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L'hérétique

L'hérétique

Titel: L'hérétique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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ce temps, nous négocions l’utilisation du canon à
Toulouse. Déjà, comme tu le sais, nous offrons une récompense pour tout archer
anglais capturé vivant. Une récompense généreuse, donc je ne doute pas un seul
instant que tous les routiers et coredors de Gascogne se joindront à la
chasse. Les Anglais vont finir par se retrouver entourés d’ennemis. La vie ne
va pas être drôle pour eux, crois-moi.
    — Pourquoi vivants ? s’emporta le chevalier.
Pourquoi pas des archers anglais morts ?
    Le comte soupira.
    — Parce que dans le cas contraire, mon cher Joscelyn,
les coredors vont nous apporter un jour une dizaine de cadavres en prétendant
qu’ils sont anglais. Nous avons besoin de faire parler les archers avant de les
tuer pour nous assurer de leur identité. Nous devons, pour ainsi dire,
inspecter les seins pour nous assurer que la barbe soit vraie…
    Il fixait intensément le mot Calix, priant pour que
son souvenir daigne enfin remonter à la surface de sa conscience.
    — Je doute que nous puissions capturer beaucoup
d’archers, continua-t-il. Ils chassent en meutes et sont très dangereux. Nous
allons attendre patiemment en embuscade, jusqu’à ce que les Anglais commettent
une erreur. Ce qu’ils finiront par faire, j’en suis certain, même s’ils pensent
assurément que nous ferons le premier faux pas. Ils veulent précisément que tu
les attaques, Joscelyn, pour pouvoir te cribler de flèches. Nous devons les
attaquer quand ils ne s’y attendent pas. Alors pars avec les hommes de messire
Henri. Assure-toi que les fanaux sont en place. Et quand le temps sera venu, je
te laisserai agir. Je te le promets.
    Comme à Astarac, les fanaux étaient préparés dans chaque
ville et village du comté. C’étaient ces grands tas de bois qui, une fois
allumés, lançaient un signal de fumée vers le ciel pour prévenir que les
maraudeurs anglais se trouvaient dans le secteur. Ces feux d’alarme alertaient
les communautés voisines et indiquaient aussi aux guetteurs du donjon du
château de Bérat où chevauchaient les Anglais. Un jour, espérait le comte, ils
s’approcheraient trop de Bérat ou ils s’aventureraient dans un endroit où ses
propres hommes pourraient leur tendre une embuscade. Il se contenterait donc
d’attendre qu’ils commettent cette erreur. Et ils la commettraient : les coredors finissaient toujours par en faire une, et ces Anglais, même s’ils
arboraient les armes du comte de Northampton, ne valaient pas mieux que de vulgaires
brigands.
    — Pars, affûte tes armes et entraîne-toi, Joscelyn. Et
emmène cette cuirasse avec toi.
    Le jeune homme sortit, tandis que le père Roubert partait
remettre des bûches dans l’âtre. Le vieillard suivit le religieux des yeux
avant de revenir à son document. Le comte d’Astarac avait engagé un tailleur de
pierres pour graver «  Calix meus inebrians  » au-dessus de la
porte de son château, et le parchemin précisait que la date figurant sur le
contrat devait être ajoutée à la légende. Pourquoi ? Pourquoi un homme
pouvait-il vouloir que les mots « La coupe me rend ivre » ornent la
façade de sa demeure ?
    — Père Roubert ?
    Inconsciemment, il avait affublé le moine de son titre
sacerdotal.
    — Votre neveu va se faire tuer, maugréa le dominicain.
    — J’en ai d’autres.
    — Mais Joscelyn a raison. Ils doivent être combattus,
et combattus au plus vite. Il y a une bégharde à brûler.
    La rage du moine le tenait éveillé la nuit. Comment
avaient-ils pu oser épargner une hérétique ? Il restait allongé sur son
lit étroit, se remémorant les hurlements de la fille pendant que les flammes
consumaient sa robe. Quand tout le tissu avait été brûlé, elle s’était
retrouvée nue et le moine se souvenait du corps gracile et pâle entravé à la
table. Il avait compris alors ce qu’était la tentation. Il l’avait ressentie,
et détestée, et il avait éprouvé un intense plaisir à appliquer le fer rouge
sur la peau tendre des cuisses de la suppliciée.
    — Roubert, tu dors à moitié ! le tança le comte.
Examine-moi ça.
    Il poussa le contrat du tailleur de pierres à l’autre
extrémité de la table.
    Le dominicain fronça les sourcils en essayant de déchiffrer
l’écriture passée, puis il reconnut la phrase.
    — Elle est tirée d’un psaume de David…
    — Naturellement ! Suis-je bête ! s’exclama le
vieil homme. Mais pourquoi un homme peut-il avoir envie de graver « 

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