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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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goutte. Que j’entende quelqu’un dire un mot contre vous ! Oui, Harvey, vous avez raison, je vous rendrai justice. Qu’importe que vous aimiez le roi ? J’ai entendu dire que c’est un brave homme au fond ; mais il n’y a pas de religion dans l’ancien pays, car chacun convient que ses ministres sont des diables incarnés.
    Le colporteur se promenait à grands pas dans une agitation inexprimable. Ses yeux avaient un air d’égarement que Katy n’y avait jamais aperçu, et sa démarche avait une dignité dont elle était presque effrayée.
    – Tandis qu’il a vécu, s’écria Harvey ne pouvant renfermer dans son cœur les sentiments qui l’agitaient, il existait quelqu’un qui lisait dans mon cœur ! Après mes courses secrètes et dangereuses, après avoir souffert des injures et des injustices, quelle consolation c’était pour moi à mon retour de recevoir ses éloges et sa bénédiction ! Mais il n’existe plus, ajouta-t-il en tournant ses yeux égarés vers un coin de la chambre, place ordinaire de son père ; et qui me rendra justice à présent ?
    – Harvey ! Harvey ! s’écria Katy d’un ton presque suppliant ; mais il ne l’écoutait pas. Cependant un sourire de satisfaction effleura ses traits décomposés, quand il ajouta :
    – Oui, il existe quelqu’un qui me la rendra, qui doit me connaître avant que je meure. Oh ! il est terrible de mourir et de laisser après soi une telle réputation !
    – Ne parlez pas de mort ici, Harvey ! s’écria Katy en jetant les yeux autour de la chambre et en ajoutant du bois au feu pour augmenter la clarté.
    Mais le moment d’effervescence était passé. Elle avait été occasionnée par le souvenir des événements de la veille et par la vive idée de ses souffrances. Les passions ne conservaient pas longtemps leur ascendant sur l’esprit d’Harvey ; et voyant que la nuit couvrait déjà de son ombre les objets extérieurs, il mit à la hâte sa balle sur ses épaules, et prenant la main de Katy affectueusement, il lui fit ses adieux en ces termes :
    – Il m’est pénible de me séparer même de vous, bonne femme ; mais l’heure est arrivée, et il faut que je parte. Je vous donne tous les meubles qui restent dans la maison ; ils ne peuvent plus me servir, et ils pourront vous être utiles. Adieu, nous nous reverrons un jour.
    – Oui, dans le royaume des ombres, dit une voix qui porta le désespoir dans l’âme du colporteur, et qui le fit retomber sur la caisse d’où il venait de se lever.
    – Quoi ! déjà une nouvelle balle ! ajouta la même voix, et bien remplie, sur ma foi !
    – N’avez-vous pas déjà fait assez de mal ? s’écria le colporteur retrouvant sa fermeté et se relevant avec énergie. N’est-ce pas assez pour vous d’avoir accéléré les derniers moments d’un vieillard mourant, de m’avoir ruiné ? que voulez-vous de plus ?
    – Ton sang, répondit le Skinner avec une méchanceté froide.
    – Et pour en recevoir le prix, dit Harvey avec amertume. Comme Juda, autrefois, vous voulez vous enrichir avec le prix du sang.
    – Et un joli prix, sur ma foi ! mon brave homme. Cinquante guinées ; presque le poids en or de ta carcasse.
    – Tenez, s’écria vivement Katy, voici quinze guinées. Ce lit, cette commode, ces chaises, tout le mobilier de cette maison est à moi, et je vous donne tout si vous accordez à Harvey une heure d’avance pour s’échapper.
    – Une heure ! dit le Skinner en montrant les dents, et en couvant l’argent des yeux.
    – Oui, pas davantage. Tenez, voilà l’argent.
    – Arrêtez ! s’écria Harvey, n’ayez pas de confiance en ce mécréant.
    – Qu’elle fasse de sa confiance ce qu’elle voudra, dit le Skinner, mais pour l’argent, je le tiens. Quant à toi, Birch, je supporterai ton insolence par égard pour les cinquante guinées que doit me valoir ton gibet.
    – Soit ! dit le colporteur avec fierté ; conduisez-moi au major Dunwoodie ; il peut être sévère, mais du moins il n’insulte pas au malheur.
    – Je ferai mieux que cela, répliqua le Skinner ; car je n’ai pas envie de faire un aussi long voyage en si mauvaise compagnie. La troupe du capitaine Lawton est à un demi-mille plus près, et son reçu de ta personne me fera payer la récompense promise tout aussi bien que celui du major. Qu’en dis-tu ? ne serais-tu pas charmé de souper ce soir avec le capitaine Lawton ?
    – Rendez-moi mon argent, ou laissez

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