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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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charnel qui les prenait.
    — Le littoral est en vue, capitaine.
    Le timbre agacé de Levasseur ramena Forbin à son commandement.
    — Je vous rejoins, assura-t-il d’une voix forte.
    Il remit son épée au fourreau, quitta son siège et s’approcha de Mary.
    — Rajustez-vous, madame.
    Les doigts tremblants de Mary rattachèrent ses lacets. Claude de Forbin se pencha au-dessus d’elle et lui glissa à l’oreille :
    — Nul n’est au courant, à part Corneille et moi. Vous avez eu raison de fuir en vous voyant démasquée. Soyez sans crainte, madame de Mortefontaine, M. de Pontchartrain vous saura gré de votre pugnacité.
    L’étonnement de Mary se perdit dans le baiser dont Forbin effleura ses lèvres avant de sortir, la laissant étourdie comme elle ne l’avait jamais été. Elle se ressaisit pourtant et envisagea la situation telle qu’elle se présentait, se demandant ce qu’Emma aurait fait en pareil cas. Elle sourit. Certainement accepter d’être ce que Claude de Forbin voulait qu’elle soit ! Elle avait tout à y gagner. Quant à Emma, Mary était certaine qu’elle le comprendrait.
    Elle ramassa son bien sur le bureau et le remit à sa place. Ensuite, elle sortit de la cabine et, pour ne pas gêner les matelots, vint s’accouder au bastingage, les yeux rivés sur les nombreux moutons qui couraient sur les flots bercés par une jolie brise. Les côtes françaises approchaient lentement et Mary reporta son attention sur les manœuvres de la frégate, sans rien en retenir d’autre qu’une belle image de marins affairés dans la mâture et sur les différents ponts.
    Sitôt le goulet fortifié passé, Brest apparut, cerné de murailles. La rade était encombrée de navires de tout tonnage. La Perle cingla jusqu’à l’arsenal où les vaisseaux de guerre de la marine française étaient fabriqués, armés, réparés et entretenus.
    Outre La Perle, l’escadre de Forbin comprenait deux autres navires qui, à son exemple, vinrent s’y amarrer. Claude de Forbin revenait d’une campagne de deux mois en mer. Il s’accordait deux semaines au port pour ravitailler.
    Tandis que des hommes à quai récupéraient les amarres lancées depuis le bord, Mary chercha la silhouette de Forbin au milieu des autres officiers debout sur la dunette, tricornes sur leurs perruques bouclées, engoncés dans leurs costumes bleu roi coupés à l’identique.
    Forbin, quant à lui, ne respectait aucune mode depuis qu’il était revenu du royaume du Siam en sa qualité d’ambassadeur. Il en avait gardé un goût prononcé pour l’excentricité vestimentaire qui seyait bien à son caractère de Méridional, emporté et épicurien. Il arborait donc avec fierté un habit couvert de broderies aux couleurs agressives où dominaient le drap garance et l’amarante. Sa ceinture s’ornait d’un kriss malais d’un côté, d’une épée de l’autre. Son chapeau en pain de sucre débordait de plumes. Le cuir de ses cuissardes s’effaçait sous l’or et le cuivre de ses boucles. Il se moquait bien que ses détracteurs s’en amusent. Claude de Forbin était apprécié auprès de son ministre et de son roi pour son charisme, ses qualités maritimes tout autant que son franc-parler.
    Mary s’attarda longuement sur son profil volontaire, s’étonnant de cette sérénité qui lui collait aux traits. Brusquement, son désir de regagner l’Angleterre lui sembla moins présent.
    Qu’allait-elle y faire sinon vivre dans l’ombre d’Emma quand elle pouvait tout autant désormais, grâce à son exemple et à ses enseignements, gagner sa propre liberté ?
    « Claude de Forbin, se dit-elle, je crois bien que tu me plais. »
     
    — Viens, petit ! ordonna la voix grave de Corneille l’interrompant dans ses nouvelles résolutions.
    Mary lui emboîta le pas sans discuter. Ils franchirent la passerelle, abandonnant Forbin et ses officiers à leurs obligations de rapports et de contrôles.
    Mary ne demanda rien, confiante en l’idée que Corneille obéissait aux ordres de son capitaine. Elle le suivit sans hésiter au long des ruelles qui, s’éloignant de l’arsenal, remontaient vers le cœur de Brest.
    Corneille marchait vite, le pas sûr, lui racontant qu’il était né dans cette ville où le commerce maritime tenait la plus grande place.
    — Seul Toulon peut se prévaloir d’un arsenal comme le nôtre, lui expliqua-t-il après lui avoir fait l’inventaire de toutes les modifications que M. de Vauban

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