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L'hérétique

L'hérétique

Titel: L'hérétique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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Calix
meus inebrians  » au-dessus de sa porte ?
    — Les Pères de l’Église doutent que le psalmiste ait
vraiment voulu parler d’ivresse. Du moins, pas comme nous l’entendons.
Peut-être qu’il voulait dire « ivre de joie » ? Et donc
« Ma coupe me réjouit »…
    — Mais quelle « coupe » ? insista le
comte.
    Il ne reçut aucune réponse. Le silence de la pièce n’était
rompu que par le bruit de la pluie et le crépitement des bûches. Le frère
continuait d’étudier le contrat. Brusquement, il repoussa sa chaise et se
dirigea vers les rayonnages. Attrapant un grand livre à chaîne, il le descendit
et le déposa soigneusement sur le lutrin. Après avoir défait le lien retenant
la couverture, il ouvrit les énormes pages rigides.
    — Quel livre as-tu pris ? demanda Bérat.
    — Les annales du monastère de Saint-Joseph.
    Le père Roubert tournait rapidement les pages en quête d’une
information spécifique.
    — Nous savons, ajouta-t-il, que le dernier comte
d’Astarac fut contaminé par l’hérésie cathare. On dit que son père l’avait
envoyé pour être écuyer auprès d’un chevalier à Carcassonne et que c’est ainsi
qu’il devint un pécheur. Finalement, il hérita d’Astarac et accorda son soutien
aux hérétiques. Nous savons aussi qu’il fit partie des derniers seigneurs
cathares…
    Il marqua une pause pour tourner une autre page.
    — Ah, nous y sommes… Montségur est tombée le jour de la
Saint-Joevin, dans la vingt-deuxième année du règne de Raymond VII.
    Raymond avait été le dernier grand comte de Toulouse. Cela
faisait maintenant près d’un siècle qu’il était mort. Le père Roubert calcula
une seconde dans sa tête.
    — Cela signifie que Montségur serait tombée en 1244.
    Le comte se pencha sur la table et récupéra le contrat. Il
le parcourut une nouvelle fois, trouva ce qu’il cherchait.
    — Et ce document est daté de la veille de la
Saint-Nazaire de cette même année. Cette fête tombe fin juillet, n’est-ce
pas ?
    — Oui, confirma le père Roubert.
    — Et le jour de la Saint-Joevin tombe en mars, ce qui prouve
que le comte d’Astarac n’est pas mort à Montségur.
    — Quelqu’un a ordonné que la citation latine soit
gravée, suggéra le dominicain. Et si ce n’est lui, c’est peut-être son
fils ?
    Il continuait de tourner les grandes pages des annales,
frémissant à la vue des capitales enluminées grossièrement. Puis il trouva le
nouveau renseignement qu’il cherchait :
    — « Et l’année de la mort de notre comte, quand il
y eut une grande épidémie de crapauds et de vipères, lut-il à haute voix, le
comte de Bérat prit Astarac et massacra tout ce qui s’y trouvait. »
    — Mais les annales ne disent pas qu’Astarac lui-même
mourut ?
    — Non. Les moines de Saint-Joseph ne parlent que de la
mort de leur propre comte.
    — Et s’il avait survécu ?
    Maintenant tout excité, le maître des lieux avait quitté sa
chaise pour arpenter la pièce de long en large.
    — Pourquoi aurait-il abandonné ses camarades à
Montségur ? s’interrogea-t-il.
    — S’il l’a fait…
    À sa voix, le père Roubert paraissait fort dubitatif.
    — En tout cas, quelqu’un a ordonné cette gravure
latine. Quelqu’un qui avait l’autorité pour engager un maçon et qui voulait
laisser un message dans la pierre. Quelqu’un qui…
    Le comte s’interrompit brutalement.
    — Pourquoi, pour désigner la date, parlent-ils de la
veille de la Saint-Nazaire ? s’étonna-t-il soudainement.
    — Pourquoi pas ?
    — C’est le jour de la Saint-Pantaléon. Pourquoi ne pas
avoir désigné la date sous ce nom précis ?
    — Parce que…
    Le père Roubert s’apprêtait à expliquer que saint Nazaire
était plus connu que saint Pantaléon et que c’était donc un bon choix, mais le
comte l’interrompit :
    — Parce que c’est la date des Sept-Dormants ! Ils
étaient sept, Roubert ! Sept survivants ! Et ils voulaient que la
date inscrite mette ce détail en évidence !
    Le frère pensa que la démonstration du comte était
particulièrement tirée par les cheveux [18] mais il ne dit mot.
    — Et pense à l’histoire ! le pressa le vieil
homme. Sept jeunes hommes menacés de persécution fuient leur ville. Quelle
est-elle ? Éphèse, naturellement. Et ils se cachent dans une grotte.
L’empereur… C’était Décius, n’est-ce pas ? Oui, je suis certain que
c’était lui. Décius, donc, ordonna

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