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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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princesse Bourbon par sa mère et devenue duchesse de Guise
par son mari, n’eût pas admis que les affaires de l’État passassent avant les
siennes. Conjuguant en elle les orgueils des deux plus puissantes familles de
France, elle avait dit un jour avec hauteur à Marie de Médicis qui la rappelait
à l’obéissance, qu’elle n’avait pas « d’autre maîtresse que la Vierge
Marie… »
    La connaissant, avant que de l’aller voir, je pris de ma
vêture et de mon apparence un soin méticuleux, Louison, sur mon ordre, me
lavant cheveu et le frisant au fer en larges ondulations, de façon que les deux
dernières reposassent en volutes inversées sur mes épaules de chaque côté de
mon cou. Après quoi, Franz, qui était très habile, me rafraîchit au rasoir le
contour de la moustache et de mon collier de barbe. Il excellait en cet office,
ayant un sens de la symétrie que je n’ai vu si délicat en aucun autre barbier.
Si j’avais écouté Louison, elle m’eût inondé in fine d’eau de senteur,
mais je lui commandai d’en user avec une extrême modération, ne voulant pas que
mon parfum supplantât celui de ma marraine, ce qui l’eût à coup sûr offensée.
    En même temps, je commandai à Pissebœuf et à Poussevent de
savonner, laver, brosser et essuyer mon carrosse, lequel était fort boueux de
mon voyage dans le plat pays. Quand ils eurent fini, le pauvre Faujanet (belle
lectrice, prononcez, de grâce, le povre Faujanette. Sans cela, comment
saurait-on qu’il est périgordin ? Et ramentez-vous aussi que « le
povre », en occitan, ne dénote pas la pitié, mais l’affection), Faujanet,
donc, frotta, fourbit et raviva les dorures dont ma coche était ornée, tandis
que La Barge et Robin étrillaient et brossaient mes beaux chevaux alezan
jusqu’à ce que leurs robes brillassent au clair soleil de février.
    Je fis davantage en l’honneur de Madame de Guise. Je
dépêchai mon petit vas-y-dire louer deux Suisses en lui recommandant de les
choisir géantins et musculeux, précisant même leurs mensurations, car il
fallait que leur allassent les livrées à mes couleurs. Absurde dépense à mes
yeux, leur travail se réduisant à se tenir droits et immobiles derrière mon
carrosse pendant le court trajet de mon hôtel à l’hôtel de Guise et une fois
rendus là, l’un devait aller déplier le marchepied pour me permettre de descendre
et l’autre ouvrir la porte de la coche. Après quoi, tout le temps de la visite,
ils se tiendraient debout, immobiles, majestueux et inutiles, à la tête de mes
chevaux, tandis que le cocher Lachaise, comme c’était son devoir, demeurerait
vissé sur son siège. Mais quant à lui, Auvergnat né malin, il trouverait le
moyen, le chapeau rabattu sur les yeux, d’être assis droit et digne, tout en
dormant à poings fermés. Belle lectrice, comme vous le pouvez voir, tout, dans
notre vie à la Cour, n’est que rang à tenir, montre, pompe et apparat, soumis
que nous sommes à de petites règles tyranniques qui, si nous ne les suivons
pas, nous font aussitôt dépriser.
    De haut de la verrière de notre librairie, le marquis de
Siorac et le chevalier de La Surie regardaient ces préparatifs avec un attendri
amusement.
    — Comte ! cria La Surie, vous ressemblez à un
capitaine qui va se soumettre à l’inspection du colonel général !
    — Mais c’est qu’il y a de cela ! dit mon père avec
un petit rire. Et je gage que malgré tous ces soins, Madame de Guise, semblable
au colonel général, trouvera encore quelque chose à blâmer, soit dans
l’équipage, soit dans le capitaine.
    — Ah Monsieur mon père ! criai-je en me
retournant, le pied déjà sur le marchepied, de grâce, n’ajoutez rien :
vous allez me terroriser !
    — Allons, courage, mon fils, courage ! dit mon
père en riant de plus belle.
    Il ne se trompait pas.
    — Le carrosse n’est point mal, assurément, dit Madame
de Guise, qui du haut d’une fenêtre de l’étage noble de son hôtel m’avait vu
entrer dans sa cour, mais il vous faudrait, en plus de vos Suisses, trois
cavaliers, l’un pour trotter devant votre carrosse, et les deux autres pour le
suivre.
    — Et quel serait leur rollet, Madame ? dis-je en
lui baisant la main et en lui faisant à la volée sur ses yeux bleu pervenche un
petit compliment.
    — Mais voyons ! Ils vous feraient honneur, c’est
tout. Quand donc saurez-vous tenir votre rang ? Il faudrait, bien sûr, que
les cavaliers soient de bonne

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