L'hérétique
et des écus. Sous la
voûte de l’entrée, la bousculade empêchait les derniers assaillants d’avancer.
Volée après volée, Jake noyait les forces d’assaut sous ses flèches. Puis
messire Guillaume fit signe à ses propres soldats d’avancer.
— Ils ne veulent pas de prisonniers, leur cria-t-il,
vous m’entendez ? Pas de prisonniers !
Le Normand et ses hommes attaquèrent depuis le flanc gauche
de la cour. Jake emmena ses archers vers la droite et ordonna de ne tirer qu’au
travers de la porte sur les quelques silhouettes qui se trouvaient encore sous
l’arche. Au bout de quelques secondes, les tirs de flèches cessèrent. La
plupart des ennemis étaient morts, et ceux qui vivaient encore étaient aux
prises avec la contre-attaque soudaine de Guillaume sortant de l’angle de la
cour.
Un massacre. Déjà à moitié terrassés par les flèches, les
assaillants avaient pensé que les défenseurs se trouveraient tous de l’autre
côté de la barricade. Au lieu de cela, ils voyaient surgir leurs ennemis sur
leur flanc. Or, conscients que leurs adversaires ne voulaient que leur mort,
les hommes du château n’étaient enclins à aucune pitié.
— Bâtard !
John Faircloth achevait un homme à terre en introduisant son
épée dans un accroc de sa cotte de mailles.
— Bâtard, répéta-t-il en tranchant la gorge d’un
arbalétrier.
Armé d’une hache, un Bourguignon pulvérisait des heaumes et
des crânes avec des coups d’une grande efficacité, maculant de sang et de
cervelle les pierres déjà inondées d’huile. Parvenant à s’extraire en grondant
de l’entrelacs de corps, un homme de haute taille, puissant et vif, tenta tout
seul de charger la garnison en piétinant les cadavres encombrant sa route.
Messire Guillaume amortit son coup d’épée sur son écu et plongea sa lame dans
la gorge de l’ennemi. Les lèvres essayant de former une dernière obscénité, les
yeux écarquillés, l’homme d’armes fixa le Normand. Un flux de sang aussi épais
que du lard envahit sa bouche. Puis il vacilla et s’effondra lourdement sur le
sol. Guillaume d’Evecque était déjà passé à un autre adversaire. Maintenant,
les archers laissaient leurs arcs et attrapaient haches, épées ou dagues pour
achever les blessés. Des cris de grâce retentissaient dans la cour. Les
hurlements se répercutaient contre les murs. À l’arrière de l’attaque, quelques
rares assaillants étaient encore indemnes parce qu’ils n’avaient pas eu le
temps d’atteindre la porte.
« Saint Georges ! Saint Georges ! »
Entendant les clameurs victorieuses des Anglais, ils
abandonnèrent le combat.
Sous l’arche de l’entrée, un homme, étourdi par un coup
d’épée sur son heaume, se précipita du mauvais côté et se retrouva face à John
Faircloth et à sa longue lame. Celle-ci s’immisça entre les anneaux de fer de
sa cotte de mailles et ouvrit le ventre de l’égaré.
— Bâtard, répéta Faircloth en retirant sa lame du corps
ennemi.
— Dégagez la porte ! cria messire Guillaume.
Tirez-les en arrière !
Il n’avait pas envie que ses hommes se fissent tirer dessus
par les arbalétriers postés à l’extérieur du château, pendant qu’ils pillaient
les cadavres et leur enlevaient leurs armures et leurs armes. Appliquant
l’ordre de leur chef, ils ramenèrent les corps dans la cour et les poussèrent
sur le côté. Près de la porte ou à l’intérieur de l’enceinte, pour autant
qu’Evecque pouvait le voir, il n’y avait plus un seul blessé encore en vie.
L’ennemi avait appelé à ne pas faire de prisonniers, et la garnison avait obéi.
Cette fois, l’attaque était terminée.
Mais le danger n’était pas pour autant écarté. Il restait
encore deux corps dans le passage voûté. Le Normand savait que les arbalétriers
de Bérat, positionnés plus bas en ville, pouvaient voir à l’intérieur de la
porte. Alors, se protégeant le corps avec son écu, il se pencha en avant et
tira d’une main le premier cadavre dans la cour. Il n’y avait, hélas, aucun
signe de Joscelyn. Messire Guillaume avait rêvé de faire prisonnier le comte
une seconde fois.
Bâtard, pensa Guillaume.
Un carreau se planta dans le haut de son écu qui alla cogner
contre le sommet de son heaume. Il se recroquevilla davantage, attrapa la
cheville du dernier macchabée et le tira. Mais l’homme n’était pas mort :
il tressauta, commença à se débattre. Le Normand lui asséna un grand coup
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