Maurevert avait été vite identifié comme le
responsable du tir aussi était-il resté caché chez un proche des Guise, au
château de Chailly-en-Bière, avant de gagner Rome. Il était revenu en France en
1573, durant le siège de La Rochelle, aux ordres du duc d’Anjou, avant de
reprendre du service comme assassin royal en tentant de tuer le prince de Condé.
Peut-être avait-il perdu la main, car cela
avait été un nouvel échec. Maurevert y avait pourtant gagné le surnom de tueur des rois.
Revenu à la cour à l’avènement de Henri III,
il en avait été chassé par le nouveau roi qui désirait oublier les ignominies
qu’il avait tolérées quand il n’était que duc d’Anjou. L’assassin royal s’était
donc retiré sur ses terres, récompensé toutefois par les bénéfices de deux
grasses abbayes.
Mais il n’avait pu connaître une vie
tranquille. En 1579, à la suite d’une querelle familiale, il avait perdu le
bras gauche. Plus tard, retrouvé par les huguenots qui le pourchassaient depuis
la Saint-Barthélemy, il avait fait l’objet de plusieurs tirs de mousquet et
avait été blessé à la jambe.
En avril 1583, alors qu’il se trouvait près de
la Croix-des-Petits-Champs, protégé par une troupe de spadassins, le fils du
capitaine huguenot qu’il avait occis en 1569 l’avait retrouvé. Le protestant
était avec une troupe d’amis et une bataille d’une rare violence avait opposé
les deux bandes. Le fils vengeur y avait trouvé la mort, après toutefois avoir
percé le ventre de Maurevert de plusieurs coups d’épée. On avait transporté le tueur des rois dans une maison où il était passé de vie à trépas dans la
nuit, nommant auparavant le duc de Guise comme légataire universel.
C’est ce que tout le monde savait.
Seulement les choses ne s’étaient pas vraiment
terminées ainsi.
Paul Amer, son fidèle écuyer et serviteur, qui
s’était battu à ses côtés, l’avait ramené à la maison de son frère, Pierre de
Foissy. Maurevert était encore conscient. On avait appelé un chirurgien et fait
venir un notaire, car le tueur voulait faire son testament.
La blessure la plus grave venait d’un coup d’épée
entré dans le ventre et ressorti dans le dos. C’était mortel avait assuré le
chirurgien, bien qu’aucune artère ou veine n’ait été sectionnée, la plaie ayant
peu saigné.
Maurevert souffrait le martyre, mais n’avait
pas perdu conscience. Il avait tant de fois échappé à la mort qu’il espérait à
nouveau tromper la camarde. Il avait donc demandé à son frère et à son écuyer
de rester avec lui, sans témoin.
— Je vais mourir, leur avait-il dit, mais
si Dieu a de la compassion pour moi, il me laissera vivre encore un peu sur
cette terre où j’ai tant à faire. Pourtant, je ne veux plus connaître cette vie
d’errance, éternellement pourchassé. Je vous en prie, si je ne suis pas mort
demain matin, vous annoncerez quand même à tous ma fin. Vous me ferez mettre
dans un cercueil et me conduirez à la chapelle de notre châtellenie de Corbeil.
» C’est là-bas que vous me mettrez en
terre, ou que vous ensevelirez un cercueil plein de pierres si je respire
encore. Pierre, je t’ai déjà laissé tous mes biens, tu prendras soin de moi. Paul,
je vais te faire un don de deux mille livres. Si tu restes avec moi, ta fortune
sera assurée, tu sais que je suis riche. Si je survis, vous préviendrez le duc
de Guise.
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