Les refuges de pierre
accouchement.
Elle aurait dû m’en parler, j’aurais peut-être pu faire quelque chose. Je
regrette de ne pas avoir appelé Marthona tout de suite. Ayla a besoin de quelqu’un
auprès d’elle pour la rassurer mais je voudrais lui préparer une infusion pour
l’aider à se calmer. Évoquer son fils lui fera peut-être oublier sa peur.
— Tu veux me parler de lui ?
— D’abord ils l’ont trouvé difforme, ils ont dit qu’il
serait un fardeau pour le Clan. Au début, il n’arrivait même pas à tenir sa
tête droite, puis il est devenu fort. Tout le monde a fini par l’aimer. Grod
lui a même fabriqué un épieu, juste à sa taille. Et il courait très vite malgré
son jeune âge.
Les larmes aux yeux, Ayla souriait à ce souvenir, et la doniate
comprit tout à coup que la jeune femme avait aimé cet enfant, qu’elle avait été
fière de lui, esprit mêlé ou non. Certains Zelandonia se souvenaient encore de
la grand-mère de Brukeval et, sans jamais l’admettre publiquement, la plupart d’entre
eux étaient sûrs que la fille dont elle avait accouché était un esprit mêlé.
Personne n’avait vraiment voulu d’elle après la mort de sa mère, et Brukeval
avait connu un sort identique. Il avait les mêmes traits que sa mère, moins
marqués, peut-être, mais c’était un mélange, lui aussi, Zelandoni en était
persuadée. Elle ne l’aurait cependant pas reconnu devant quiconque, encore
moins devant lui.
Se pouvait-il qu’Ayla eût tendance à attirer leurs esprits parce
qu’elle avait été élevée par eux ? Ce bébé était-il aussi un
mélange ? Et dans ce cas, que faire ? Le plus sage serait peut-être
de mettre discrètement fin à sa vie avant qu’elle ne commence vraiment. Ce
serait facile, et personne ne saurait qu’il n’était pas mort-né. Cela
épargnerait des souffrances à tout le monde, y compris au bébé. Ce serait
regrettable que la Caverne compte un enfant non désiré et mal aimé de plus,
comme Brukeval et sa mère.
Mais si Ayla aimait son premier bébé, n’aimera-t-elle pas
également celui-ci ? raisonna la Première. C’est étonnant de la voir avec
Echozar, j’ai l’impression qu’elle se sent à l’aise avec lui. Cela pourrait
aller si Jondalar...
— Jondalar m’a dit que le travail avait commencé, lança
Marthona en pénétrant dans l’habitation. Il a pris soin de préciser que ce n’était
que le début, que je ne devais pas me presser, mais il m’a quasiment poussée
hors de chez moi tant il était impatient.
— C’est aussi bien que tu sois là, répondit Zelandoni. Je
voudrais lui préparer quelque chose.
— Pour hâter l’accouchement ? Les premiers bébés
peuvent être longs à venir, dit la mère de Jondalar en souriant à Ayla.
— Non, répondit Zelandoni.
Elle marqua une pause, indécise, puis reprit :
— Quelque chose pour l’aider à se détendre. Cela progresse
bien, plus vite que je ne l’aurais cru, mais elle est pleine d’appréhension.
Ayla remarqua que la doniate n’avait pas détrompé Marthona quand
celle-ci avait parlé d’un premier bébé. Dès le début, Ayla avait senti que
Zelandoni connaissait beaucoup de choses, beaucoup de secrets qu’elle gardait
pour elle. Il valait peut-être mieux que la doniate fût la seule à savoir qu’elle
avait un fils.
On frappa à l’entrée et Proleva apparut sans attendre.
— Jondalar dit qu’Ayla est en travail. Je peux vous
aider ? La compagne de Joharran portait un nouveau-né sur son dos, dans
une couverture.
— Bien sûr, répondit la Première.
Elle s’était arrogée le droit d’accorder ou de refuser l’accès à
l’habitation et Ayla lui en était reconnaissante. Savoir qui devait ou non se
trouver là était bien la dernière chose à laquelle elle avait envie de
réfléchir entre ses contractions. La doniate remarqua qu’Ayla s’était raidie
pour lutter contre la douleur et s’empêcher de crier.
— Tiens compagnie à Ayla pendant que Marthona fait bouillir
de l’eau, dit-elle à Proleva. Je dois aller chercher un remède.
Zelandoni sortit d’un pas vif. Elle était capable de se déplacer
rapidement malgré sa corpulence. Folara approcha de l’habitation au moment où
la doniate laissait le rideau retomber derrière elle.
— Je peux entrer, Zelandoni ?
La Première réfléchit le temps d’un battement de cour.
— Oui, vas-y. Tu aideras Proleva à rassurer Ayla.
Au retour de la doniate, Ayla s’agitait dans
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