Les templiers
même de trois, Thomas Béraud, Guillaume de Beaujeu et Jacques de Molay, s’ils avaient pratiqué les sacrilèges dont ils furent accusés ? Pouvons-nous penser un seul moment qu’Amaury de la Roche, ami de saint Louis, ait pu fauter lui-même ou même tolérer quoi que ce soit contre la Règle ?
Les Templiers sont abandonnés dans leur mission de défendre les lieux saints. S’ils crachaient, ce n’était pas sur le Christ, mais sur la trahison de Rome et l’indifférence totale de l’Église. Furent-ils infidèles à Dieu ? Non. Fidèles à Notre Dame, ils ne peuvent être à l’origine d’une déchéance de leur foi.
CHAPITRE XVII La fin du royaume
T HOMAS Béraud mourut le 25 mars 1273. Il fut remplacé le 13 mai suivant par Guillaume de Beaujeu. Son magistère est plus connu grâce à la «Chronique du Templier de Tyr ». Il s’agit des mémoires de Gérard de Montréal, secrétaire de Guillaume de Beaujeu en 1285, et qui n’était pas frère du Temple. L’auteur connaissait l’arabe et son rôle peut-être identifié à celui d’écrivain sarrasinois, fonction attachée directement aux Maîtres. Nous lui devons de précieux renseignements sur l’Ordre pendant les vingt dernières années du royaume.
À partir de 1273, à la suite des campagnes de Bey- bars, la terre chrétienne était réduite aux villes d’Acre, de Tripoli, de Baruth et de Tortose, aux châteaux templiers de Château-Pèlerin et de Sayète, à Margat, forteresse des Hospitaliers, et à Montfort appartenant aux teutoniques.
L’enchevêtrement politique durant la fin de la domination franque en Syrie est très compliqué. Les générations se succèdent, vite ruinées et sans avoir le temps de subir un affaiblissement de sang. Il y avait toujours deux candidats au trône de Jérusalem. Marie, petite-fille d’Amaury de Lusignan et d’Isabelle de Jérusalem réclama la couronne au concile de Lyon en 1275, et la céda à Charles d’Anjou, frère de Saint Louis, comte de Provence et roi de Sicile.
Guillaume de Beaujeu et les Templiers, connaissant l’incapacité des Lusignan, rois de Chypre, soutinrent le parti de Charles. Le Maître du Temple n’était pas sans se rappeler l’égarement du nouveau roi lors de la croisade de Tunisie. Cependant, il le savait énergique et ambitieux. Il pouvait faire beaucoup pour la Terre Sainte, ses propres intérêts étant en jeu.
Le roi de Sicile était trop occupé dans son île pour se soucier de la bande de terre de Syrie. Guillaume de Beaujeu, devant ce désintéressement total, se tourna vers Henri II de Chypre, en 1285.
La Méditerranée orientale était devenue un véritable terrain de chasse. Les Génois, rejetés hors d’Acre, s’étaient réfugiés à Tyr et faisaient la course aux Vénitiens et aux Pisans. Alexandrie était maintenant le grand port de commerce entre les Indes et l’Occident. Guillaume de Beaujeu, malgré une alliance avec les Génois, préserva le plus possible la neutralité de l’Ordre. Cependant, il avait eu la faiblesse, au début de sa maîtrise, de soutenir les seigneurs de Giblet, dont le chef, Guy II, était confrère du Temple ; cela le conduisit à combattre Bohémond VII d’Antioche. Le résultat en fut le pillage de la maison du Temple de Tripoli par les sergents du comte en 1275.
À la demande de Guy, le Maître du Temple amena des troupes à Giblet ; en union avec le seigneur du lieu, il s’avança jusqu’à Tripoli et détruisit le château de Boutron. Guillaume de Beaujeu retourna à Acre, laissant quelques chevaliers à Giblet. Mais le comte de Tripoli se dirigea vers la ville avec une grande troupe. Guy de Giblet se porta à sa rencontre et lui infligea un sérieux et sanglant échec. À la suite de cet événement, une trêve d’un an fut conclue.
En 1279, un an après la signature de la trêve, les deux partis remirent l’affaire en jeu. Le château de Nephin fut assiégé par les Templiers et le seigneur de Giblet. Une nouvelle bataille éclata entre les deux antagonistes. Le comte de Tripoli la perdit. Le 18 juillet 1279, il se résigna, par l’intermédiaire de Nicolas de Lorgne, nouveau Maître de l’Hôpital, à conclure la paix avec les Templiers.
Paix plus apparente que réelle, puisque le 12 janvier 1282 Guy de Giblet, excité par le Temple, se lançait sur Tripoli, après deux tentatives infructueuses.
Pendant ce temps, ce qui restait du royaume s’amenuisait encore, jusqu’en 1285
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