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L'hérétique

L'hérétique

Titel: L'hérétique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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doit te brûler, si tu es une hérétique.
    — Si ?
    Comme Thomas ne répondait pas à cette dernière
interrogation, Geneviève ferma une nouvelle fois les yeux et reposa sa tête
contre les pierres humides.
    — Ils ont dit que j’avais insulté Dieu, continua-t-elle
d’une voix empreinte d’une grande lassitude, que j’avais clamé que les prêtres
de l’Église de Dieu étaient corrompus, que je dansais nue sous les éclairs, que
je me servais des pouvoirs du diable pour trouver de l’eau, que j’utilisais la
magie pour soigner les malades, que je prophétisais le futur et que j’avais
jeté un sort à la femme de Galat Lorret et à son bétail.
    Thomas fronça les sourcils.
    — Ils ne t’ont pas condamnée comme bégharde ?
    — Si. Pour ça aussi, répondit-elle sèchement.
    Le jeune homme resta silencieux, le temps de quelques
battements de cœur. De l’eau s’égouttait dans l’obscurité, de l’autre côté de
la porte. La lumière des joncs tremblotait. Sous l’effet d’un imperceptible souffle
d’air, elle mourut presque, puis se raviva.
    — Quelle femme as-tu maudite ?
    — La femme de Galat Lorret. Il vend des vêtements.
C’est un très riche marchand, et il est aussi le premier consul de la ville.
Mais c’est surtout un homme qui aimerait bien avoir dans son lit une chair plus
fraîche que celle de sa femme.
    — Et donc tu l’as maudite ?
    — Pas simplement elle, répondit la fille avec
véhémence, lui aussi ! Tu n’as jamais maudit personne ?
    — Tu as également prophétisé l’avenir ?
demanda-t-il sans répondre.
    — J’ai simplement dit qu’ils allaient tous mourir, mais
c’est une évidence, non ?
    — Pas si le Christ revient sur terre comme Il l’a
promis.
    La jeune fille posa sur lui un long regard scrutateur. Puis
elle esquissa un petit sourire fugitif avant de hausser les épaules.
    — Alors j’avais tort, dit-elle sur un ton sarcastique.
    — Et le diable t’a aussi montré comment découvrir de
l’eau ?
    — Même toi tu peux le faire. Tout le monde en est
capable. Prends une baguette fourchue et marche lentement sur un champ. Et
quand elle oblique vers le sol, creuse.
    — Et les guérisons magiques ?
    — De vieux remèdes, dit-elle avec lassitude. Des choses
qu’on apprend d’une tante, d’une grand-mère ou de n’importe quelle vieille femme.
Par exemple qu’il faut enlever le fer dans une pièce où une femme accouche.
Tout le monde le fait. Même toi, prêtre, tu touches sûrement du bois pour
conjurer le mauvais sort. Est-ce que cet acte magique suffit à t’envoyer au
bûcher ?
    De nouveau, Thomas fit mine d’ignorer cette réponse hardie.
    — Tu as insulté Dieu ?
    — Dieu m’aime et je n’insulte pas ceux qui m’aiment. En
revanche, j’ai vraiment dit que Ses prêtres sont corrompus, ce que tu es, et
c’est pour ça qu’ils m’ont accusée d’avoir insulté Dieu. Es-tu corrompu,
prêtre ?
    L’Anglais se dispensa encore une fois de répondre pour
continuer son examen de l’acte d’accusation :
    — As-tu dansé nue sous les éclairs ?
    — Sur ce point, je plaide coupable.
    — Pourquoi as-tu dansé ?
    — Parce que mon père disait toujours que Dieu nous
conseillerait et nous guiderait si nous faisions ça.
    — Dieu ferait ça ? s’étonna Thomas.
    — C’est ce que nous croyions. Mais nous nous trompions.
Tout ce que Dieu m’a conseillé, c’est de rester à Castillon d’Arbizon, et cela
ne m’a servi qu’à être torturée et demain à monter sur le bûcher.
    — Torturée ?
    Une étrange inflexion dans la voix du jeune homme, comme un
étranglement d’horreur, surprit Geneviève. Alors, lentement, elle étendit sa
jambe gauche pour qu’il puisse voir l’intérieur de sa cuisse et la cruelle
marque rouge torsadée qui défigurait sa peau blanche.
    — Ils m’ont brûlée, expliqua-t-elle, encore et encore.
C’est pour ça, parce qu’ils me torturaient, que j’ai confessé être une bégharde
alors que je ne l’étais pas.
    Brusquement le souvenir de ces moments d’intense souffrance
la fit pleurer.
    — Ils m’ont brûlée au fer rouge et quand j’ai crié… ils
ont dit que c’était le diable qui essayait de quitter mon âme.
    Elle ramena sa jambe et présenta cette fois son bras droit,
qui portait les mêmes cicatrices.
    — Mais ils ont laissé ceux-ci intacts, ajouta-t-elle
avec colère en exhibant ses petits seins, parce que le père Roubert

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