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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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à ses pieds. Les lèvres de Forbin suivirent et réinventèrent ce corps de femme qui se cambrait pour mieux s’offrir. Il se redressa comme le plaisir la submergeait, l’abandonnant frustrée d’une caresse inachevée.
    Tournant les talons sans un mot, il la planta là, au bord des larmes. La porte se referma doucement et son pas se perdit dans l’escalier. Quelques minutes plus tard, rhabillée et désemparée, Mary se demanda si elle n’avait pas seulement rêvé.
    Mary prit le temps de se détendre assez pour faire bonne figure, puis inspira une large goulée d’air. Lissant ses mains moites sur la cotonnade de sa robe, elle descendit l’escalier en souriant comme si de rien n’était.
    Dans la salle à manger, le couvert avait été dressé sur une table nappée de blanc. Les chandelles répandaient une douce clarté. Les volets avaient été rabattus, et le parfum des mets en attente dans la cuisine lui donna à penser que Perrine s’était surpassée tandis qu’elle paressait. Forbin l’attendait, nonchalamment assis dans un fauteuil devant la cheminée crépitante, une pipe fumante aux lèvres.
    — Avez-vous un prénom, madame de Mortefontaine ? demanda-t-il en souriant comme elle se plantait devant lui, puisant dans ses retranchements les plus intimes une feinte assurance.
    — Emma.
    — Vous me troublez, Emma. Infiniment, affirma-t-il entre deux bouffées.
    — Vous aussi, capitaine, répondit Mary en se rapprochant des flammes pour y tendre ses mains glacées.
    Eviter de le regarder l’aidait à garder le contrôle de ses sens exacerbés.
    — Pourquoi avoir écrit cette lettre puisque vous aviez l’intention de gagner la France pour y donner votre rapport ? demanda Forbin abruptement.
    — Par mesure de prudence. Si l’on m’avait interceptée, je me serais arrangée pour la faire envoyer.
    — Interceptée, vous n’en auriez pas eu le temps.
    — Je suis assez maligne pour ne pas me laisser prendre ! nargua Mary en lui faisant face.
    Cet interrogatoire l’agaçait. Elle n’avait pas envie de lui mentir, et tout à la fois accepter l’identité d’une autre la plaçait dans une estime que Mary Read n’était pas certaine d’obtenir.
    — Je vous ai bien prise, moi ! s’amusa Forbin.
    Mary s’enflamma :
    — Pas encore, capitaine.
    — Ne jouez pas sur les mots, Emma. Ce n’est qu’une question de temps et vous le savez. J’aime comprendre. Or quelque chose dans tout ceci m’échappe. Vous n’usez pas des habitudes des espions.
    Mary lui sourit et le provoqua de nouveau, cynique :
    — Vous targueriez-vous de tout connaître, monsieur de Forbin ? Ce serait bien prétentieux !
     
    Il éclata de ce rire qui la désarmait. Mary se laissa choir avec élégance dans le fauteuil et plaça ses avant-bras sur les accoudoirs pour se retenir de le gifler ou de l’étreindre. En cet instant, elle ne savait plus. Forbin était déroutant, charmeur, piquant, sensuel et… A quoi bon chercher des excuses à sa faiblesse ? Elle sentait bien que cet homme serait d’importance dans sa vie, tout comme Emma. Il avait beaucoup à lui enseigner. Et Mary avait soif d’apprendre, comprenant qu’elle ne pourrait s’élever qu’à ce prix.
    A moins, comme Emma, d’épouser un gentilhomme qui l’anoblirait.
    Inconscient de son calcul, Forbin s’apaisa et s’excusa :
    — Pardonnez-moi, Emma. Je suis un malappris. J’ai pour ma défense un sang noble que trop de mauvaise fortune a rendu impétueux et ironique. J’ai grandi déchu de mes droits, et ce que je suis devenu, c’est à la seule force de ma détermination et de mon instinct que je le dois. Si j’en juge par votre habileté à porter habits aussi différents, je ne suis pas loin de croire que vous êtes, chère amie, aussi mordante, vive et libertine que je le suis…
    — Je ne vous permets… commença-t-elle pour la forme seulement, car il lui plaisait infiniment qu’il eût raison, et que cette amorce de confidence confortât sa détermination.
    — Allons, Emma, insista Forbin en jouant d’une main le avec le fourneau de sa pipe qui s’éteignait. Je ne suis pas sot. Les espions ou espionnes sont souvent des intrigants, des opportunistes placés par les grands là où leur talent s’utilise le mieux. Et vous en possédez, très chère, pour, contrefaire par moments l’ingénue touchante que jepeux voir en ma demeure.
    Mary ne put s’empêcher de s’en sentir flattée. Elle n’était ni ce

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