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Les sorciers du ciel

Les sorciers du ciel

Titel: Les sorciers du ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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C’était diabolique…
    *
    Neue-Brem « prépare » donc – par un entraînement de chaque instant – ses hôtes à devenir de parfaits déportés. Les Juifs et les prêtres sont évidemment « privilégiés ».
    « — Les Juifs (41) , hors des rangs   ! » Ils sont quatre dans notre convoi et les quatre mourront   : deux jeunes gens, un homme mûr, un vieillard. C’est un monstre qui commande, un S.S. dont la figure tient à la fois du dogue et de l’hippopotame. À le voir s’agiter on pense à un acteur de cinéma qui jouerait un rôle de fou sadique. Les quatre Israélites sont roués de coups sous nos yeux et restent sans connaissance. «  Priester Wie Juden   !  » (Les prêtres comme les Juifs.) Le R.P. de Jabrun (42) , de la Compagnie de Jésus, âgé d’une soixantaine d’années qui faisait partie d’un groupe bordelais de Résistance et l’abbé François Basset, premier vicaire de Saint-Étienne-du-Mont sont conduits sur la piste. Ils sont en soutane. Dès qu’il les voit, le monstrueux S.S. est pris d’une rage frénétique. Il les fait courir et les suit en les frappant de toutes ses forces, puis il les fait sauter, les mains croisés derrière le dos, de plus en plus vite autour de la mare, jusqu’à ce qu’ils tombent, brisés, évanouis. Je me détourne, ne pouvant plus supporter la vue de ces prêtres roulés dans la boue et sanglants.
    *
    Le père Jacques – robe de bure, lunettes cerclées d’acier posées sur un nez long, fort, arqué – inaugurera en arrivant à Neue-Brem le nouveau numéro de « cirque » que le nouveau Monsieur Loyal (le lieutenant Schmoll toujours accompagné de son clown blanc Hornetz) vient d’inscrire à son nouveau programme   :
    — Le (43) Père dut, des heures entières, avec une poutre de cinq à six mètres sur l’épaule, se promener sur des murets séparant les piscines et… souvent cette promenade il devait la faire nu.
    Mais un « je ne sais quoi » se dégage des yeux, du visage, des mains, du corps amaigri de ce « pantin nu » . Schmoll et Hornetz baissent la tête.
    Un autre jour, par dérision, Hornetz commande au Père de diriger la procession autour du sinistre bassin. Les anciens, qui marchent depuis plus d’un mois, traînent la jambe. Le père Jacques se met au pas des plus faibles.
    — De temps (44) en temps, il se retournait pour voir s’ils suivaient, et ce regard de bonté les encourageait dans cet enfer de brutalités… Je travaillais moi-même dans une annexe de la cuisine, donnant sur la cour, à laver les bouteillons où l’on mettait la soupe. Souvent, je levais les yeux sur la cour. Bientôt, je sentis que Hornetz était subjugué par la dignité du Père   ; cela se voyait dans son regard. Comme je le comprends   ! Jamais, je crois, le père Jacques ne m’a paru si grand que ce jour-là…
    Le père Jacques a toujours conquis, étonné ceux qui l’ont connu (45) . C’est dans son collège d’Avon, ce collège qu’il avait « fabriqué » (ne disait-on pas   : « Ici il y a l’eau, le gaz, l’électricité, le père Jacques à tous les étages »), qu’il fut arrêté le 15 janvier 1944. Le père Jacques avait accepté que des familles lui confient des enfants juifs et il cachait des réfractaires au S.T.O.
    Korff, le chef régional de la Gestapo fait rassembler tous les élèves dans la cour, sous les tilleuls   ; trois jeunes Juifs, un réfractaire sont arrêtés. Là-haut, sous la soupente de l’infirmerie, un autre Juif, Maurice, se terre. Il sera seul épargné. Korff, dans la cour demande   :
    — Y a-t-il encore des Juifs parmi vous   ?
    — Non   ! répondent les élèves.
    Germain, un élève de seconde ajoute   :
    — Ce sont nos camarades comme les autres.
    Korff furieux   :
    — Vous n’êtes pas camarade avec un nègre, vous n’êtes pas camarade avec un juif…
    Le père Jacques, suivi de deux Allemands, s’avance tranquillement, une valise à la main, son béret brun sur la tête. Souriant, radieux, il regarde les enfants et leur crie joyeusement   :
    — Au revoir   ! À bientôt   !
    — Au revoir mon Père   ! répondent d’un seul cri, élèves et professeurs et, spontanément, tous se mettent à applaudir frénétiquement.
    Korff hurle.
    — Taisez-vous   ! Taisez-vous   ! Silence   !
    Le petit chien jaune de Korff se promène dans les rangs des élèves   ; l’un d’eux lui décoche un coup de pied. Le chef de la Gestapo bondit sur

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