Lettres - Tome I
CHER MINICIUS FUNDANUS.
Sollicitation.
Si je montre quelque discernement c’est bien en aimant d’une affection toute particulière Asinius Rufus. C’est un homme excellent et qui adore les gens de bien comme moi. Pourquoi ne pas me compter dans leur nombre ? Il est lié aussi par la plus étroite intimité avec Cornelius Tacite, dont vous appréciez le mérite. Si donc nous obtenons tous deux votre estime, il faut que au sujet de Rufus aussi, vous partagiez notre sentiment puisque pour nouer des amitiés il n’y a pas de lien plus solide que la ressemblance de caractères. Il a plusieurs enfants. Car il a rempli aussi ce devoir d’un bon citoyen de donner de nombreux enfants à la patrie, dans un siècle où la plupart regardent même un fils unique comme une charge, en comparaison des avantages réservés aux familles sans enfants. Lui, a méprisé ces profits et n’a pas craint d’assumer le nom d’aïeul. Car il est grand-père et grand-père de Saturius Firmus, que vous aimerez autant que je l’aime, quand vous le connaîtrez aussi intimement que moi.
Cela vous prouve quelle importante, quelle nombreuse famille vous allez obliger par un seul bienfait. Et, je suis amené à vous le demander, d’abord par un vœu que je forme, ensuite par je ne sais quel heureux pressentiment. Je vous souhaite en effet, je vous préjuge le consulat pour l’an prochain. Vos mérites et l’estime du prince m’autorisent à vous faire cette prédiction {84} . Or il se rencontre que c’est juste l’année de la questure de l’ainé des fils de Rufus, Asinius Bassus, jeune homme… (dirai-je ce que le père désire que je pense et que je dise, ce que la modestie du fils m’interdit ?) jeune homme encore meilleur que son père. Il vous est difficile de lui croire sur ma parole (quoique vous me croyiez d’ordinaire sur parole) sans le connaître, toute l’activité, la probité, la science, le talent, l’application, la mémoire enfin que vous lui trouverez à l’expérience. Je souhaiterais que notre temps fût si fertile en hommes de talents, que vous eussiez à en préférer plusieurs à Bassus ; alors je vous engagerais tout le premier et vous presserais d’y regarder plus d’une fois et de peser longtemps lequel mérite de fixer votre choix. Par malheur, aujourd’hui… mais je ne veux pas trop vanter mon ami, et je dis seulement que c’est un jeune homme digne d’être accueilli auprès de vous, comme un fils, selon la coutume de nos ancêtres. Des magistrats de votre sagesse doivent demander à l’État des subordonnés, comme si c’étaient des enfants, doués des qualités que nous souhaitons aux enfants donnés par la nature. Il sera flatteur pour vous d’avoir pendant votre consulat, pour questeur, le fils d’un ancien préteur, le parent d’hommes consulaires, à qui, de leur propre aveu, il rend déjà, malgré sa jeunesse, autant d’honneur qu’il en reçoit.
Soyez donc bienveillant à mes prières, écoutez mes conseils, et surtout, si je vous parais trop pressé, pardonnez-moi ; d’abord parce que l’affection est précipitée dans ses désirs, ensuite parce que dans un État où toutes les charges appartiennent pour ainsi dire au premier occupant, si l’on attend le moment fixé par la loi, elles vous arrivent non à l’heure, mais trop tard ; enfin jouir par avance de l’objet de ses désirs est déjà plein de douceur. Que Bassus vous révère dès maintenant comme son consul ; vous, aimez-le comme votre questeur, et moi, qui vous chéris tous deux, puissé-je goûter une double joie. En effet mon affection pour vous et pour Bassus est si grande que je faciliterai de tout mon pouvoir, de tous mes efforts, de tout mon crédit, l’accès des honneurs et à Bassus auprès de n’importe quel consul et à votre questeur à vous, quel qu’il soit ; j’éprouverai donc la joie la plus douce, si mon amitié et l’occasion de votre consulat rassemblent tous mes vœux sur le même jeune homme, si enfin c’est vous, plutôt que tout autre, qui secondez mes sollicitations, vous dont les recommandations trouvent le plus bienveillant accueil auprès du sénat et dont le témoignage lui inspire le plus de confiance. Adieu.
XVI. – C. PLINE SALUE SON CHER VALERIUS PAULINUS.
Un triomphe oratoire.
Réjouissez-vous pour moi, réjouissez-vous pour vous, réjouissez-vous aussi pour nos contemporains : les lettres sont encore en honneur. Dernièrement je devais plaider
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