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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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grande surprise, au lieu de voir un de ses dragons, il reconnut le colporteur.
    – Ah ! l’espion ! s’écria-t-il ; de par le ciel ! vous me poursuivez comme un spectre.
    – Capitaine Lawton, répondit Birch épuisé de fatigue, et s’appuyant sur la barricade qui bordait la pelouse du côté de la maison, je suis encore en votre pouvoir, car je n’ai ni la force de fuir, ni les moyens de résister.
    – La cause de l’Amérique m’est aussi chère que la vie, répliqua le capitaine ; mais elle ne peut exiger que je lui sacrifie l’honneur et la reconnaissance. Fuyez avant qu’aucun de mes dragons vous aperçoive, sans quoi il ne serait pas en mon pouvoir de vous sauver.
    – Que le ciel vous protège ! Puisse-t-il vous accorder la victoire sur vos ennemis ! s’écria Birch en lui serrant la main de manière à prouver que sa maigreur n’ôtait rien à sa force.
    – Un instant, dit Lawton ; un seul mot. Êtes-vous ce que vous paraissez être ? serait-il possible que vous fussiez…
    – Un espion de l’armée royale, répondit Birch en détournant la tête.
    – Pars donc, misérable ! s’écria le capitaine en le repoussant ; hâte-toi de fuir ! Une basse cupidité ou une fatale erreur a égaré une âme noble et généreuse.
    Les flammes qui dévoraient le bâtiment portaient la lumière jusqu’à une certaine distance autour de ce qui restait sur pied ; mais à peine Lawton avait-il prononcé ces paroles, que Harvey Birch avait disparu au milieu des ténèbres qui régnaient au-delà, et que le contraste rendait encore plus sombres.
    L’œil de Lawton s’arrêta un instant sur l’endroit où il venait de voir cet homme inexplicable. Prenant alors entre ses bras Sara encore évanouie, il la porta aussi facilement qu’un enfant endormi, et l’abandonna aux soins de sa famille.

CHAPITRE XXIII
    Et maintenant ses charmes se flétrissent rapidement ; la gaieté a fui loin d’elle. Hélas ! pourquoi la beauté ne peut-elle durer ! pourquoi de si douces fleurs se fanent-elles si vite ! Comme la vallée des années semble triste ! Quelle différence elle offre avec la scène trop flatteuse de la jeunesse ! Où sont allés ses admirateurs passionnés ? Ne s’en trouvera-t-il plus un en qui son cœur puisse avoir un appui ?
    Le Tombeau de Cinthie.
    Un torrent et un ouragan peuvent porter la désolation au milieu des plus belles scènes de la nature ; la guerre, avec sa main de fer, peut, de même que les éléments, accomplir une œuvre de destruction ; mais les passions seules peuvent bouleverser le cœur humain. Le torrent et l’ouragan sont bornés dans leurs ravages ; la terre, arrosée par le sang des combattants, semble vouloir indemniser les hommes de cette perte, en redoublant de fertilité ; mais le cœur peut essuyer des blessures que tous les efforts des mortels sont incapables de guérir.
    Depuis quelques années, le cœur de Sara était rempli de l’image de Wellmere ; elle ne pensait à lui qu’avec les idées naturelles à son sexe et à sa situation, et à l’instant où elle croyait voir se réaliser ce qui n’avait encore été pour elle qu’un rêve, quand le moment était arrivé où elle allait faire la démarche la plus importante de sa vie, avec cet empressement qui ne laisse dans le sein d’une femme d’autre passion que l’amour, la découverte du véritable caractère de son amant avait été un coup trop cruel pour que ses facultés eussent pu le supporter. On a déjà vu que lorsqu’elle avait repris l’usage de ses sens pour la première fois, elle semblait avoir oublié tout ce qui venait de se passer ; et en la recevant des bras du capitaine Lawton, ses parents ne retrouvèrent en elle que l’ombre de ce qu’elle avait été.
    De toute l’habitation de M. Wharton, il ne subsistait plus que les murs, et les murs, noircis par la fumée et dépouillés de tout ce qui en faisait l’ornement, semblaient de sombres vestiges de la paix et de la sécurité qui avaient régné si peu de temps auparavant dans l’intérieur de la maison. Le toit et les planchers de chaque étage étaient tombés jusque dans les caves, et ses débris brûlant encore jetaient une lueur pâle, tantôt plus faible, tantôt plus forte, qui, à travers les croisées, rendait visible tout ce qui se trouvait sur la pelouse. La fuite précipitée des Skinners avait permis aux dragons de sauver une grande partie du mobilier, qui, dispersé çà et là sur

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