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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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de leurs peines et de leurs travaux et les
renvoya dans leurs foyers. Après quoi, les Barbons dressèrent un édit en deux
cent quarante-trois articles qui avaient été approuvés, mais ils omirent de le
publier et ne firent jamais aucune des réformes qu’ils avaient eux-mêmes
proposées. Étant réputés si vieux, les Barbons avaient voulu paraître faire du
neuf et rénover l’État. Mais une fois leur vertu proclamée et leurs bonnes
intentions reconnues, ils se retirèrent dans leur coquille et les privilèges de
leur ordre, s’accommodant du monde tel qu’il était et se contentant d’expédier
les affaires.
    Parvenu à ce point avec moi, plaise à toi, lecteur, de me
laisser revenir en arrière et de te parler du séjour à Dieppe de Louis, non
qu’il s’y passât rien qui tirât à conséquence dans le domaine politique (mais
ni plus ni moins, on vient de le voir, qu’à l’assemblée des notables), mais
parce que cette semaine, dans ma remembrance, garde pour moi un charme que je
ne saurais définir, mais que je parviendrai peut-être à faire sentir en le
contant.
     
    *
    * *
     
    Ce n’était pas la première fois que Louis se rendait dans
nos provinces de l’Ouest, mais ce fut la première fois qu’il alla jusqu’à
Dieppe. Il y arriva à deux heures de l’après-dînée et faute d’y trouver un
évêché, il fut logé à l’auberge de L’Écu de Bretagne, laquelle tournait
le dos au port de pêche, se peut pour se protéger du vent et des embruns. Mais
Louis, ayant aperçu la mer par une fenêtre d’un cabinet qui s’ouvrait sur
l’arrière du logis, descendit en courant l’escalier de l’auberge et,
contournant la maison, ses officiers le suivant avec peine, courut voir le port
de plus près. Il fut ravi et faisant lentement le tour du bassin, il s’arrêta
devant chaque bateau et posa des questions à l’infini sur les voiles et les
gréements auxquels seuls eussent pu répondre les pêcheurs eux-mêmes, s’ils
avaient parlé autre chose qu’un patois normand. Louis remarqua tout haut que la
plupart des coques étaient renforcées et rafistolées d’une façon assez laide
par des planches, mais qu’en revanche, l’ensemble était peint de neuf et de
couleurs vives. Au bout d’un moment, les pêcheurs qui travaillaient sur les
embarcations pour préparer la campagne de pêche de la nuit, s’aperçurent de sa
présence et de son intérêt et comme ils savaient qu’il était descendu à L’Auberge
de l’Écu de Bretagne, ils le reconnurent pour ce qu’il était et
l’acclamèrent. Louis leur tira gravement son chapeau, mais sans prononcer un
traître mot, ce qui frappa de regrets tous ceux qui se trouvaient là, car son
père à sa place aurait à coup sûr mandé un interprète, ne fût-ce que
l’alberguière qui parlait bien le français et, parce truchement, aurait engagé,
avec les pêcheurs, un de ces dialogues gaussant et chaleureux dont il avait le
secret.
    Le lendemain qui était un vingt-neuf novembre, je ne trouvai
en entrant dans sa chambre de L’Écu que Soupite et Berlinghen, lesquels
me dirent que Sa Majesté se tenait depuis une grande heure devant la vitre du
petit cabinet qui donnait sur la mer, au risque d’attraper la mort, vu l’aigre
bise qui soufflait par les interstices de la fenêtre. Héroard avait dû avoir
les mêmes craintes, car il lui avait jeté un manteau sur les épaules sans même
que Louis s’en aperçût.
    Je le trouvai comme collé à la vitre de la fenêtre,
regardant les bateaux de pêche, rentrant un par un au port, après une nuit
passée à la pêche, les voilures réduites, car la houle était forte et ils peinaient
prou à l’entrée de l’Arque pour gagner le havre. À côté de Louis se tenait un
officier du corps de ville qu’il avait fait quérir pour répondre à ses
questions, lesquelles étaient innumérables. De temps en temps, avec sa manche,
Louis effaçait sur la vitre la buée produite par sa respiration et revenait à
sa contemplation qu’il ne quitta que lorsque l’officier de ville lui eut assuré
que tous les bateaux étaient bien rentrés, malgré une mer qui grossissait de
minute en minute.
    Après la messe, il visita le château et la citadelle, et ne
prit qu’à une heure et demie sa repue de midi. Mais sitôt qu’il l’eut mangée,
il monta à cheval et galopa jusqu’au Pollet sur la rive droite de la rivière de
l’Arque. Nous crûmes, en le suivant aussi vite que nous pûmes,

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