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Les spectres de l'honneur

Les spectres de l'honneur

Titel: Les spectres de l'honneur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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vaincus restait la négociation. Ils ne pouvaient ignorer qu’elle passait par le sacrifice de Pèdre.
    Le samedi 17 mars dans la matinée, un chevaucheur qui s’apprêtait à partir pour Villanueva 93 , près d’Alcaraz, donna l’alarme. L’on vit trois hommes à cheval, sortis presque subrepticement du château, emprunter le sentier que Tristan et ses deux compères avaient gravi puis descendu la veille. Henri se frotta les mains :
    – C’est la reddition, messires, dit-il en s’adressant particulièrement aux Français qui l’avaient accompagné dans une inspection des murets et fossés de contrevallation.
    Les inconnus étaient armés de toutes pièces. Leur chevaux, apparemment, seraient bientôt fortraits par absence de nourriture. Ces ambassadeurs avaient jeûné depuis la bataille : ils branlaient un peu trop sur leur selle tout en poignant fermement, eux aussi, les bannières de Castille, León, et leur chef la sienne propre, lacérée par quelques coups d’épée.
    Henri fronça les sourcils :
    –  En campo de gules, très paneles de plata bien ordenadas.
    –  Trois cœurs d’argent, dit Guesclin, sur fond de gueules. Au moins, il n’en manque point !… Qui est-ce ?
    –  Escudos de los Hurtados, dit Henri. Villaraz de Hurtados… Une famille de Cuenca moult liée à la cité de Alarcôn. C’est le fils d’Hurtados dont le père est mort. Lui, au moins, avait fait le bon choix… C’est pourquoi, s’il est en mon pouvoir, je pardonnerai au fils.
    – Pour la sécurité de ta personne et de ton règne, dit Guesclin, il te faut tous les occire… et tu leur demanderas de quitter leurs braies afin de reconnaître les Juifs !… Je me les réserve !
    – Mon règne ne s’ouvrira pas dans le sang. Pas même celui des Juifs !
    – Alors, dit le Breton, pourquoi fais-tu la guerre si c’est pour ressembler à ton bâtard de frère ?
    Un autre jour que celui-ci, cette familiarité soudaine, malséante, n’eût point affecté Don Henri. Mais il avait devant lui trois Espagnols qui avaient souffert de leur fidélité à Pèdre et qui, sans doute, lui étaient toujours attachés. Cette féauté ne pouvait que l’émouvoir, lui dont son propre frère, Tello, avait agi à Nâjera comme un traître.
    L’ambassaderie mit pied à terre. On offrit aux trois hommes un gobelet de vin qu’ils burent avec la religiosité d’un vin de messe. Dès que de son index il eut séché ses lèvres, le fils d’Hurtados se montra franc et bref :
    –  Señores, messires, dit-il, s’adressant à tous volontairement, sans crainte d’offenser Henri, le commandeur Garci Moran m’envoie pour vous offrir de rendre la place si, dans un délai d’un mois, le roi Don Pèdre ne se présente pas céans avec des forces suffisantes pour vous contraindre à renoncer à votre entreprise.
    Guesclin s’ébaudit le premier, entraînant dans sa jubilation furibonde le prétendant, ses ricos hombres et les Français parmi lesquels Villaines, Kerlouet, Roquebertin et les Mauny.
    – Pèdre est là-haut, dit Kerlouet. Nous le savons tout comme toi, Pedrezil !
    Le jeune Villaraz de Hurtados reçut ce coup de caveçon sans broncher alors que ses compagnons exprimaient par un «  Oh ! » une réprobation qui se justifiait.
    – Voilà bien les propos d’un Breton, releva Paindorge.
    – Va te faire lanlaire, écuyer, dit Kerlouet. Henri ne me reprend pas, lui !
    Encore une familiarité qui cinglait le prétendant au visage. Il se contint : il avait engagé à sa solde la sentine des armées françaises ; il en avait pour sa maine de fèves 94 .
    – Tais-toi, malebouche ! intima Villaines. Ce que je dis, m… m… moi, c’est que… que jamais Pèdre ne pou… pourra s’ouvrir un pas… pas… sage l’épée en main et qu’il ne ne passerait même pas s’il de… de… devenait puceron ou ver de terre.
    – C’est vrai, dit Henri en s’approchant du jeune Villaraz. Mon frère bâtard ne trompera jamais la vigilance de mes hommes. Jour et nuit, ils veillent et savent qu’ils mourraient en cas de défaillance… Remontez. Dites à tous que j’accepte que tous ceux qui sont auprès de vous, mon bâtard excepté, abandonnent le castillo à condition qu’ils promettent de se ranger à leur devoir en se plaçant sous mon obédience.
    – Dix jours avant que le gouverneur rende la place ? proposa un des ambassadeurs, le plus âgé, qui souffrait, visiblement, d’une navrure à

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