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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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sérénité.
    Elle ne voulait pas se satisfaire de cette théorie navale qu’elle avait ingurgitée avidement. Elle voulait sentir, goûter au vent, aux embruns. Non plus comme une passagère indésirable et gênante, mais comme une part de ce navire que Forbin aimait. Elle n’avait pas besoin de tricher. Elle s’était attachée autant au capitaine qu’à son métier. Espérant en secret prouver au premier que l’amour et la mer pouvaient fort bien s’accommoder. Au terme de cette croisière prévue pour un mois, elle était certaine que son capitaine, la voyant ainsi vibrer, lui demanderait de l’épouser.
    Deux semaines plus tard, poussée par un bon frais de force six, La Perle filait douze nœuds, son étrave fendant les crêtes d’écume immaculée. Les embruns fouettaient le visage de Mary. Elle inspira une large goulée. Depuis quatre heures, ils suivaient la route d’un navire hollandais que Forbin devinait chargé d’épices.
    Corneille savait d’instinct qu’il faudrait l’aborder. Qu’il ne se rendrait pas sans combattre. Forbin lui avait demandé de mettre Mary à l’abri le moment venu. Il ne l’estimait pas prête à affronter la violence d’un abordage. Leur petite escarmouche de salon n’avait duré que parce qu’il s’était appliqué à ne pas la blesser. Face à des bretteurs avertis, Mary n’avait aucune chance de survivre. Il ne voulait pas la perdre, bien qu’il se plût à l’ignorer sur le navire pour ne pas trahir les sentiments et le désir qu’elle lui inspirait.
    Mary circulait dans la mâture comme si elle y était née ; Corneille lui avait aussi appris à faire toutes sortes de nœuds aux noms étranges et amusants : nœuds de vache, de bec d’oiseau, de jambe de chien, de chaise de calfat, de grappin, de pêcheur, d’écoute… Nul n’aurait pu reconnaître en elle le clandestin malhabile qu’ils avaient capturé sur le marchand anglais. Forbin avait beau s’en défendre, son attachement se doublait d’une admiration qui ne cessait de grandir. Jamais il n’aurait pensé qu’une telle personne puisse exister. Et Corneille se rangeait sans peine à son idée.
    Ayant enfin rattrapé sa proie, La Perle lança ses sommations d’usage. Le navire hollandais ne voulut rien entendre et se mit à canonner. L’escadre de Forbin l’enserra en tenaille et La Perle riposta d’un feu nourri de boulets. Lorsque les mats de misaine et d’artimon tombèrent sur le hollandais, la frégate française prit le travers et lança ses grappins, malgré le tir nourri des mousquets. Le hollandais avait engagé des mercenaires pour le protéger.
    Corneille entraîna Mary vers la dunette.
    — Où allons-nous ? demanda-t-elle dans le fracas guerrier.
    Autour d’eux, les marins s’activaient déjà pour le combat.
    — Dans sa cabine, tu y resteras cachée.
    Mary s’immobilisa et Corneille dut forcer son avant-bras pour l’entraîner. Elle était furieuse et tout à la fois soulagée de n’avoir pas à combattre. Corneille referma la porte sur eux.
    — Tu n’es pas prête. Personne ne l’est jamais.
    — Je sais, répondit-elle. Va. Ne t’inquiète pas pour moi.
    Corneille sortit, boucla la porte, ainsi que Forbin le lui avait ordonné, et se lança à l’assaut du navire que la marine française malmenait.
    Mary demeura là dans une angoisse grandissante. Le navire tanguait, subissant les contrecoups de la bataille qui animait le pont du hollandais.
    Elle imaginait le pire sans pouvoir seulement le vérifier. Et cela lui coûta davantage qu’elle ne l’aurait pensé. Elle avait espéré que Forbin lui-même viendrait la délivrer. Ce fut Corneille qui reparut. Elle trembla de le découvrir taché de sang, le visage rougi et les cheveux décoiffés.
    — Nous en sommes maîtres, dit-il en souriant. Tout danger est écarté. Tu peux sortir. Discrètement.
    — Et lui ? demanda Mary.
    — Il négocie avec le capitaine hollandais. Il semble que celui-ci ait quelques informations à nous livrer sur d’autres bâtiments qui pourraient nous intéresser. Forbin trouve toujours le moyen de les faire chanter, ajouta-t-il dans un sourire.
    Comme elle s’avançait, Corneille lui demanda de lever les bras au ciel. Intriguée, elle obéit. D’un geste vif, il essuya le plat de son épée sur le gilet trop propre de Mary.
    — Pour donner le change. Les marins n’aiment pas les planqués. Tu pourrais être sévèrement puni si cela se savait.
    Mary ne se sentit

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