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Les spectres de l'honneur

Les spectres de l'honneur

Titel: Les spectres de l'honneur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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redoutables.
    – J’aurais dû le désarmer ! s’écria Villaines.
    Derrière lui, Raoul Elme et Jacques Rollans tentaient de se frayer un passage pour secourir leur roi de leurs mains nues. Ils furent, chacun, happé par dix paires de bras et entraînés hors de la maison. Tristan entendit leurs cris. Aucun doute : ils mouraient frappés par dix poignards et sans doute les guisarmes des gardes.
    Guesclin apparut. Il avait dû enjamber les deux corps. Il précédait Olivier de Mauny, puis Henri et Alain ses frères. Guillaume Boitel et quelques autres les suivaient, parmi lesquels l’écuyer de Don Henri : Fernando Perez de Andrada. Tous se tinrent le dos contre le mur afin de ne point gêner les deux frères liés l’un à l’autre par un bras cependant qu’ils tentaient de se porter l’estocade.
    – Franc jeu ! s’écria Olivier de Mauny.
    Pour lui, peu importait qui serait le vainqueur. Guesclin protesta :
    – Laisserez-vous occire Henri en telle vilenie ? Le laisserez-vous occire par un faux traître, renié, parjure ? Il ne fit jamais le bien un seul jour de sa vie !
    Le Breton pouvait parler de parjure ! Il ne devait plus savoir le nombre de fois où il s’était parjuré. Il se tourna vers le bâtard d’Asnière qui était de ses familiers :
    – Il faut aider Henri. Vous le pouvez bien faire… Ils tombent !… Relevez Henri !
    – Faites-le vous même ! Ils se battent loyalement.
    Noués l’un à l’autre, les deux rois s’étaient abattus sur le lit qu’ils venaient de renverser, entraînant dans leur chute quantité d’escabelles, armes, étoffes disposées à proximité. Pèdre, visiblement, dominait son frère. En quelques coups de reins vigoureux, il fut sur Henri, lequel venait de lâcher son poignard. Afin de l’étrangler – acte dont il avait sûrement rêvé pendant des années -, il lâcha son perce-mailles au moment où Henri recouvrait l’usage du sien.
    Tristan vit Roquebertin s’approcher. Le bâtard d’Asnières, au risque d’être blessé, voulut séparer les deux hommes :
    – Levez-vous de là !… Ôtez-vous ! Vous en avez fait assez !
    De son bras, il écarta Roquebertin pour laisser à chacun des frères sa chance. Alors Guesclin se mit à la besogne : il renversa précipitamment Pèdre sur le côté de façon que son bâtard le dominât. Le poignard s’abattit sur les anneaux du haubergeon. Ceux-ci se démaillèrent. Pèdre lâcha prise, ce que voyant, les capitaines bondirent sur lui, chacun voulant y aller de son coup de dague, de perce-mailles et même d’épée, cependant que Guesclin reculait d’un pas pour contempler le roi défunt dans son sang et congratuler Henri pour sa victoire. Et comme Tristan crachait, écœuré, le Breton fut sur lui, écumant de joie et de male rage :
    – Je ne fais ni ne défais des rois, mais je sers mon seigneur !
    Quand tous les victimaires furent rassasiés de coups et d’insultes, Henri leur enjoignit de s’éloigner. Il se baissa vers le corps de Pèdre.
    Soudain, il se mit à trancher le cou du trépassé avec un acharnement qui provoqua la fureur de Castro et de Senabria, qu’on dut ceinturer mais que, repu par cette occision déloyale et cette décollation farouche, nul ne voulut meurtrir.
    Henri s’acharnait, les mains rouges. Un grondement sortit de ses lèvres retroussées quand les vertèbres de son soi-disant bâtard le contraignirent à émousser son poignard. Alors, prenant le funèbre objet par les cheveux, il le montra, nouveau Persée, à l’assistance qui recula, les yeux levés pour ne pas voir ni le corps à demi décapité ni le sang qui empouacrait les semelles.
    – Roquebertin !… Achevez la besogne. Vous alliez saisir le pied de Pèdre quand Bertrand vous a devancé.
    – Oui, monseigneur.
    – Quand vous l’aurez tranchée, mettez cette tête au bout d’un épieu et courez la porter à Séville.
    – Et le reste, monseigneur ?
    – Expose-le, Andrada, entre deux planches à la porte du château.
    Henri avait les mains rouges. Il en était ganté jusqu’aux poignets. Sa cotte d’armes s’était imprégnée de sang. Les trois tours de la Castille en étaient criblées. Il se pencha sur le corps de son frère.
    – Tiens, dit-il, il portait une croisette… En le décapitant j’ai coupé le cordon.
    Il donna quelques coups de pied dans le corps dont le sang aspergea ses heuses. Un écuyer du nom de Lucas s’approcha et cracha sur la dépouille

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