Les refuges de pierre
certaine que ses remèdes soient efficaces sur les
Autres, mais elle connaissait un cas où ils l’avaient été et elle a décidé d’essayer.
Elle a préparé un emplâtre pour chasser l’infection ; elle m’a portée
toute la journée suivante. Je me rappelle le moment où j’ai repris connaissance
et où j’ai vu son visage pour la première fois. Je crois que j’ai crié, mais
elle m’a serrée contre elle et m’a réconfortée. Le troisième jour, j’arrivais à
marcher un peu, et Iza avait alors résolu que je serais son enfant.
Ayla se tut. Il y eut un profond silence tant son histoire était
émouvante. Proleva finit par demander :
— Quel âge avais-tu ?
— Iza m’a dit plus tard que je devais compter cinq ans
environ, répondit Ayla. L’âge de Jaradal ou de Robenan, ajouta-t-elle en
regardant Solaban.
— Tu as raconté tout cela avec les signes ?
demanda-t-il. Les membres du Clan peuvent-ils dire autant de choses sans
mots ?
— Il n’y a pas un signe pour chaque mot que j’ai prononcé,
mais ils auraient compris à peu près la même histoire. Leur langue ne se réduit
pas aux mouvements des mains. Tout, un battement de cil ou un hochement de
tête, peut avoir un sens.
— Mais avec ce genre de langue, ils ne peuvent pas mentir,
ajouta Jondalar. S’ils essayaient, ils seraient trahis par une expression ou
une posture. Quand je l’ai rencontrée, Ayla ne connaissait pas de signe
correspondant à « dire quelque chose qui n’est pas vrai ». Elle avait
même du mal à comprendre cette notion. Et, bien qu’elle la comprenne
maintenant, elle en est toujours incapable. Ayla ne sait pas mentir. Elle n’a
jamais appris, elle a été élevée comme ça.
— Il y a peut-être plus de mérite qu’il n’y paraît à parler
sans mots, énonça Marthona d’un ton calme.
— A l’observer, il saute aux yeux que cette sorte de langue
faite de signes est pour elle une façon naturelle de communiquer, dit
Zelandoni.
Elle pensait que les mouvements d’Ayla n’auraient pas été aussi
gracieux et faciles si elle avait fait semblant. Et quelle raison aurait-elle
eue de mentir ? Se pouvait-il qu’elle fût incapable de mentir ?
Zelandoni n’y croyait pas entièrement, mais les arguments de
Jondalar étaient convaincants.
— Parle-nous un peu plus de ta vie là-bas, dit Zelandoni de
la Onzième Caverne. Inutile que tu continues avec les signes, à moins que tu n’y
tiennes. C’est beau à regarder mais je pense que la preuve est faite,
maintenant. Tu dis qu’ils enterrent leurs morts, j’aimerais en savoir plus.
— Oui, ils les enterrent. J’étais là quand Iza est morte.
La discussion se poursuivit tout l’après-midi. Ayla relata de
façon émouvante la cérémonie et les rites funéraires puis évoqua de nouveau son
enfance. Les Zelandonii lui posèrent de nombreuses questions, l’interrompirent
souvent pour réclamer des précisions. Joharran finit par remarquer que le jour
commençait à baisser.
— Ayla doit être fatiguée, et nous avons tous faim, dit-il.
Avant de nous séparer, nous devrions envisager une grande chasse en vue de la
Réunion d’Été.
— Jondalar m’a parlé d’une nouvelle arme qu’ils veulent
nous montrer, dit Manvelar. Demain serait peut-être un bon jour. Cela
laisserait à la Troisième Caverne le temps de discuter de l’endroit où nous
pourrions aller.
— Bien, acquiesça Joharran. Nous chasserons donc demain.
Pour le moment, Proleva a fait préparer un repas, si tout le monde a faim.
La réunion avait été captivante mais les participants furent
heureux de se lever et de marcher un peu. En retournant aux habitations, Ayla
repensa à la discussion et aux questions qu’on lui avait posées. Elle avait
répondu sincèrement à toutes, mais n’était pas allée d’elle-même au-delà de ce
qu’on lui demandait. En particulier, elle avait évité toute référence à son
fils. Les Zelandonii auraient vu en lui une abomination, et, même si elle était
incapable de mentir, elle savait garder le silence.
9
La nuit était tombée quand ils arrivèrent chez Marthona. Folara
était allée chez son amie Ramila plutôt que d’attendre seule le retour de sa
mère, de Willamar, d’Ayla et de Jondalar. Ils l’avaient aperçue pendant le
repas du soir, mais la discussion s’était poursuivie et la jeune fille se
doutait qu’ils ne rentreraient pas de bonne heure.
Pas même une faible lueur de braises mourantes ne
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