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L'Héritage des Cathares

L'Héritage des Cathares

Titel: L'Héritage des Cathares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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travers la brume qui avait recouvert mes yeux, je reconnus l’homme au front marqué qui bloquait le soleil. Onfroi posa sur ma poitrine la seule main que je lui avais laissée.
    —    Cette fois-ci, il est bien mort !
    Je sentis le brigand écarter le col de ma cotte de mailles et tâter la cicatrice qu’avait laissée son épée sur ma gorge lors de notre dernière rencontre.
    —    Il est plus difficile à tuer qu’un esprit, le bougre.
    Il me cracha au visage.
    —    Relevez-le, ordonna-t-il.
    Je sentis des mains qui m’empoignaient par les mains et les chevilles. Je fus soulevé, ma tête ballottant mollement vers l’arrière, le trait d’arbalète toujours fiché dans le front, mis sur pied et soutenu par les aisselles. Je sentis qu’on me débarrassait de mon écu et qu’on étendait mes bras en croix.
    —    Loys, voyons si tu es aussi bon arbalétrier que tu le dis ! s’écria Onfroi.
    Quelques secondes s’écoulèrent, puis j’entendis le déclic d’une arbalète. Le carreau siffla dans les airs et transperça ma main gauche, me clouant à la paroi à laquelle on m’avait adossé. De grands cris résonnèrent, suivis d’applaudissements. J’aurais voulu hurler de douleur, mais ma prison de chair m’en empêchait. Quelques instants s’écoulèrent puis ma main droite fut pareillement empalée.
    —    Voilà ! Ainsi, tous pourront admirer le grand Gondemar, seigneur de Rossal ! s’exclama Onfroi. Oh ! Comme ils trembleront devant ce grand justicier.
    Les brigands s’esclaffèrent quand leur chef me tapota la joue gauche de son crochet dans une obscène parodie d’affection.
    —    Tu vois ? Je n’ai jamais oublié ton nom.
    Il se retourna vers ses hommes.
    —    Allons, les enfants ! Nous avons encore des filles à lutiner et des maisons à piller !
    Je les entendis s’éloigner. Je restai là, longtemps, crucifié comme mon père l’avait été jadis par le même homme. De temps à autre, des gens passèrent près de moi sans accorder la moindre attention à un cadavre parmi tant d’autres. Le soir tomba sans que ma situation change. Puis, sans doute à bout de sang, je perdis conscience.
    Les visages de mon passé défilèrent devant mes yeux. Ma mère et mon père, sacrifiés par l’homme qui venait de m’assassiner. Bertrand de Montbard, qui m’avait tant donné et que j’avais si amèrement déçu. Le père Prelou, dont j’avais récompensé l’affection en le brûlant vif. Odon, cet innocent que j’avais tué avec les autres. Evrart de Nanteroi, qui m’avait recueilli et soigné. Pernelle, la seule amie que j’avais eue, mais que je n’avais pas su défendre.
    Lorsque je sombrai dans la nuit, Pernelle me regardait.

Chapitre 13 Les retrouvailles
    Des pleurs déchirants me tirèrent de l’inconscience. Quelque part dans le noir où je gisais, emmuré en moi-même, un homme sanglotait, au comble du désespoir.
    —    Non ! Je t’en supplie ! Pas mon bras ! Comment vais-je nourrir ma famille si je suis manchot ?
    Une angoisse glaciale m’étreignit le cœur. Cette nuit peuplée de cris horribles était-elle une autre version de l’enfer ? Y étais-je retourné pour subir le sort qui était le mien parmi les maudits que des diablotins tourmentaient sans cesse ? Étais-je damné pour l’éternité ?
    —    Mon pauvre ami, répondit une voix féminine remplie de douceur et de compassion, le pourrissement s’est mis dans ta blessure. Si je ne le coupe pas dès maintenant, elle se répandra. Mort, tu ne la nourriras plus du tout, ta famille.
    Dans la semi-conscience où je flottais, je notai confusément que la femme n’avait pas l’accent chantant de ces contrées, mais bien celui du Nord. Le mien.
    —    Non. Si je meurs. haleta l’homme. Ma femme. J’ai sept enfants. Je ne veux pas les voir devenir mendiants.
    —    Ne crains rien, Fermin. Si le vrai Dieu te rappelle à sa lumière éternelle, ta femme et tes enfants auront un toit et mangeront à leur faim. Les Parfaits y verront.
    —    Jure-le-moi !
    —    Prêter serment est contraire aux enseignements, tu le sais bien. Ego autem dico vobis : Non iurare omnino, nequeper caelum, quia thronus Dei est 1 . Mais je m’y engage sur l’honneur.
    Il y eut un long silence chargé. Puis l’homme parut prendre une décision.
    —    Parfaite sœur. Avant, donne-moi le consolamentum.
    —    Avec bonheur, mon frère, puisque tu le souhaites. Entends-tu bien que

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