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L'Héritage des Cathares

L'Héritage des Cathares

Titel: L'Héritage des Cathares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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Androuet en s’approchant de son seigneur.
    —    Non. Ils sont là. Mais ils ont peur et qui pourrait leur en faire le reproche ? À leur place, sortirais-tu de ta tanière ? Sacredieu, les croisés devraient garder leur rage pour les hérétiques au lieu de terroriser ainsi les chrétiens.
    Il descendit de sa monture, déboucla son ceinturon et, d’un geste théâtral, posa ses armes à ses pieds.
    —    Faites comme moi, vous autres, ordonna-t-il sans se retourner.
    Tous, nous l’imitâmes. Puis il prit dans un sac de sa selle une bourse de cuir remplie de pièces et leva les mains.
    —    Voyez ! Nous sommes désarmés ! Nous ne vous voulons aucun mal !
    Il agita la bourse, dont les tintements étaient reconnaissables entre tous.
    —    J’ai de quoi payer ! Si ce village n’est peuplé que de femmelettes effrayées, au moins que le forgeron se montre !
    Un homme sortit enfin de derrière la petite église et s’approcha avec méfiance. Il était court et costaud. Les cheveux ras et la barbe qui lui descendait à mi-poitrine, il avait les mains aussi grosses que des enclumes. Il tenait un lourd maillet de métal qui pourrait servir à ouvrir le crâne de quiconque si l’envie lui en prenait. Ses jambes massives et arquées dépassaient sous un long tablier de cuir tacheté de brûlures. Il s’arrêta à quelques pas d’Evrart.
    —    Je suis Bertaut, le forgeron, déclara-t-il avec un accent prononcé et chantant qui me rappela celui de Montbard. Tu as des chevaux à ferrer, monseigneur ?
    —    Morbleu ! Il était temps, mon brave ! s’écria Evrart en éclatant de rire.
    Il ouvrit sa bourse et en tira trois pièces d’argent qu’il posa dans la grosse patte de Bertaut, qui écarquilla les yeux.
    —    Sept bêtes. Ceci suffira-t-il pour ta peine ?
    —    Amplement, messire...
    —    Bien.
    Evrart se retourna vers Androuet.
    —    Assure-toi qu’il fait un bon travail. Je ne voudrais pas que l’un de nous se retrouve en pleine bataille avec un cheval boiteux.
    — Bien, sire.
    Androuet se mit à faire le tour des chevaux avec le forgeron. Ils les entraînèrent vers la boutique de forge. Parmi eux se trouvait Sauvage, qui s’était mis à boitiller quelques heures auparavant et que je regardai s’éloigner le cœur serré. Quelques minutes plus tard, le bruit du marteau sur l’enclume retentit, puissant, sec et régulier comme une horloge.
    Un à un, les villageois émergèrent de leurs cachettes, encouragés par le fait que le forgeron avait été payé d’avance et qu’aucun d’entre nous ne montrait d’intention belliqueuse. Bien au contraire, les hommes d’Evrart, comme leur chef, étaient d’une étonnante politesse et eurent tôt fait de gagner la confiance de leurs hôtes. Nous fûmes entourés par une petite foule curieuse de laquelle se détacha un prêtre entre deux âges. Après quelques minutes passées à parlementer avec Evrart, il reçut lui aussi des pièces et ordonna aux femmes du village de dresser une table bien garnie dans l’étable communale.
    Le seigneur de Nanteroi repéra ensuite l’armurier, un petit homme chétif, mais énergique, à la peau burinée et à la tête couronnée de touffes folles. Il discuta quelques instants avec lui, lui donna deux pièces et ordonna que toutes nos armes lui soient confiées pour être affûtées. L’homme, ravi de cette manne providentielle, appela son apprenti et, les bras chargés d’épées, de dagues et d’un écu dont une sangle devait être réparée, tous deux s’éloignèrent vers leur atelier.
    La plupart des villageois parlaient un patois chantant dont je ne saisissais que des bribes. Je surpris mon maître en conversation avec un vieillard et constatai sans vraiment en être étonné qu’il s’exprimait couramment dans cet idiome. Bertrand de Montbard était de retour dans son pays.
    Les villageoises avaient improvisé une longue table avec des planches posées sur des tréteaux et y posèrent toutes les victuailles qu’elles purent produire, ce qui se sommait à peu de choses : un peu de jambon, du boudin, du pain noir frais et des oignons crus. Mais le vin était riche et corsé, et coulait en abondance, ce qui nous fit un peu tourner la tête et eut pour effet de détendre l’atmosphère, de sorte que la soirée fut ponctuée de rires sonores. Seule ombre au tableau : Montbard prit soin de s’asseoir loin de moi. Les discussions allèrent bon train et

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