Les refuges de pierre
Clan, vous ne m’avez pas
repoussée. Vous étiez disposés à admettre que ceux que vous appelez Têtes
Plates sont des êtres humains, un peu différents de vous, mais certes pas des
animaux. Je ne m’attendais pas à vous voir aussi compréhensifs, et je vous en
suis reconnaissante.
« C’est vrai que tout le monde n’a pas montré la même
gentillesse, mais vous avez été nombreux à me défendre, alors que vous me
connaissiez à peine : je ne suis ici que depuis quelques jours. C’est
peut-être en grande partie grâce à Jondalar, parce que vous êtes sûrs qu’il n’aurait
jamais ramené une femme qui tenterait de nuire à son peuple ou que vous ne
pourriez pas accepter.
Elle s’interrompit, ferma les yeux, les rouvrit et
continua :
— Malgré ma peur de rencontrer la famille de Jondalar et
les Zelandonii, je savais en partant que je ne reviendrais pas en arrière. J’ignorais
quels seraient vos sentiments pour moi, mais cela ne pouvait m’arrêter. J’aime
Jondalar. Je veux passer ma vie avec lui. J’étais prête à tout faire, à tout
endurer pour rester à ses côtés. Mais vous m’avez accueillie, et vous me
demandez maintenant si je veux devenir une Zelandonii ?
Ayla ferma de nouveau les yeux pour maîtriser son émotion,
essaya d’avaler le nœud dans sa gorge.
— Je le désire depuis que j’ai vu Jondalar pour la première
fois, et je ne savais même pas s’il vivrait. J’ai pleuré son frère, non parce
que je l’avais connu, mais parce que je l’avais reconnu. Cela me bouleversait
de ne pas pouvoir entrer en contact avec la première personne de mon espèce que
je voyais, du moins aussi loin que remonte ma mémoire.
« Je ne sais pas quelle langue je parlais avant que le Clan
me recueille. J’ai appris à communiquer à la manière du Clan, mais la première
langue que j’ai appris à parler, c’est le zelandonii. Même si je ne le parle
pas très bien, je le considère comme ma langue. Avant même que Jondalar et moi
puissions communiquer, je désirais faire partie de son peuple pour qu’il me
trouve acceptable, pour qu’il puisse envisager un jour de me prendre pour
compagne. Même si c’était seulement comme deuxième ou troisième femme.
« Vous me demandez si je veux devenir une Zelandonii ? Je
le souhaite de tout mon cœur.
Il y eut un silence stupéfait. Sans se rendre compte qu’il
bougeait, Jondalar franchit les quelques pas qui le séparaient d’Ayla et la
prit dans ses bras. Il éprouvait tant d’amour pour elle qu’aucun mot ne pouvait
l’exprimer. C’était étonnant qu’elle pût être à la fois aussi forte et aussi
vulnérable. Tous étaient émus, et même Jaradal avait compris une partie de ce
qu’Ayla avait expliqué. Les joues de Mejera et de Folara étaient mouillées de
larmes ; d’autres n’étaient pas loin de se mettre à pleurer. Marthona fut
la première à recouvrer sa maîtrise d’elle-même.
— En ce qui me concerne, je suis heureuse de t’accueillir
dans la Neuvième Caverne des Zelandonii, déclara-t-elle en serrant Ayla contre
elle en un geste spontané. Je serai heureuse de voir mon fils s’unir à toi, encore
que d’autres femmes puissent ne pas s’en réjouir. Les femmes l’ont toujours
aimé, mais j’ai parfois douté qu’il finirait par trouver une femme qu’il
pourrait aimer. Je me disais qu’il choisirait peut-être une femme d’un autre
peuple, je ne pensais pas cependant qu’il irait la chercher si loin. Maintenant
je sais qu’il a trouvé, parce que je comprends pourquoi il t’aime. Tu es un
être rare, Ayla.
— Le repas refroidit, prévint Proleva avec un sourire gêné.
Ils prirent tous conscience qu’ils avaient oublié de manger.
Jondalar piqua une portion de viande avec son couteau, la saisit entre ses
dents puis, la tenant avec son autre main, en coupa un morceau au ras de ses
lèvres.
— C’est froid mais encore bon, dit-il.
Après avoir mangé, Ayla nettoya son couteau et son bol, rangea
le premier dans sa gaine, et l’autre dans la poche attachée à sa ceinture, avec
sa coupe. Ils parlèrent de la Réunion d’Été, du moment où ils partiraient, et
la doniate suggéra une petite cérémonie pour accueillir Ayla dans la Neuvième
Caverne et en faire une Zelandonii.
A cet instant, une fillette d’une dizaine d’années s’approcha d’eux
en courant. Elle avait l’air désemparée, mais ce qui frappa surtout Ayla, ce
fut l’état de ses vêtements, sales et
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