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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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première,
donnant ainsi plus de force à l’affirmative. Il faut donc traduire haec
omnia nec inscio par je sais tout cela, ou mieux encore je
n’ignore rien de tout cela.
    J’adhérai tout de gob à cette vérité-là. Car d’où venait à
Héroard cette connaissance affirmée avec tant de certaineté, sinon de Madame du
Bellier ? Et qui pouvait douter que l’accorte dame – qui connaissait
bien son affaire pour avoir eu deux maris devant l’autel de Dieu, sans compter
d’autres compagnons après son deuxième veuvage – n’ait été très attentive
de l’œil et de l’ouïe, au cours de sa longue veille ?
    Louis se réveilla à neuf heures, et tandis qu’Héroard lui
prenait le pouls, je scrutai à la dérobée son visage. J’y discernai quelque
lassitude, mais je n’y lus, en revanche, ni joie ni tristesse. Il est vrai que
le roi, de longue date, commandait tout à plein son visage. Il avait payé fort
cher ce talent, ayant appris à dissimuler sous la régence afin de parer à
l’espionnage continuel dont il était l’objet.
    Après son déjeuner, je le suivis à la chapelle de la Tour où
il ouït la messe, puis au cabinet aux livres où il tint Conseil, puis derechef
chez lui où il dîna. Il conserva tout ce temps une face imperscrutable. Cette
matinée avait été pour moi monotone et coutumière, mais mon intérêt tout
soudain s’éveilla quand Louis annonça tout soudain qu’il allait voir la reine.
    Anne ne trompa pas mon attente. Je la trouvai rose,
frémissante, et comme fiérotte d’être femme, mais ayant en même temps perdu, en
une seule nuit, sa hauteur espagnole. Les deux jeunes époux, qui étaient en ce
clair matin de janvier fort plaisants à voir, conversèrent debout, comme il
était de règle mais, se peut, un peu plus proches l’un de l’autre qu’à
l’accoutumée. À plusieurs reprises, Anne esquissa un geste de la main à
l’adresse de son mari. Il me sembla qu’elle avait le désir de toucher le roi,
mais qu’elle le brida, se demandant si l’étiquette le lui permettait. Je ne pus
voir le visage de Louis, car il me tournait le dos. Il parlait peu, et de
choses indifférentes. J’eusse été déçu assez, m’attendant à plus de chaleur,
si, jetant un œil à la dérobée à ma montre-horloge, je ne m’étais avisé d’une
circonstance qui me rasséréna : l’entrevue qui, avant le vingt-cinq
janvier, occupait dix minutes du temps de Sa Majesté, durait déjà depuis une
demi-heure.
    Je fus, en revanche, surpris que Louis, le soir venu, se mit
au lit si tôt et chez lui. À dix heures et demie, il dormait à poings fermés.
Comme il avait fait des armes une partie de l’après-midi, ne pouvant chasser en
raison du temps qui n’était que glace et bise, je m’apensais que la lassitude
l’avait ensommeillé si vite que, se réveillant au milieu de la nuit, il
penserait, se peut, à sa reine. Il n’en fut rien. Il dormit onze heures file à
file.
    Le lendemain, il alla deux fois chez la reine : la
première fois après le dîner, et assez brièvement. La seconde après son souper,
et cette visite-là dura près d’une heure, ce qui me fit plaisir, encore que je m’ennuyasse
fort, debout et pour me défatiguer, accoté contre la muraille, comme les dames
qui étaient là : Madame de Luynes, Madame de Verneuil, et ma demi-sœur, la
princesse de Conti – celle que, non sans raison, le roi appelait « le
péché ».
    Ledit « péché » me sourit, et tout peccamineux
qu’il fût, je répondis à ce sourire en tâchant de me persuader qu’il était
fraternel. La princesse avait alors trente ans et jetait à l’alentour tous ses
feux, jugeant qu’ils étaient les derniers. Ma bonne marraine disait qu’elle
lançait ses hameçons à tout ce qui portait haut-de-chausses à la Cour, y
compris à ses frères, notamment au prince de Joinville (le plus beau de tous,
lequel était, meshui, duc de Chevreuse) et à l’archevêque de Reims avec qui je
l’ai vu coqueter comme s’ils étaient amants. Toutefois, il n’en était rien.
L’archevêque n’aurait voulu pour un empire déplaire à sa Charlotte des Essarts
qu’il enfermait en son palais épiscopal et dont il était toujours aussi
raffolé.
    La longueur de cet entretien de Louis avec la reine me donna
de l’espoir pour la nuit. Mais je ne pus demeurer avec lui jusqu’à son coucher,
la duchesse de Guise m’ayant prié à souper, prière qui était un ordre, comme
sait bien le

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