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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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l’as déjà prouvé. Je te suis de nouveau reconnaissant et te récompenserai,
mais à présent profitons de la fête. Viens, joins-toi à moi.
    Les hommes se dirigèrent à l’étage, où les attendaient les
femmes, le visage voilé. La plupart d’entre eux apportaient un cadeau :
nourriture, pièces de monnaie, ustensiles de cuisine, tissu… qu’ils remettaient
aux deux femmes servant de maîtresses de cérémonie, postées de chaque côté de
la tête du lit. Hernando n’avait rien à offrir. Seuls les parents les plus
proches pouvaient exiger de voir la mariée, cachée et immobile sous le drap
blanc. Cette prérogative fut également accordée au roi, qui récompensa la
mariée d’une pièce d’or, et les maîtresses de cérémonie soulevèrent le drap devant
Abén Humeya.
    — Mangeons ! dit le roi, une fois qu’il eut
présenté ses hommages.
    Étant donné l’humilité du foyer des nouveaux mariés, la fête
s’étendit dans les rues et les autres demeures. Les oboles aux époux
s’arrêtèrent, et ceux-ci s’enfermèrent afin de laisser passer les huit jours
obligatoires pendant lesquels ils seraient nourris par leurs familles. Abén
Humeya et Hernando prirent alors le chemin de la maison d’Abén Aboo, où l’on
préparait un mouton au son des luths et des timbales. C’était une maison riche,
avec des meubles et des tapis, des parfums, des servantes. Brahim faisait
partie du groupe d’hommes de confiance qui les accompagnait.
    Avant que les femmes se dirigent vers une pièce séparée,
Hernando chercha sa mère. Il ignorait si elle était descendue au village avec
son beau-père et brûlait d’envie de la voir. Mais toutes avaient le visage
couvert et la majorité était de constitution similaire à celle d’Aisha. À une
extrémité du jardin, sous un grand mûrier, Brahim continuait à rire au côté d’autres
hommes : son visage, séduisant et tanné par le soleil, semblait avoir
rajeuni en quelques jours. Hernando ne l’avait jamais vu aussi content. Il
décida de s’approcher du groupe de son beau-père.
    — La paix, salua-t-il.
    Tous le dépassaient d’une tête et il hésita avant de
poursuivre.
    — Brahim, où est ma mère ? demanda-t-il
finalement.
    Son père adoptif le toisa, comme s’il ne s’attendait pas à
le trouver là.
    — Dans la montagne, répondit-il, se détournant afin de
reprendre sa conversation. Elle s’occupe de tes frères et du fils de Fatima,
ajouta-t-il l’air de rien.
    Hernando tressaillit ; arrivait-il quelque chose à la
jeune fille ?
    — Du fils de Fatima ? Pourquoi… ?
bredouilla-t-il.
    Brahim ne daigna pas lui répondre. Alors un homme du groupe
le fit à sa place :
    — En bref, de ton nouveau frère, commenta-t-il avant
d’éclater de rire et d’asséner une tape vigoureuse dans le dos du muletier.
    — Co… comment ? parvint à questionner le garçon.
    Le tremblement soudain de ses genoux paraissait gagner
jusqu’à sa voix.
    Brahim se tourna vers lui. Hernando perçut de la
satisfaction dans ses yeux.
    — Ton beau-père, répondit un autre homme, a demandé au
roi la main de la jeune fille.
    Les mots échappaient à l’entendement d’Hernando. Son visage dut
afficher une telle incrédulité que le Maure se vit presque forcé de continuer.
    — On a appris que son époux était mort à Félix et, en
l’absence de parents pour veiller sur elle, ton père s’est présenté au roi.
Réjouis-toi, mon garçon ! Tu vas avoir une nouvelle mère.
    La bouche d’Hernando se remplit de bile. La nausée
l’assaillit sans prévenir et il courut à l’autre bout du jardin, se heurtant à
des hommes qui attendaient que le mouton finisse de cuire sur la broche où il
tournait. Il ne réussit pas à vomir. Les haut-le-cœur se succédèrent les uns
après les autres, lui causant de terribles douleurs à l’estomac. Fatima !
Sa Fatima mariée avec Brahim !
    — Que t’arrive-t-il, Ibn Hamid ?
    C’était le roi. Il était venu vers lui et l’interrogeait.
Son visage montrait de la préoccupation. Hernando essuya de son bras la bile à
la commissure de ses lèvres. Il respira profondément avant de parler. Pourquoi
ne pas tout lui avouer ?
    — Sa Majesté a dit qu’elle m’était reconnaissante…
    — En effet.
    — J’ai besoin que vous me fassiez une faveur,
ajouta-t-il, affligé.
    Avant même qu’Hernando termine son histoire, Abén Humeya
souriait. On n’allait pas lui en raconter sur l’amour !

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