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L'hérétique

L'hérétique

Titel: L'hérétique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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manifestement un cadavre car son visage était recouvert d’un
linge blanc. Après quelques pas, un crucifix posé sur sa poitrine tomba, et les
moines durent s’arrêter pour le ramasser.
    — Nous avons eu quelque animation ici, cette nuit,
expliqua Planchard.
    L’euphémisme ne trompa pas son interlocuteur.
    — De l’animation ?
    — Vous avez probablement entendu la cloche ? Elle
a retenti trop tard, je le crains. Deux hommes se sont introduits dans le monastère
après le crépuscule. Comme notre porte n’est jamais fermée, ils n’ont eu aucune
difficulté pour entrer. Après avoir lié les mains et les pieds du portier, ils
ont filé droit sur l’infirmerie. Le comte de Bérat s’y trouvait. Il était
accompagné de son écuyer et de trois de ses hommes d’armes, qui avaient survécu
à un horrible combat dans la vallée voisine.
    De la main, l’abbé montrait la direction de l’ouest. S’il
savait ou devinait que Thomas avait été impliqué dans cet affrontement, il n’en
laissa rien paraître.
    — L’un des soldats dormait dans la chambre même de son
maître. Il a dû se réveiller quand les assassins sont arrivés. Il a été tué le
premier, puis les deux meurtriers ont tranché la gorge du comte avant de
s’enfuir…
    Le vieux prêtre avait narré ces événements d’une voix
monocorde, comme si les meurtres ignobles étaient monnaie courante à
Saint-Sever.
    — Le comte de Bérat ? demanda Thomas.
    — Un homme triste. Je l’aimais assez. Seulement, j’ai
peur qu’il n’ait été l’un de ces fous de Dieu. S’il était étonnamment érudit,
il ne possédait aucun bon sens. Je sais qu’il était un maître dur pour ses
métayers, mais il s’est toujours montré très bon pour l’Église. Je pensais
qu’il essayait de s’acheter sa place au Ciel. En réalité, il n’aspirait qu’à obtenir
un fils. Dieu n’a jamais comblé ce désir. Pauvre homme !
    Planchard suivit des yeux le cortège du comte défunt jusqu’à
la porte d’entrée. Puis il sourit gentiment à Thomas.
    — Certains de mes moines sont persuadés que vous êtes
l’assassin.
    — Moi ? s’exclama le jeune Anglais, stupéfait.
    — Je sais que ce n’est pas vous. On a vu les vrais
assassins s’enfuir au galop dans la nuit.
    Pensif, l’abbé secoua la tête.
    — Hélas, notre maison a été très perturbée, récemment,
et les frères peuvent rapidement se monter la tête. Mais pardonnez-moi, je ne
vous ai pas demandé votre nom…
    — Thomas.
    — Un beau nom. Juste Thomas ?
    — Thomas de Hookton.
    — Un nom qui sonne très anglais. Et vous êtes
quoi ? Un soldat ?
    — Un archer.
    — Pas un frère prêcheur, alors ? demanda Planchard
avec une sorte d’air mi-sérieux, mi-amusé.
    — Vous êtes au courant ? s’étonna le jeune homme,
ne sachant trop s’il devait sourire ou s’inquiéter.
    — Je sais qu’un archer anglais répondant au nom de
Thomas est arrivé à Castillon d’Arbizon habillé en dominicain. Je sais qu’il
parlait un bon latin, qu’il s’est emparé du château et qu’il a ensuite répandu
une certaine douleur dans la campagne alentour. Et je sais qu’il a été la cause
de nombreuses larmes, Thomas, de nombreuses larmes. De pauvres gens qui
ont lutté leur vie entière pour bâtir un toit pour leurs enfants l’ont vu
réduire en cendres en quelques minutes tout ce qu’ils possédaient.
    Les yeux fixés sur l’herbe, Thomas garda le silence. Que
pouvait-il répondre à cela ?
    — Vous devez savoir bien d’autres choses, finit-il par
dire au bout d’un moment.
    — Je sais que vous et votre compagne êtes excommuniés.
    — Alors je ne devrais pas me trouver ici, constata
l’archer en montrant le cloître de la main. Je suis interdit dans les enceintes
sacrées, ajouta-t-il avec amertume.
    — Vous êtes ici sur mon invitation, répondit l’abbé
avec douceur, et si Dieu désapprouve cette initiative, Il ne tardera pas à
avoir une occasion de me réclamer une explication.
    Thomas dévisagea le moine, qui supporta patiemment son
examen attentif. Il y avait quelque chose chez Planchard, songea l’Anglais, qui
lui rappelait son propre père, la folie mise à part. Mais il y avait surtout de
la sainteté, de la sagesse et de l’autorité dans le vieux visage creusé. Il sut
instantanément qu’il aimait cet homme. Qu’il l’aimait beaucoup. L’esprit
bouillonnant, il tourna son regard vers le jardinet au centre du

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