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Lettres - Tome II

Lettres - Tome II

Titel: Lettres - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pline le Jeune
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aventuré avec trop d’audace et d’imprudence, me gronde, me reprend, me presse d’abandonner mon projet ; il ajoute même : « Vous vous êtes signalé à l’attention des futurs empereurs. » – « Tant mieux, dis-je, pourvu que ce soit à celle des méchants. » À peine celui-là m’avait-il quitté, qu’un autre revient à la charge : « Quelle audace est la vôtre ? Où vous précipitez-vous ? À quels périls vous exposez-vous ? Pourquoi vous fier au présent, sans être sûr de l’avenir ? Vous attaquez un homme qui est déjà préfet du trésor et sera bientôt consul ; de quel crédit, en outre, de quelles amitiés n’est-il pas soutenu ! » Il me nomme un personnage qui alors en orient était à la tête d’une armée puissante et glorieuse, mais sur lequel couraient des bruits assez forts et équivoques. Je lui réponds :
    « Tout est résolu et accompli d’avance en mon âme {73} et je ne refuse pas, si le destin le veut ainsi d’être puni pour une action généreuse, tandis que je vengerai un crime abominable. »
    Arrive le moment d’opiner. Parlent Domitius Apollinaris, consul désigné, Fabricius Veiento, Fabius Postumius, Bittius Proculus, collègue de Publicius Certus, de qui il s’agissait, et beau-père de la femme, que je venais de perdre, après eux Ammius Flaccus. Tous défendent Certus, que je n’avais pas encore nommé, comme si je l’eusse fait, et entreprennent d’écarter une accusation laissée pour ainsi dire en l’air. Que dirent-ils, je ne crois pas nécessaire de vous le raconter ; vous le trouverez dans mes écrits ; j’y ai tout consigné avec leurs propres termes.
    En sens contraire parlent Avidius Quietus, Cornutus Tertullus ; Quietus soutient que c’est une injustice criante de ne pas écouter les plaintes des victimes, qu’on ne doit donc pas priver Arria et Fannia des droits de plainte, ni regarder la condition de la personne, mais la nature de la cause. Cornutus dit que les consuls l’ont donné comme tuteur à la fille d’Helvidius, sur la demande de sa mère et de son beau-père ; même en ce moment il ne peut souffrir de manquer aux devoirs de sa mission ; tout en la remplissant, il saura cependant imposer des limites à son propre ressentiment et se conformer à l’attitude si modérée de ces admirables femmes, qui se contentent de rappeler au sénat les sanglantes adulations de Publicius Certus et de demander, si on lui fait grâce de la peine méritée par un crime manifeste, qu’il soit du moins marqué d’une flétrissure semblable à celle du censeur. Alors Satrius Rufus dans un langage neutre et équivoque : « Je pense, dit-il, que nous ferions injure à Publicius Certus, si nous ne l’absolvions pas ; il a été nommé par les amis d’Arria et de Fannia, il a été nommé par ses amis à lui. Nous ne devons avoir aucune inquiétude ; car c’est nous, qui, à la fois, avons bonne opinion de lui, et qui le jugerons aussi. S’il est innocent, comme je l’espère et le désire, et comme je le crois, jusqu’à ce que l’on apporte quelque preuve contre lui, vous pourrez l’absoudre. »
    Ainsi parla chacun, à mesure qu’on le citait. Mon tour vient. Je me lève, j’entre en matière comme dans mon écrit, je réponds à chacun. Ce fut merveille de voir avec quelle attention, avec quels applaudissements toutes mes paroles furent accueillies par ceux qui tout à l’heure protestaient ; tel fut le revirement produit, soit par l’importance de la cause, soit par le succès du discours, soit par l’énergie de l’orateur. Je finis. Veiento {74} entreprend de répondre, personne ne le lui permet ; on interrompt, on murmure, au point qu’il s’écrie : « Je vous en supplie, pères conscrits, ne m’obligez pas à implorer le secours des tribuns. » Aussitôt le tribun Murena dit : « Je vous permets de parler, très illustre Veiento. » Des protestations s’élèvent encore. Au milieu de cette obstruction, le consul, ayant fait l’appel nominal et compté les voix, lève la séance et laisse Veiento presque encore debout et s’efforçant de parler. Il s’est plaint amèrement de cet affront (c’était son expression) en se servant du vers d’Homère :
    « Ô vieillard, combien durement te pressent les jeunes gens belliqueux {75} . »
    Il n’y eut presque personne dans le sénat qui ne vînt m’embrasser, me baiser, m’accabler à l’envi d’éloges, pour avoir rétabli la coutume,

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