Lettres - Tome II
Car, soupçonnant que vous trouveriez plein d’enflure ce qui n’est qu’un peu éclatant et pompeux, j’ai cru à propos, pour vous éviter des tourments, d’ajouter aussitôt une rédaction plus concise et plus modeste ou pour mieux dire plus terre à terre et plus médiocre, mais bien meilleure à votre goût, (car pourquoi me priverai-je de pourchasser et de traquer sans merci votre délicatesse ?) Voilà pour vous faire rire un peu parmi vos graves occupations ; voici du sérieux : songez à me rembourser le prix que j’ai payé pour vous envoyer un courrier tout exprès. Ainsi je suis sûr qu’en lisant cette demande ce n’est pas quelques parties de mon opuscule, mais l’opuscule entier que vous désapprouverez et auquel vous refuserez toute valeur, puisqu’on vous en réclame le prix. Adieu.
XIII. – C. PLINE SALUE SON CHER FEROX.
L’énigme.
Votre lettre m’annonce à la fois que vous travaillez et que vous ne travaillez pas. Je vous parle par énigmes. C’est bien vrai, mais je vais m’expliquer plus clairement. Elle affirme que vous ne travaillez pas, mais elle est si achevée, qu’elle ne peut avoir été écrite que par quelqu’un qui travaille ; autrement vous êtes le plus heureux des hommes, si vous écrivez avec cette perfection sans effort et en vous jouant. Adieu.
XIV. – C. PLINE SALUE SA CHÈRE CORELLIA.
La lutte délicate.
C’est vraiment de votre part une extrême délicatesse de me prier et même d’exiger avec tant d’instance que j’ordonne de recevoir de vous le prix de mes terres non sur le pied de sept cent mille sesterces, suivant le marché conclu avec mon affranchi {31} , mais sur le pied de neuf cent mille, selon l’estimation que les publicains ont faite du vingtième de la succession. À mon tour, je vous supplie et j’exige que vous considériez non seulement ce qui est digne de vous, mais aussi ce qui est digne de moi, et que vous me permettiez sur ce point seul de vous résister avec les mêmes sentiments que je vous obéis sur tous les autres. Adieu.
XV. – C. PLINE SALUE SON CHER SATURNINUS.
Les occupations diverses.
Vous me demandez quelles sont mes occupations ? Celles que vous connaissez bien, je suis absorbé par ma charge, je me mets au service de mes amis, je consacre quelques moments à l’étude, à laquelle il serait, je n’ose dire mieux, mais à coup sûr plus agréable de les donner tous exclusivement. Quant à vous, je serais peiné que vous fissiez toute autre chose que ce que vous désirez, si vos occupations n’étaient très honorables, car il y a le plus noble mérite à diriger les affaires de l’état et à trancher les différends entre ses amis. Je savais bien que vous seriez heureux d’avoir pour compagnon notre cher Priscus. Je connaissais sa franchise, je connaissais son affabilité, qu’il soit en outre très reconnaissant, qualité que j’ignorais, je m’en rends compte, quand vous m’écrivez qu’il garde un souvenir si agréable de mes services. Adieu.
XVI. – C. PLINE SALUE SON GRAND-PÈRE PAR ALLIANCE FABATUS.
L’obligeance entre amis.
Calestrius Tiro est un de mes amis les plus intimes, auquel je suis attaché par tous les liens privés et publics. Nous avons fait campagne ensemble, ensemble nous avons été questeurs de César. Lui m’a devancé dans le tribunat par le privilège des enfants {32} , mais je l’ai rejoint dans la préture, César m’ayant accordé une dispense d’un an. J’ai souvent goûté la retraite dans ses villas, souvent il a rétabli ses forces dans ma maison. Maintenant, il va, en qualité de proconsul, prendre possession de la province de Bétique en passant par Ticinum. J’espère ou plutôt je suis sûr d’obtenir facilement qu’il se détourne de sa route pour aller vous voir, si vous voulez affranchir par la baguette {33} , les esclaves, auxquels vous avez dernièrement, en présence de vos amis, donné la liberté. Vous n’avez pas à craindre d’importuner un homme qui ne trouverait pas long de faire le tour du monde pour me rendre service. Quittez donc cette excessive discrétion qui vous est habituelle, et ne consultez que votre désir. Il a autant de plaisir à me complaire que moi à vous obéir. Adieu.
XVII. – C. PLINE SALUE SON CHER CELER.
Utilité des lectures publiques.
Chacun a son motif de donner une lecture ; le mien, comme je l’ai dit souvent, est, si quelque faute m’a échappé, et il
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